La Chronique Matières du Jeudi
Les Européens manquent de moyens pour se réconforter
(11/10/2012)
Cacao. La bonne demande mondiale des chocolatiers pour du beurre de cacao maintient le prix de ce dernier à des niveaux de prix les plus élevés depuis début 2011. Rappelons que le prix du beurre est calculé en fonction d’un ratio par rapport à la fève cotée à Londres. Actuellement, ce ratio est au-dessus de 1,40, atteignant hier 1,45 à 1,47 pour livraison sur le rapproché et touche 1,63 pour livraison sur janvier-mars. Ce ratio, reflet de la demande, a augmenté de plus de 40% depuis le mois de janvier.
En effet, on manque de beurre de cacao alors que Noël et le jour de la Valentin, deux temps forts de l’année dans la chocolaterie en Europe et en Amérique du Nord, approchent.
Que s’est-il passé puisqu’il y a peu de temps encore, on regorgeait de beurre de caco, ce produit substituable avec d’autres matières grasses végétales, contrairement à la poudre de cacao ? La chute de 17,8% des broyages de fèves en Europe au second trimestre, sa plus forte chute de son histoire par rapport à la même période l’année dernière selon les chiffres publiés par l’Association européenne du cacao, due à une baisse de consommation, en est la principale raison. Les chiffres du troisième trimestre devraient être publiés mardi prochain et on s’attend à un nouveau recul : certains avancent une baisse aussi importante que 15 à 20%. Aussi, les chocolatiers européens et nord américains se tournent vers les broyeurs asiatiques ce qui fait grimper le prix du beurre.
En effet, selon l’analyste Mintel, le marché allemand de la confiserie, le plus important d’Europe, ne devrait être que de $7,24 milliards en 2012, soit une chute de quelque 9% en un an. Cette baisse de la consommation et la faiblesse des marges dégagées du processus de transformation, étant donné que la conjoncture économique européenne actuelle impose de tirer au maximum les prix à la consommation, ont conduit certains industriels à revendre le mois dernier des fèves qu’ils détenaient, réduisant ainsi leurs capacités à broyer. Ils doivent donc se tourner vers les broyeurs asiatiques pour acheter du beurre afin de se préparer aux fêtes de fin d’année. Ce qui fait grimper le prix du beurre.
Ceci dit, Barry Callebaut, premier fabricant mondial de chocolat, a souligné que durant les 9 premiers mois de son exercice fiscal 2011/12, la hausse à deux chiffres de ses ventes dans les Amériques, en Asie et en Europe de l’Est ont compensé la faiblesse de la consommation en Europe du Sud, notamment sur des marchés majeurs comme l’Italie et l’Espagne. Et sans réelle perspective d’un redressement à court ou moyen terme. En effet, rappelons que la demande en cacao suit étroitement l’évolution du PIB : nombre d’Européens ne peuvent plus se payer le luxe d’acheter du chocolat pour se remonter le moral !
Selon Mintel et malgré la crise européenne qui devrait conduire à une chute de 5% de la valeur de ses ventes de chocolat, la valeur générée cette année sur le marché mondial du chocolat ne devrait guère varier par rapport à 2011, à $ 84,5 millions. Pour sa part, l’Organisation internationale du cacao (ICCO) prévoit des broyages mondiaux sur 2011/12 (octobre/septembre) à 3,94 millions de tonnes, légèrement en hausse par rapport aux 3,93 Mt de 2010/11.
En réalité, tout ceci permettra de rééquilibrer un peu les stocks de beurre et poudre de cacao à des niveaux plus gérables que ces dernières années, souligne un trader (vois nos précédentes chroniques).
Café. Les cours de l’Arabica ont chuté hier à leur plus faible niveau depuis le 7 septembre suite à une bonne floraison, en temps et en heure, des caféiers au Brésil. On s’attend à une très importante récolte chez le numéro un mondial mais aussi en Amérique centrale. En outre, le spread, le différentiel entre décembre et mars a fortement augmenté sur le marché à terme de New York qui cote les Arabica : il s’élevait à 4,4 cents hier à la clôture, son niveau le plus élevé en 11 mois.
En revanche, les Robusta sur novembre ont terminé en hausse de $ 32 sur le marché de Londres, à $ 2 098 la tonne. Chez le premier producteur de Robusta, le Vietnam, les prix ont baissé en début de semaine, soit deux semaines avant le début de la récolte principale qui devrait booster les approvisionnements dès le début du mois de novembre. Mais, pour l’instant, la demande demeure timide car les acheteurs jaugent encore les niveaux de production et surtout attendent que les prix redescendent avec l’arrivée de la récolte.
Caoutchouc. Les cours du caoutchouc ont glissé hier sur le marché à terme de Tokyo, le Tocom, suivant en cela la tendance du cours du pétrole et donc de son grand concurrent le caoutchouc synthétique, sans oublier la morosité ambiante.
Coton. Sur le marché à terme de New York, le coton a terminé très légèrement en hausse hier soir, les investisseurs adoptant plutôt une position d’attente car les Etats-Unis devraient publier aujourd’hui leurs estimations mensuelles de récolte. La livre de fibre s’est établie à 72,10 cents, mais les volumes échangés étaient en chute de 40% par rapport à leur moyenne sur les derniers 250 jours, selon les chiffres de Reuters.
Rappelons que traditionnellement, les cours internationaux de coton fléchissent lorsqu’arrive le mois de décembre lorsque les producteurs majeurs que sont les Etats-Unis, l’Inde et la Chine commencent à ensemencer pour la prochaine récolte.
Sur les 12 derniers mois, les cours du coton ont chuté de près de 20% car l’offre est trop abondante, avec des stocks mondiaux estimés à plus de 76 millions de balles pour la campagne actuelle qui s’achèvera fin juillet 2013, surtout en cette période de crise et de ralentissement économique mondial. Notons que la Chine, premier producteur et consommateur mondial, devrait récolter 6,9 millions de tonnes, en baisse de 4,2% en raison d’une superficie moindre consacrée à la cotonculture.
Riz. Cette semaine encore, les analystes sur le marché international du riz soulignent combien la politique interventionniste de la Thaïlande perturbe le marché, notamment en attirant du riz frauduleux et bon marché, notamment du Cambodge et de Myanmar, dans les stocks gouvernementaux thaïlandais en raison du prix élevé auquel il est acheté. Les rumeurs de marché font état de 500 000 t de riz paddy vietnamien qui auraient également trouvé le chemin des entrepôts thaïlandais via le Cambodge. L’affaire est intéressante puisque le gouvernement thaïlandais achète à $ 490 la tonne de paddy alors que le paddy vietnamien rendu en Thaïlande via le Cambodge est à $ 440 et, mieux encore, le riz cambodgien est à $ 330. Ceci laisse aux trafiquants une belle marge, notent les analystes. Face à cela, le gouvernement thaïlandais a relevé son niveau de contrôles et la semaine dernière a d’ailleurs saisi 180 t entrées frauduleusement.
Ceci dit, le volume de transactions est demeuré faible cette semaine au plan mondial et les cours internationaux ont baissé, d’autant plus que la Thaïlande commence à récolter. Le prix du Thaï 100%B est tombé de $ 600 la semaine dernière à $ 565 la tonne ces derniers jours, mais les brisures 25% du Vietnam sont demeurés quasiment inchangées à $ 410-420 contre $ 420 la semaine dernière.
Sucre. Les cours du sucre roux à New York ont baissé hier sur fond de bonne récolte brésilienne. Après l’incapacité de franchir le seuil de résistance des 21,77 cents la tonne mardi, les producteurs ont vendu. En effet, mardi, FO Licht a annoncé ses prévisions de production 2012/13 qu’il estime aussi élevée que le record atteint en 2011/12, à 177,1 Mt. Ceci a plombé le marché qui, pourtant, aurait pu s’inscrire en hausse car les pluies au Brésil ont ralenti le rythme des broyages de canne. Ainsi, dans la région Centre-Sud du Brésil, les raffineries n’ont produit que 2,2 Mt de sucre dans la deuxième moitié du mois de septembre, soit 22% de moins qu’un an auparavant, rapporte l’association industrielle Unica.
Thé. Le prix moyen des ventes aux enchères de Mombassa au Kenya a baissé cette semaine pour la première fois en un mois, à $ 4,17 le kilo contre $ 4,20 la semaine dernière. Les Best Broken Pekoe Ones se sont vendus à $4-$4,34 le kilo contre $ 4,30-4,10 la semaine dernière. Les Best Pekoe Fanning Ones ont trouvé vendeurs à $ 3,78-4,18 contre $ 4,02-3,78.
Au total, 113 923 paquets ont été offerts à la vente mais 20,1% n’ont pas trouvé preneur contre 112 725 paquets offerts la semaine dernière et 21,1% restant non vendus. Des acheteurs d’Afghanistan ont été très actifs, avec un intérêt moins prononcé de la part du Pakistan, de l’Iran et du Soudan. La demande égyptienne, premier client du Kenya, s’est réactivée.