Les graciés du retournement de tendance des marchés en 2015

 Les graciés du retournement de tendance des marchés en 2015
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2015 aura été une année de rupture après une décennie d'envol des cours des matières premières  prises globalement, qu'elles soient agricoles ou minières. L'indice Thomson Reuters/Core Commodity (CRB), qui comprend 19 matières premières allant du pétrole aux céréales, a perdu un quart de sa valeur pour toucher en décembre son plus bas niveau depuis 2002.

Les raisons principales ? Le ralentissement persistant de la croissance chinoise et le redressement du dollar face aux autres devises, ce qui renchérit le coût des matières premières puisque la quasi-totalité de leurs prix sont exprimés en dollar. Et le retournement, en décembre, de la politique monétaire des Etats-Unis, avec le relèvement des taux par la Réserve fédérale, devrait encore renforcer le dollar. Le billet vert a terminé 2015 en hausse de 10,2 % à 1,093 contre un euro, sa deuxième année de progression face à la monnaie unique, et de 9% face à un panier de devises.

Ainsi, quasiment tous les prix des matières premières se sont inscrits à la baisse sauf le cacao, le sucre, le coton, sans oublier le jus d'orange concentré mais qui n'intéresse guère l'Afrique de l'Ouest, voire le reste de l'Afrique sub-saharienne, Afrique du Sud mise à part.

"On doit avoir des fondamentaux réellement exceptionnels pour combattre la tendance macro négative", explique Michael McDougall, directeur produits de base à la Société Générale à New York.

Une poignée de matières agricoles à la hausse

Sur les 19 matières premières constituant l'indice CRB, les produits agricoles, hormis le café, ont globalement mieux performés que les autres matières premières avec des hausses particulièrement fortes pour le cacao, le coton, le sucre et le jus d'orange.

 

  07/01/11 29/12/11
CACAO    
Côte d'Ivoire, euro/tonne 2650 3080
Ghana, £/tonne 2135 2350
Beurre, £/tonne 4475 4600
CAFÉ    
Robusta    
Côte d'Ivoire grade 1, $/tonne 2210 1798
Vietnam Grade 2, $/tonne 2060 1638
Conilon Brésil, 13 up, $/tonne 2120 1938
Arabica    
Ethiopie Djima 5, Cts/lb 170,65 111,8
Kenya AB 244,65 243,8
Brésil Santos 2/3, cts/lb 176,65 152,8
VANILLE    
Madagascar noire, non fendue 95 195
RIZ    
Viet 25, $/tonne FOB 355 300
SÉSAME    
Graines, Whitish Ethiopia Humera, $/t 1620 980
HUILE DE PALME    
CIF Rotterdam, $/tonne 705 570
COTON    
Afrique zone Franc, €/tonne 1218,5 1425,08
SUCRE    
ICE Futures, cents/lb 14,8 15,24
Source: CommodAfrica    

 

  • Les performers

Pour la quatrième année consécutive, le cours mondial du cacao s'est inscrit à la hausse en 2015, gagnant 10,5% sur l'ensemble de l'année. Le meilleur performer de l'indice CRB ! A la clef, une faible récolte chez le n°2 mondial, le Ghana, et un temps très sec globalement en Afrique de l'Ouest où souffle l'harmattan. Cette belle performance a attiré les hedge funds et autres spéculateurs début décembre, intensifiant le mouvement haussier.

Autre performer, le sucre. Après avoir touché en août son prix le plus bas depuis 7 ans, le sucre roux a enregistré un rebond qui l'a propulsé de 50% sur les 4 derniers mois de l'année, stimulé par la perspective d'un déficit mondial pour la première fois depuis 6 ans.

L'huile de palme sur le marché à terme en Malaisie a grimpé de 9,5% sur l'année, essentiellement à cause des craintes de l'impact du phénomène météorologique El Niño sur la production. D'autre part, la décision de l'Indonésie d'accroître la part minimum de biocarburant dans la fabrication de son diésel, une part qui passerait donc des 15% jusqu'alors à 20% dorénavant, impactera l'utilisation de l'huile de palme.

Le coton, pour sa part, a gagné plus modestement 5% sur le marché à terme de New York, les exportations américaines baissant de 10% par rapport à l'année précédente et de 27% par rapport à la moyenne des 4 précédentes années.

Un mot de la vanille, produit non coté en bourse, mais le réel performer de 2015 en raison de l'impact du blanchiment d'argent lié au trafic de bois de rose (lire nos informations).

  • Les perdants

Le cours de l'Arabica exprimé en dollar a chuté de 24% en 2015, une des plus mauvaises performances du marché des matières premières. Les pluies au Brésil ont boosté la production tandis que la chute du real (-60%) comme des monnaies d'autres producteurs a conduit ces pays à exporter davantage, quitte à puiser dans les stocks : les exportations en 2015 devraient donc excéder le record des 36,6 millions de sacs de 60 kg enregistré en 2014, estiment les industriels. Ceci dit, deux bémols sont à apporter à cette performance, a priori, décevante. Cette baisse en 2015 suit une année 2014 durant laquelle les prix de l'Arabica s'étaient envolés de 50% car le Brésil avait enregistré une de ses pires sécheresses. Deuxièmement, si le prix de l'Arabica exprimé en dollar a effectivement baissé de 24%, il a augmenté de plus de 10% exprimé en real.

Le ralentissement économique chinois a énormément pesé sur le marché du caoutchouc naturel. Sur le marché à terme de Shanghai, il  a perdu 22% en 2015, le prix à l'export en Thaïlande, premier producteur mondial chutant de 23%.

Le blé sur le marché à terme de Chicago (CBOT) a perdu de 20,3% suite à des stocks mondiaux pléthoriques et un dollar en hausse. Pour la troisième année consécutive, le prix du maïs a glissé 9,6% et les graines de soja 14,5%.

En revanche, le prix du maïs blanc sud-africain  a plus que doublé en 2015, faisant un bond de 114%, tandis que le maïs jaune, destiné essentiellement à l'embouche, gagnait 70% sur l'année, suite à l'importante sécheresse.

 

Métaux et minerais

Les cours du pétrole et du gaz naturel ont perdu un tiers de leur valeur face à une offre surabondante liée à la guerre de marché que se livrent le Proche-Orient et les Etats-Unis, alors que la demande est atone.

Pénalisé par le renchérissement du dollar et la crainte de voir la remontée des taux aux Etats-Unis peser sur la demande, l'or aura perdu  10% de sa valeur en 2015, touchant en décembre son plus faible prix en 6 ans ; il s'agit de sa troisième baisse annuelle consécutive. L'argent a perdu 12%, le platine 26% et le palladium 30%, pénalisés par les craintes d'une baisse de la demande dans les industries qui les emploient.

Le cours du minerai de fer a enregistré en 2015 une troisième année consécutive de pertes, en chute de 40% sur l'année. Le cours du charbon a perdu près d'un tiers de sa valeur cette année, l'Agence internationale de l'énergie (AIE) et Goldman Sachs estimant que la demande mondiale a atteint son point culminant. Les cours du minerai de fer et du charbon se sont effondrés de plus de 80% depuis leurs pics, atteints respectivement en 2011 et 2008.

Cette contraction des prix a pesé sur les géants miniers et du négoce comme BHP Billiton, Rio Tinto, Anglo American, Glencore, Noble Group qui ont du procéder à des réductions d'effectifs et des cessions d'actifs.

Ceci dit, certains sont optimistes. "Tout le monde s'attend à ce que les prix des métaux (rebondissent après avoir) touché leur point bas", déclare Helen Lau, analyste chez Argonaut Securities à Hong Kong. "En ce qui concerne la demande, il y a des signes de reprise: l'économie américaine se redresse et la Chine prend des mesures pour stabiliser son économie. Du côté de l'offre, nous observons enfin une réaction des producteurs, qui sont résolus à soutenir les prix", explique-t-elle.

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