La facture d’importations alimentaires au Ghana excède les $ 2 Mds de recettes du cacao

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Faire de l’agriculture le moteur de la croissance et de la création d’emploi au Ghana”*. Tel est le titre du rapport de la Banque mondiale consacré à ce pays et publié hier.

Car la croissance est bel et bien de retour. A septembre 2017, le pays a enregistré son cinquième trimestre consécutif de croissance économique, atteignant 9,3% contre 4,3% au troisième trimestre 2016. Sur l’ensemble de 2017, elle serait de 6,1% contre 3,7% en 2016. Le taux d’inflation a été ramené quasiment à 10%.

Quant à l’agriculture, sa croissance sur ce troisième trimestre 2017 a atteint 10% contre 2,8% sur la même période en 2016 et 3,4% sur le deuxième trimestre 2017. Un bon signe mais la Banque mondiale s’inquiète de son insuffisance et surtout des signes persistants de “Dutch disease” que manifeste le Ghana depuis 2011, date à laquelle le Ghana a commencé à produire du pétrole dans des volumes commercialisables. Un “syndrome” qui lie l’exploitation d’une ressource naturelle au déclin d’autres secteurs de l’économie, que ce soit l’industrie ou l’agriculture. La preuve en est, selon les auteurs, la croissance du secteur agricole est  tombée à 0,8% en 2011, sa plus faible progression en deux décennies.

Pourtant, le Ghana ne doit pas se tromper de priorités. Les deux-tiers du secteur manufacturier, hors pétrole, dépendent de l’agriculture pour ses matières premières et l’agro-business représente la plus grande part des activités économiques du pays et des moyens de subsistance des petits fermiers. Le cacao fournit 25% des entrées en devises et le Ghana représente 20% de l’approvisionnement mondial en fèves.

En outre, le retour est bon. Pour $ 1 million investi dans l’agriculture, 750 emplois seraient créés ce qui serait beaucoup par rapport à d’autres secteurs. Selon le recensement de 2015, sur les 9,3 millions de personnes étant employés dans le secteur formel, 3,3 millions soit 36% l’étaient dans l’agriculture. Ceci dit, plus de 80% des Ghanéens travaillent dans le secteur informel.

Le désamour entre pouvoirs publics et agriculture

Pourtant, visiblement, c’est le désamour entre les pouvoirs publics et l’agriculture. De 2001 à 2014, le secteur agricole n’a capté que 5,2% des dépenses du gouvernement ce qui est bien en-deçà des 10% pour lesquels les gouvernements africains s’étaient engagés dans la Déclaration de Maputo en 2003, un engagement repris dans le cadre de la Cedeao. En 2014, la part de l’agriculture dans les dépenses gouvernementales était même tombée à 1,2%. En outre, la part de financement que le gouvernement alloue à la seule filière cacao est en moyenne trois fois supérieure à ce qui va au reste de l’agriculture. Si on retire le cacao, le financement public à l’agriculture chute de moitié, de 5,2% en moyenne à 2,6% sur la période 2006 à 2011.

Parallèlement, quasiment les deux-tiers des dépenses du ministère de l’Agriculture vont aux paiements de salaires et autres dépenses de fonctionnement, laissant une part infime aux investissements agricoles. Et si les contributions des bailleurs à l’agriculture via le ministère sont passées de 98,5 millions de cedis en 2013 à 160,1 millions en 2014, les dépenses sur fonds publics nationaux ont baissé, passant de 108,2 millions à 73 millions. En d’autres termes, le financement des bailleurs est passé de 17% du budget du ministère de l’Agriculture en 2006 à plus de 50% en 2014.

Cerise sur le gâteau, la facture d’importation de denrées alimentaires au Ghana excède les quelque $ 2 milliards que le cacao est estimé rapporter en devises. Si la nourriture représentait 13% de toutes les importations du Ghana en 2000, cette part atteignait 17% en 2016.

Le rapport est accesible sur le site de la Banque mondiale

 

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