Le fléau des incendies de marchés frappe encore l’Afrique de l’Ouest. A quand une politique ?

 Le fléau des incendies de marchés frappe encore l’Afrique de l’Ouest. A quand une politique ?
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La liste est longue mais le violent incendie qui a ravagé au Sénégal le marché de Pak Lambaye dans la nuit de samedi à dimanche invite à la dresser tant ces sinistres sont récurrents sans apparemement que des politiques soient élaborées, a fortiori mises en oeuvre.

Pak Lambaye, qui a donc flambé ce week-end, avait déjà été le théâtre d’un incendie en janvier dernier. Début septembre, c’était le Dome Market à Accra au Ghana ; fin août,  l’Adeniji Adele Market à Lagos où déjà en novembre 2019 le marché populaire de Balogun était dévasté ; en avril, le marché à bétail de Faladié à Bamako ; en mars, le marché Tagabati à Niamey ; en février, le marché Nioko à Ouagadougou  ; en janvier, une partie du grand marché de Bouaké en Côte d’Ivoire -qui avait déjà connu les flammes fin août 2019 et avait totalement brûlé en 1998- ainsi que le marché de Balogun dans le centre-ville de Lagos où un incendie s’était déjà déclaré début novembre 2019.

En 2019, il y a eu le marché de la Riviera-Palmeraie à Cocody à Abidjan, les marchés d’Agbadahonou à Lomé, de Madina à Conakry, de Lomé et de Kara au Togo, et ainsi de suite…

Des causes avouables et moins avouables

Bien souvent en Afrique de l’Ouest comme ailleurs en Afrique, ce sont des marchés informels, où on trouve tous types de magasins et des marchés alimentaires. Des marchés qui, comme le souligne RFI, sont généralement un assemblage anarchique et vétuste de cantines et de câbles électriques.

Fort heureusement, la plupart des incendies font peu de victimes mais de très importants dégâts matériels et des pertes financières énormes pour des commerçants souvent du secteur informel, évidement sans assurances. Ces commerçants sont impliqués dans le commerce alimentaire ou non mais même des marchés de l’artisanat, de tissus et autres produits sont, comme partout à travers la planète, des lieux très actifs, très dynamiques d’une ville avec aux alentours nombre de restaurants, cafés, échoppes, etc. qui sont autant de débouchés pour les produits agricoles et alimentaires locaux.

Les causes de ces incendies sont à chercher, la plupart du temps, dans la vétusté de certaines infrastructures. Mais dans une interview déjà ancienne, de 2018, de Félix Mbété, sociologue tchadien, réalisée par notre confrère allemand Deutsche Welle (DW), il indiquait que certains incendies volontaires sont parfois commandités par des acteurs politiques, pour des raisons qui leur sont propres. “Ces manquements graves causent des pertes en milliards et parfois en vies humaines. Généralement, c’est l’esprit d’anarchie. Mais il y a une deuxième raison. C’est qu’il y a aussi l’esprit de vandalisme. Il y a certains court-circuit ou certains incendies qui sont volontaires. Qui sont des actes criminels et sont liés à ceux qui veulent tirer les ficelles. Certains responsables qui veulent gagner un autre marché ou indiquer un autre. Et souvent, ce sont des gens bien placés, des intouchables proches du pouvoir ou qui ont des relations qui commettent ces crimes.”

 

Ces incendies, une manne ?

 

Certains ne manquent pas de souligner aussi que ces incendies sont autant de nouveaux projets sur lesquels les Etats sollicitent les bailleurs de fonds.

 

Si on prend l’exemple du grand marché de Bouaké en Côte d’Ivoire, c’est FCFA 30 milliards (€ 45,6 millions) que la France met dans la reconstruction d’un nouveau marché d’une superficie de 9 ha pouvant accueillir 10 000 commerçants. Rappelons que ce marché dans la deuxième ville ivoirienne a connu les flammes en janvier 2020, en août 2019 et avait totalement brûlé en 1998, sans être reconstruit ; les commerçants se sont réinstallés dans des échoppes de fortune.

 

Dans son rapport de 2015 “L’AFD & et les équipements urbains marchands 30 ans de projets de réhabilitation de marchés en Afrique“, l’Agence française de développement dressait le bilan de 25 expériences de projets menés dans 13 pays, principalement en Afrique subsaharienne. “Pour les 25 projets effectivement mis en œuvre, le montant total des financements AFD s’élève à 114 millions d’euros, avec une moyenne de 4,29 millions d’euros par projet. La durée moyenne des projets est de 5,7 années avec un minimum de 2 ans et un maximum de 10 ans pour la réalisation“, lit-on dans le rapport, apparemment le dernier d’envergure sur cette thématique.

 

Quoi qu’il en soit, la nécessité de construire des marchés modernes et pour les commerçants de souscrire des assurances semblent un dossier majeur, tout autant qu’une vaste politique de sensibilisation à un plus grand civisme des occupants des marchés, concluait DW.

 

L’AFD & et les équipements urbains marchands

30 ans de projets de réhabilitation de marchés en Afrique

 

 

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