Le rendez-vous Matières du jeudi
Les investisseurs misent à fond sur les matières
(08/02/08)
Dans un même grand élan, l’ensemble des matières premières sont fortement reparties à la hausse cette semaine, cessant d’hésiter, semble-t-il, entre la crainte des répercussions d’une récession américaine qui pèserait sur la demande et le fait objectif que de nombreuses matières manquent en volume. La demande notamment asiatique demeure et demeurera, sans nul doute, très forte ces prochaines années. Les coupures d’électricités en Afrique du Sud ont entrainé dans une spirale haussière le platine et l’or, tandis que l’hiver très rigoureux dans certaines régions de Chine ont fait flamber le cuivre. La situation au Nigeria a contribué à la fièvre sur le pétrole.
Les céréales et le platine sont allés de records en records toute la semaine. Les fonds d’investissement se sont massivement portés sur ces marchés des commodities, que ce soit le café, le sucre, le cacao, le caoutchouc, certains allant jusqu’à dire que si la récession s’installait pour de bon aux Etats-Unis, les matières premières seraient le nouveau terrain de prédilection des investisseurs, détrônant les marchés des actions et obligations, estime Barclays Capital ! Sauf, bien sur, si le dollar se raffermissait durablement, ce qui renchérit le prix de toutes ces matières. Et il faut remonter à 2006 pour voir une aussi forte hausse du dollar que celui enregistrée cette semaine. Quid de l’avenir… ?
Selon les prix recensés par CommodAfrica, de Côte d’Ivoire le cacao a gagné € 55 en une semaine et le café grade 1 € 60 comme celui de RD Congo. Le grade 2 du Togo est même allé jusqu’à 85 euros de hausse en une semaine. Le cacao ghanéen a pris, quant à lui, £ 50. La tonne de tourteaux de coton a augmenté de 45 euros la tonne et les graines de sésame Whitish d’Ethiopie de 30 euros.
Bananes. A nouveau, hier, 8 février, l’Organisation mondiale du commerce (OMC) donnait raison aux Etats-Unis sur le dossier banane, condamnant le nouveau régime d’importation préférentiel mis en œuvre le 1er janvier par Bruxelles à l’égard des ACP. Rappelons que l’Equateur avait déjà obtenu gain de cause à Genève lorsqu’il avait attaqué Bruxelles sur le même dossier.
Une décision qui irrite considérablement l’UE car elle estime que Washington, n’étant pas producteur ou exportateur de bananes, ne peut se prévaloir d’aucun intérêt ou préjudice en la matière. Pour l’Europe, si cette décision de l’OMC est entérinée, elle créerait une jurisprudence fâcheuse. Ce n’est pas, estime l’Europe, parce que des multinationales américaines sont impliquées dans l’exportation de bananes latino-américaines que cela donne un droit aux Etats-Unis de porter plainte devant l’OMC.
Une vieille bataille, sans aucun doute la plus longue de l’histoire de l’OMC.
Bois. C’est le calme. Les exportateurs d’Afrique de l’Ouest n’ont pas relevé leurs prix (déjà élevés), selon le Tropical Timber Market, et ce d’autant plus que la Chine continue à être très sélective dans ses achats d’essences. La demande indienne pour du belli demeure ferme mais à des prix négociés légèrement en baisse. Il semblerait que la demande commence à reprendre pour l’essence okan et son prix pourrait se redresser après être resté très bas. Le sipo et le sapelli demeurent fermes.
A noter que la crise aux Etats-Unis qui affectent bien entendu la construction de maisons devrait, selon les analystes, davantage affecter les marchés asiatiques et latino-américains de bois que l’Afrique de l’Ouest.
A noter qu’au Ghana, le gouvernement a révisé la répartition des revenus découlant de l’exploitation des forêts. Dorénavant, les autorités traditionnelles recevront 60% et non 40% des revenus découlant de l’exploitation hors réserves. Les propriétaires recevront 50% des recettes provenant de l’exploitation de forêts dans les réserves et la Commission forestière l’autre moitié, contre un ratio de 40/60 auparavant. L’objectif, selon le ministre adjoint aux Terres, Forêts et Mines, Adjei Yeboah, est d’inciter les communautés à prendre un plus grand intérêt dan la gestion des forêts, a-t-il déclaré lors du premier National Forest Forum qui s’est tenu à Accra fin novembre.
Cacao. Comme toutes les autres matières, le cacao a fortement augmenté ces derniers jours. Et les fondamentaux le justifieraient pleinement, souligne un opérateur. Durant la campagne 2006/07, le déficit a atteint 320 000 t. Cette campagne, il devrait être de 50 000 à 120 000 t et il est fort probable qu’en 2008/09, il y en ait encore un autre que certains estiment déjà de l’ordre de 150 000 t. « On rentre dans un cycle de déficit structurel », estime-t-on. Un cycle qui pourrait être de 7 ans.
Les raisons ? Les maladies qui affectent les cacaoyers, le manque d’hectares disponibles pour la culture du cacao notamment en raison de la concurrence qu’exercent d’autres produits comme le caoutchouc ou le palmier à huile dans les grandes zones de production d’Afrique de l’Ouest, sans oublier l’âge du verger : les arbres ont en moyenne 30 à 40 ans. Et même si on en plantait rapidement et en nombre, il faut attendre 5 à 6 ans avant qu’ils ne donnent.
Pour l’heure, la Côte d’Ivoire ne peut pas donner plus, ni l’Indonésie. Seul le Ghana pourrait dégager 20 000 à 30 000 t supplémentaires. Une goutte d’eau, ou presque, face à une consommation mondiale qui actuellement croît de 70 000 à 75 000 t chaque année !
Céréales. Le blé n’a pas cessé de flamber cette semaine sur les marchés du monde entier. Pendant 5 jours consécutifs, son prix a grimpé au-delà des limites autorisées sur l’ensemble des trois marchés de cotation aux Etats-Unis. La raison ? Un squeeze mais aussi le rapport de février de l’USDA qui fait état d’une baise des stocks américains sur la campagne 2007/08, à 272 millions de boisseaux contre son estimation de 292 millions faite en janvier.
En Europe, la position mars a augmenté de 11,25 euros, pour atteindre 280,50 euros la tonne. De quoi faire frémir l’Afrique du Nord, très forte importatrice, l’Egypte en tête.
Le blé a entraîné dans son sillage le maïs dont le prix a grimpé de 2%. Venant soutenir cette tendance, un autre rapport de l’USDA qui a révisé à la baisse d’un million de tonnes ses estimations de récolte d’Argentine.
Coton. Et le coton aussi est allé de sa poussée de fièvre cette semaine. A New York, il a terminé la semaine a son plus haut en trois semaines, frôlant les 70 cents la livre. Une hausse qui s’explique par l’envolée sur l’ensemble des matières premières, les investisseurs ne s’intéressant qu’à peine à la publication d’un rapport de l’USDA qui aurait pourtant du avoir un effet baissier. En effet, le département américain de l’agriculture voit les stocks mondiaux de coton à 57,33 millions de balles (480 lb) contre 54,75 estimés il y a un mois. La consommation mondiale serait moindre, de l’ordre de 126,32 millions de balles contre 128,02 estimé précédemment. Mais, peu importe… Les investisseurs ont décidé que les matières premières, dont le coton, étaient porteurs !
Riz. Le prix du riz ne cesse aussi de grimper et janvier a confrmé la tendance, souligne le spécialiste d’Osiriz, Patricio Mendez del Villar. Les fortes demandes émanant des Philippines et de l’Indonésie fin janvier ont encore plus soutenus le mouvement. Ainsi, (cliquer sur « Cours »en haut de cette page), on constate qu’entre le 10 janver et maintenant, le prix du Thaï 100B et du Thaï 5 ont pris $ 40 la tonne FOB, le Thaï 25 $ 45, le Viet 25 $ 35 et le Pkaistan 25 $ 25. Le A1 Super, pour sa part, a grimpé de $ 60 ! Seuls l’Inde 5 et 25 sotn demeurés stables.
« En 2008, l’offre d’exportation devrait rester tendue, ce qui ne manquera pas de peser, une fois encore, sur les prix mondiaux », estime M. Mendez del Villar. En janvier, poursuit-il, l’indice OSIRIZ/InfoArroz (IPO) a progressé, comme le mois précédent, de 9,1 points à 172,8 points (base 100 = janvier 2000) contre 163,7 points en décembre. Sur les douze deniers mois (janvier 2007-janvier 2008) l’indice a progressé de 37,3 points.
La production africaine, quant à elle, devrait progresser mais les importations ne cesseront pas pour autant de croître suivant ainsi al progression de la demande. En Afrique de l’Ouest, note Osiriz, l’accord sur la réduction des taxes à l’importation de riz pourrait relancer les importations. Celles-ci représentent déjà 40% des besoins du continent africain et 30% des importations mondiales.