14 avril 2011 - 00:00 |

La Chronique Matières du Jeudi

Des prix du poivre historiquement hauts

(14/04/2011)

Encore une semaine mouvementée sur le marché des matières premières avec une chute des cours assez généralisée en début de semaine, suivie d’une reprise.

Cacao. Contrairement à toute attente, le marché du cacao s’est inscrit à la hausse alors qu’on pouvait s’attendre à une baisse avec le dénouement de la situation politique ivoirienne lié à la chute de l’ex-président Laurent Gbagbo. Toutefois, le marché manque de cacao et cette réalité industrielle soutient les cours. Car, même si la plupart des observateurs est convaincue que le gouvernement d’Alassane Ouattara veut effectivement aller vite pour rétablir la situation notamment sur la scène cacaoyère, il faudra tout de même quasiment deux mois avant que le cacao ivoirien n’arrive à nouveau sur les sites industriels européens : « Il faut un mois pour charger et trois semaines environ pour arriver en Europe », souligne un trader. Mercredi le porte-parole du président Alassane Ouattara, Patrick Achi , annonçait la réouverture cette semaine des deux principaux ports de Côte d’Ivoire. ”Les activités portuaires vont reprendre cette semaine et nous nous attendons à ce que les premiers bateaux arrivent la semaine prochaine”, a-t-il déclaré à Reuters. Mercredi, Alassane Ouattara avait annoncé que tout était en place pour la reprise immédiate des exportations de cacao. Les ports, notamment de San Pedro, n’auraient pas été endommagés, le système électronique devrait être rapidement remis en place et le gouvernement pourrait accepter que des chèques soient établis même s’ils ne seront compensés qu’ultérieurement.
En gros, en Côte d’Ivoire, 400 000 t de fèves sont encore bloquées. C’est du cacao qui n’est pas « nouveau » : il est déjà prévendu et son acheminement ne fera que concrétiser les contrats déjà signés. Mais il redonnera de la disponibilité physique aux industriels et aura un effet psychologique sur le marché.
Globalement, il manquerait encore 200 000t pour satisfaire la demande. On peut donc s’attendre à une hausse supplémentaire des prix. Le marché a baissé de £ 554 ces dernières semaines et depuis lundi, il a repris quelque £ 100 la tonne, à £ 1960. Il peut encore remonter jusqu’à £ 2010, seuil auquel le Ghana se portera à la vente.
Côté consommation, les volumes de broyages européens ont enregistré une hausse de 3,5% au premier trimestre par rapport à la même période en 2010, à 353 103 tonnes (t). En Allemagne, ils ont littéralement fait un bond de 22,7%, à 108 816 t, selon l’association des confiseurs BDSI. Toutefois, il ne faut tirer des conclusions hâtives à partir de ces chiffres. La crise en Côte d’Ivoire et donc sa baisse d’activité de broyages ont provoqué une hausse de celle en Europe, d’où cette progression de 3,5% qui se site dans la partie haute des estimations qu’avaient faites les analystes. Quant à l’Allemagne, le calcul statistique a été modifié car un plus grand nombre d’entreprises publient leurs chiffres par rapport à l’année dernière ; d’où cette hausse très importante.

Café. « Une semaine semblable aux autres, des hauts et des bas sur les marchés, sans raisons apparentes », souligne un trader. « La fatalité s’installe chez les acteurs du négoce : on fait au mieux comme on peut, avec une baisse dans la qualité des cafés recherchés et peu ou pas de prises de risques. Les prix indiqués restent indicatifs, une qualité de café peut se traiter à des prix très différents dans la même journée, selon le lieu la quantité, ou l’habileté à négocier. »
Dans les pays producteurs, notons le bond de 53% des exportations d’Arabica de Colombie au mois de mars, atteignant 884 000 sacs de 60 kilos. Ce même mois, sa production a enregistré une hausse de 24% à 779 000 sacs ; les autorités s’attendent à une récolte de 9 à 10 Ms, soit son niveau le plus élevé depuis 2008.

Caoutchouc. La nervosité sur le marché à terme du caoutchouc naturel est à fleur de peau : mi-mars, l’échéance septembre 2011était tombée au plus bas en quatre mois avant de se ressaisir et regagner 40% depuis lors. Mais cette semaine, en seulement deux jours, il a encore perdu 7%.
En effet, les fondamentaux sont souvent contradictoires. D’un côté l’offre est étroite, ce qui explique la hausse des prix ces derniers mois, mais le désastre japonais et les tensions au Proche Orient jettent un doute sur le niveau de demande et plus globalement les perspectives économiques mondiales.
Rappelons qu’en mars, alors que le caoutchouc avait plongé d’un tiers de sa valeur, les trois pays majeurs sur cette filière (70% de la production mondiale), la Thaïlande, l’Indonésie et la Malaisie avaient menacé d’intervenir afin de redynamiser les cours. Bref, la spéculation va bon train sur ce marché et le directeur du Thai Rubber Latex, Vorathep Wongsasuthikul, dit tout haut ce que nombre d’opérateurs pensent tout bas : une intervention sur les marchés est la seule option maintenant pour stabiliser les prix. Mais d’autres continuent à penser que le marché parviendra à se réguler lui-même, notamment à la suite des inondations récentes qui ont sévit en Thaïlande et de la perspective d’une hausse de 5% de la demande mondiale.

Céréales. Au Sahel, les prix se sont inscrits à la hausse ces dernières semaines, selon le dernier rapport mensuel d’Afrique Verte. Au Niger, les prix notamment pour les céréales locales comme le mil et le sorgho ont augmenté. Les hausses les plus importantes ont été observées à Niamey (+29% pour le mil, +25% pour le maïs), à Dosso (+25% pour le sorgho), à Tillabéri (+21% pour le sorgho), à Zinder (+12% pour le mil, +8% pour le sorgho) et à Maradi (+17% pour le sorgho et +10% pour le mil). Dans les régions de Maradi et de Zinder, ces hausses seraient dues à la pression exercée sur les marchés par les acteurs céréaliers à cause des opérations d’achats de mil par l’Etat via l’OPVN, note Afrique Verte.
Au Mali, les tendances varient en fonction des marchés mais globalement le prix du riz importé est à la hausse. Si les achats institutionnels rythmaient les fluctuations sur le marché, les crises sociopolitiques actuelles avec la hausse sur les coûts de transport et d’autres produits commencent à avoir des incidences perceptibles.
Au Burkina, les prix sont plutôt stables avec même des baisses sur les marchés les mieux approvisionnés.

Coton. L’Australie s’attend à une récolte record de coton l’année prochaine, sans doute proche de celle de cette année estimée à 4 millions de balles. Les cours internationaux élevés ont stimulé les cotonculteurs et le niveau des réserves en eau est bon. Rappelons que l’Australie expédie quasiment la totalité de sa récolte vers la chine, l’Inde, la Thaïlande et le Vietnam.

Poivre. Le marché flambe, sans que vraiment on n’arrive à se l’expliquer. Le premier producteur mondial de poivre noir, le Vietnam, a achevé sa récolte qui, selon l’Association du poivre du Vietnam, devrait atteindre 100 000 t en 2011, soit 5% de plus que l’année précédente, année de sécheresse. En outre, au premier trimestre 2011, son prix du poivre exporté a été en moyenne de $ 4 785 le tonne, soit 53,8% de plus que sur la même période en 2010, selon VietnamPlus du 1er avril dernier.
Pourtant, le pays ferait « un peu de rétention », explique un courtier car il sait qu’il tient le marché, la récolte brésilienne ne devant arriver qu’en juillet. Ce qui expliquerait les niveaux de prix actuels, des niveaux record, de mémoire de courtier. « Le disponible manque et donc les prix augmentent car la demande augmente structurellement », souligne un courtier.
Selon Do Ha Nam, président de l’Association du poivre du Vietnam, ce pays représente 60% du commerce mondial de ce produit. En 2010, le Vietnam a exporté près de 117 000 t de poivre pour un chiffre d’affaires de $ 421 millions, représentant une progression de plus de 20% sur 2009. Les trois premiers marchés du Vietnam sont les Etats-Unis, l’Allemagne et les Pays-Bas.

Sucre. La perspective de récoltes plus importantes que prévues en Thaïlande et au Pakistan a fait baisser les prix du sucre roux sur le marché de New York en cette fin de semaine, la récolte au Brésil s’annonçant déjà pléthorique. Selon certains analystes, la tendance baissière sur le sucre pourrait conduire le roux vers les 17-18 cents la livre, les plus optimistes le voyant plus proche des 21 à 22 cents.

Thé. Pour la quatrième semaine consécutive, les prix du thé aux ventes aux enchères de Mombassa ont augmenté. En moyenne, ils se sont élevés à $ 3,54 contre $ 3,50 la semaine précédente ; 15% des volumes sont demeurés invendus.
Selon des courtiers, les volumes vendus au premier trimestre ont baissé de 7%, à 87 900 t, notamment du fait de la crise en Egypte qui a réduit les achats de ce dernier qui a été le premier client du thé kényan l’année dernière. On a pu noter lors des dernières ventes aux enchères un regain d’intérêt de la part des opérateurs égyptiens mais le niveau d’activité antérieur n’est pas encore retrouvé.

Publicité

Votre publicité sur notre site

En savoir +