La Chronique Matières premières agricoles au 13 décembre 2018

 La Chronique Matières premières agricoles au 13 décembre 2018
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L’euro a terminé hier soir en baisse face au dollar, suite à la réunion de la Banque centrale européenne (BCE) qui a revu à la baisse ses prévisions économiques et adopté un ton plus prudent sur les risques auxquels est exposée la zone euro. Sans surprise, elle a laissé ses taux d’intérêt inchangés. Côté livre sterling, elle s’est inscrite hier en légère hausse face au dollar : au lendemain du rejet de la motion de défiance à l’égard de la  Première ministre Theresa May, les cambistes sont à l’affût de possibles aménagements de l’accord de sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne.

Quant aux marchés de  matières premières, l’analyste chez McKeany-Flavell, Daniel Aviles, se demande s’ils seront-ils une place plus sure l’année prochaine où s’ils vont baisser si la croissance mondiale ralentie. D’ores et déjà, la faiblesse des derniers indicateurs économiques en Chine et en Europe ravive les inquiétudes . En Chine, la croissance des ventes au détail de novembre a été la plus faible en 15 ans et la production industrielle a progressé à son rythme le plus faible en près de trois ans. En zone euro, le secteur privé termine l’année sur une note faible, la croissance de l’activité tombant à son plus bas niveau depuis plus de quatre ans, selon les premiers résultats des enquêtes mensuelles IHS Markit auprès des directeurs d’achats

CACAO

Le cacao a terminé hier soir en belle hausse, à £ 1 680 la tonne à Londres, en progression de 3,7% sur mercredi et contre £ 1631 vendredi dernier. La performance à New York a été encore plus forte, grimpant de 4,1% sur la veille, à $ 2 250 la tonne hier soir contre $ 2225 en fin de semaine dernière.

En Côte d’Ivoire, qui est dans sa saison sèche jusqu’à fin février, on s’inquiète de l’harmattan qui souffle actuellement dans le nord du pays, venant du Sahara et amenant avec lui du sable. Ceci dit, les volumes quittant les plantations sont toujours abondants mais on devrait commencer à enregistrer un ralentissement en début d’année. Au 9 décembre, et depuis le début de la campagne le 1er octobre, les arrivages aux ports ont totalisé 766 000 t, en hausse de 31% par rapport aux 584 000 t sur la même période l’année dernière, estiment les exportateurs. En Côte d’Ivoire où, côté opérateurs, les licence d’exportation ont été retirées à Green & Brown et Tropicao, après que les banques leur aient refusé leurs financements (lire nos informations).

Notons qu’au Nigeria, la récolte durant la campagne 2017/18, achevée fin septembre, ne serait en définitive que de 250 000 à 260 000 tonnes (t) (lire nos informations).

Sinon, la crainte d’un retour du phénomène météorologique El Niño se précise, les services météo nord-américains estimant qu’il y a 90% de “chance” qu’il se manifeste dans l’hémisphère nord avec un impact incertain sur l’Afrique de l’Ouest.

Côté entreprises, le géant suisse du chocolat Barry Callebaut a bouclé le rachat de Biscuit Company du britannique Burton. Ceci vient après avoir signé un contrat à long terme d’approvisionnement de 12 000 t de chocolat. Barry Callebaut poursuivra l’activité de la chocolaterie située à Moreton, près de Liverpool.

D’autre part, Cargill annonce ce matin son plan d’action “Protect Our Planet” afin d’éliminer la déforestation de sa chaîne d’approvisionnement en cacao. Il comprend un engagement visant à arrêter la conversion de forêts au Ghana et en Côte d’Ivoire pour la production de cacao. Il élargit en outre l’action de Cargill à cinq pays producteurs : Brésil, Indonésie, Cameroun, Côte d’Ivoire et Ghan,  ainsi qu’à la chaîne d’approvisionnement indirect en cacao, tout en assurant les futurs moyens de subsistance et la résilience des petits producteurs de cacao, souligne le communiqué. Objectif : adopter des mesures concrètes pour atteindre 100 % de traçabilité de ses fèves de cacao (lire nos informations)

 CAFÉ

Le café Robusta a perdu quelque $ 50 la tonne cette semaine, terminant hier sur le marché à terme de Londres à $ 1 504 , parti de $ 1 554 vendredi dernier ; il était alors à son plus bas depuis début octobre, ayant baissé durant sept semaines consécutives. L’Arabica a été mieux loti, faisant du surplace, à $ 1, 041 la livre (lb) hier soir, soit exactement au même prix qu’à la clôture en fin de semaine dernière. Il achevait alors sa cinquième semaine de baisse consécutive.

Un café qui a subi la glissade du real brésilien face au dollar, ce qui accroît les volumes de café sur les marchés mondiaux. En outre, l’industrie est plutôt bien couverte et ne cherche guère à acheter actuellement.

Sur les marchés asiatiques cette semaine, c’est l’hécatombe. La récolte bat maintenant son plein au Vietnam faisant dégringoler les prix intérieurs à leur plus faible prix en trois mois. Dans la province de Dak Lak, dans les Central Highlands, la plus importante région de production du pays, la récolte est achevée à 80% tandis que dans les autres régions, elle est plutôt à mi-parcours. Les agriculteurs ont vendu à 33 500 dongs ($ 1,44) le kilo, les prix les plus faibles depuis fin septembre ; la semaine dernière, ils avaient trouvé preneurs à 34 200-34 300 dongs. A ces niveaux, ils hésitent à vendre. Surtout, ils parlent de réduire leurs utilisations d’intrants, ce qui risque d’impacter la production à venir. Les traders ont proposé le Grade 2, 5% brisures et grains noirs, avec une décote de $ 80 à $ 85 la tonne sur l’échéance mars à Londres contre $ 40 à $ 65 la semaine dernière. L’écart est de taille.

Pourtant, le président de l’Association vietnamienne du café et du cacao, Luong Van Tu, confirme les prévisions de nombre de traders : la récolte 2018/19 sera inférieure à la précédente (lire nos précédentes chroniques) et plus faible que les estimations initiales, à 1,75 Mt contre 1,85 Mt évoqué précédemment. “Les cerises semblent grosses et juteuses mais nombre d’entre elles n’ont qu’une graine à l’intérieur au lieu de deux. Je pense que les conditions météorologiques un peu plus tôt dans la saison en sont la raison“, explique-t-il à Reuters.

Mais rappelons que le département américain de l’Agriculture (USDA) ne partage pas cet avis, ayant le mois dernier révisé à la hausse de 2% ses prévisions tant de production que d’exportation pour la récolte 2018/19 vietnamienne : la récolte est estimée à 30,4 millions de sacs de 60 kg, en équivalent grains verts, et les exports à 25,5 Ms.

Il n’y a quasiment pas de transactions en Indonésie car il n’y a plus de café disponible.

CAOUTCHOUC

Regain sur le marché du caoutchouc, après des semaines de marasmes. Les cours sur le Tokyo Commodity Exchange (Tocom) ont clôturé à 168,9 yens ($1,49) le kilo jeudi gagnant plus de 4 yens par rapport à vendredi dernier (164,4 yens). Même évolution  à Shanghai à 11365 yuans ($1655) la tonne contre 11 245 yuans vendredi dernier. Une reprise impulsée par des signes de relâchement des tensions commerciales sino-américaines mais aussi par les efforts de la Chine pour relancer son économie, et par ricochet l’économie mondiale. Dans un signe d’apaisement avec les Etats-Unis, les sociétés chinoises ont aussi réalisé leurs premiers achats significatifs de soja américain. Toutefois, les ventes d’automobiles en Chine ont chuté d’environ 14% en novembre par rapport à 2017, marquant ainsi la plus forte baisse de depuis près de sept ans sur le plus grand marché mondial automobile. Et les fondamentaux demeurent faibles.

En Thaïlande, la Rubber Authority of Thailand (RAT) annoncé que le géant chinois du e-commerce Alibaba Group installerait un système de vente aux enchères en ligne pour acheter du caoutchouc naturel en provenance de Thaïlande. Le projet contribuera à stabiliser les prix du caoutchouc thaïlandais et à augmenter les prix locaux du caoutchouc pour le bénéfice des producteurs thaïlandais, a estimé Nakorn Tangavirapat, gouverneur adjoint de la RAT ajoutant que  le projet générera des ventes annuelles d’au moins 200 000 tonnes. 

COTON

Globalement, les cours du coton ont légèrement baissé sur la semaine sous revue mais restent dans la fourchette de  prix  entre 77et 82 cents observée depuis 3 mois. Jeudi les cours ont clôturé à 79,41 cents la livre contre 80,23 cents vendredi dernier.

Le département américain a publié mardi son rapport mensuel sur les estimations de l’offre et de la demande agricole mondiale (WASDE) sans changements fondamentaux sur l’offre et la demande pour le coton. Selon le rapport, les prévisions mondiales pour 2018/19 par rapport au mois dernier incluent une production en baisse, une consommation en baisse, des échanges commerciaux en hausse et des stocks de clôture légèrement plus élevés. La consommation mondiale a diminué de 1,3 million de balles, principalement en raison de la baisse d’un million de balles en Chine mais la consommation est aussi plus faible au Pakistan, en Turquie et en Ouzbékistan. En revanche, plus surprenant pour le marché, a été  la révision à la hausse de la production américaine.

Rabobank estime que les prix du coton sont confrontés à deux facteurs de risque opposés. D’un côté, une récolte américaine confrontée à une saison difficile et qui pourrait être potentiellement inférieure à 18 millions de balles et donc réduire les stocks américains. De l’autre, le ralentissement de la croissance mondiale, associé à la faiblesse des devises des marchés émergents et aux tensions commerciales mondiales, conduit à une vision moins optimiste de la consommation mondiale de coton.  En terme de prix, la banque néerlandaise s’attend sur les trois prochains mois à un cours proche de 82 cents la livre qui  ensuite progresserait à 85 cents la livre mi 2019.

Au Cameroun, la Société de développement du coton (Sodecoton) table sur une production de 295 000 tonnes en 2018/19. La Banque arabe pour le développement économique en Afrique (BADEA) et la Banque islamique de développement (BID) ont conjointement octroyé un crédit de FCFA 79,2 milliards au Cameroun pour l’acquisition d’intrants en vue de doper la production de la filière cotonnière.

Au Mexique, le département américain de l’Agriculture (USDA) estime que la production de coton devrait atteindre un record à 1,89 million de balles en 2018/19 en progression de 21% par rapport à la précédente campagne grâce à la stratégie mise en place en faveur du coton (Sagarpa) sur 2017-2030 mais aussi aux prix attractifs du coton par rapport à d’autres spéculations comme le sorgho ou le maïs. En parallèle, la consommation  devrait progresser de 6% à 2,125 millions de balles avec le soutien apporté à l’industrie textile via le Forward  Contract Progam. Les importations, principalement en provenance des Etats-Unis, sont attendues à 900 000 balles, en baisse de 3%. Quant aux exportations, elles devraient atteindre un record depuis 35 ans, doublant à 700 000 balles, suite à la hausse de la production mais aussi à l’ouverture de nouveaux marchés,  principalement la Chine et le Vietnam.

HUILE DE PALME

Le complexe des oléagineux et le pétrole continuent de faire pression sur les cours de l’huile de palme dont les fondamentaux demeurent faibles. Les cours ont clôturé jeudi en hausse à 2046 ringgits ($489,71) la tonne contre 1998 ringgits la tonne vendredi dernier.

En Malaisie, les stocks d’huile de palme ont progressé de 10,5% en novembre pour atteindre 3 millions de tonnes (Mt) tandis que la production a reculé de 6,09% à 1,85 Mt et les exportations ont chuté de 12,9% à 1,375 Mt, selon les données publiées par le Malaysian Palm Oil Board (MOPB).

En Côte d’Ivoire, face à la faiblesse des prix, l’ Association interprofessionnelle de la filière palmier à huile (AIPH) a décidé d’enclencher son mécanisme de soutien aux producteurs d’huile de palme (Lire l’interview du président de l’AIPH, Jean-Louis Kodo). 

En Ouganda, le Fonds international de développement agricole (FIDA) a débloqué $78,8 millions et un don de $12 millions en faveur du Projet national sur l’huile de palme (NOPP), d’un coût global de $210,4 millions. Le NOPP vise à développer une industrie de l’huile de palme efficience qui réponde aux normes environnementales et sociales afin d’améliorer durablement le bien-être des populations. L’initiative entend aussi faciliter l’accès des petits producteurs aux intrants de qualité, au crédit et aux pratiques techniques en établissant des conventions de partenariat tripartite (secteur privé, secteur public et producteur). Le projet devrait toucher plus de 30 800 ménages vulnérables localisés dans quatre districts du pays dont Buvuma, Masaka et Mayuge.

Au Gabon, la production d’huile de palme est passée de 13 918 tonnes  à 26 074 tonnes sur les neuf premiers mois de l’année 2018, selon les données de la Direction générale de l’économie. Une hausse de 87% consécutive à la montée en puissance des usines de Kango et Mouila du singapourien Olam.

Côté entreprise, Wilmar International, suite à d’une vive campagne  internationale de Greenpeace, a publié un plan d’action détaillé pour cartographier et surveiller ses fournisseurs d’huile de palme d’ici fin 2019. Un plan, s’il est correctement mis en œuvre,   qui constituera une étape importante vers l’élimination de la déforestation dans la chaîne d’approvisionnement de Wilmar, qui concentre 40%  du commerce mondial de cette matière première, observe Greenpeace. « Wilmar fournit de l’huile de palme à la plupart des multinationales des secteurs alimentaire et cosmétique. Son plan pourrait être une véritable avancée. Si Wilmar s’y tient, d’ici fin 2019, il utilisera des satellites pour surveiller tous ses fournisseurs d’huile de palme, qui ne pourront plus cacher la déforestation dont ils sont responsables. Greenpeace veillera à ce que Wilmar respecte scrupuleusement son engagement et continuera à informer les consommatrices et consommateurs sur l’impact environnemental des produits de leurs supermarchés », a déclaré Cécile Leuba, chargée de campagne Forêts chez Greenpeace France.

RIZ

Les prix à l’exportation du riz ont chuté pour la quatrième semaine consécutive au Vietnam tandis qu’une demande modérée a pesé sur les marchés indien et thaïlandais.

Au Vietnam, les prix du Viet 5% sont tombés à $395 la tonne contre $400 la semaine dernière avec toujours en toile de fonds la décision de la Chine d’imposer des conditions plus strictes aux expéditions en provenance du Vietnam. Sur les 10 premiers mois de l’année, les exportations vietnamiennes vers Pékin ont chuté de 39,1% par rapport à la même période en 2017, selon les chiffres du ministère de l’Industrie et du commerce.

En Thaïlande, les prix du Thaï 5%  se sont situés à $385-$393 la tonne contre  $390-$393 la semaine dernière dans un contexte d’un  marché toujours calme. L’augmentation graduelle de l’offre avec les récoltes saisonnières en décembre et janvier pourrait peser sur les prix.

En Inde, les prix du riz étuvé 5% sont restés inchangés par rapport à la semaine dernière à $364-$368 la tonne avec une demande toujours faible. 

L’Irak a signé un  accord avec les Etats-Unis pour importer du blé et du riz américains sur le premier semestre 2019, selon le ministère irakien du Commerce.

Le Nigeria – sa consommation et ses stocks en hausse –  tire l’ensemble de la demande la demande mondiale en riz en dépit d’une contraction de ses importations (cf. Le Nigeria « fait » le marché mondial du riz, selon l’USDA).

SUCRE

Les marchés du sucre ont légèrement glissé cette semaine. Le roux a terminé hier soir à New York, à 12,75 cents la livre (lb) contre 12,87 cents en fin de semaine dernier, tandis que le blanc coté à Londres a clôturé à $ 345,20 la tonne après avoir touché $ 337,80 en cours de séance ; il était à $ 345,60 la tonne vendredi dernier.

Un marché impacté cette semaine par la faiblesse du real, la baisse de la monnaie brésilienne rendant son sucre très compétitif sur le marché mondial, ce qui incite ses acteurs à exporter davantage et donc ce qui pèse sur les cours mondiaux. En outre, la baisse des cours du pétrole rend moins attractive la fabrication d’éthanol à partir de la canne, remettant le sucre sur le devant de la scène.

Les ventes spéculatives ont été importantes, les fonds tirant les cours en dessous des seuils de soutien, dont le récent bas à 12,49 cents. Quant aux transactions physiques, les acteurs sont un peu dans l’expectative quant aux tendances à venir sur le marché mondial.

Quoi qu’il en soit, les disponibilités physiques sur le marché mondial sont actuellement abondantes et donc les opérateurs tournent leur attention sur la baisse de la production à venir en Inde et en Thaïlande. “Le marché fait son travail en limitant l’offre puisque les prix baissent“, souligne Nick Penney, chez SucDen Financial.

Et que voit-on ? Une production sucrière en Inde qui pourrait baisser à 28-29 Mt en 2019/20  contre les 31,5 Mt attendues cette campagne, à cause de la sécheresse qui sévit dans deux des principales régions de culture de la canne. Cette baisse de production pourrait réduire les exportations du géant indien et donc permettre aux cours internationaux de reprendre des couleurs : ils ont baissé de 15% depuis le début janvier. En effet, dans le Maharashtra, où la pluviométrie a été de 23% inférieurs à la moyenne de ces dernières années, la production pourrait chuter de 16,5%, à 7,5 Mt, estime Prakash Naiknavare, directeur général de la National Federation of Coopérative Sugar Factories.  

Au Brésil, la région centre-sud a produit 528 000 t de sucre durant la seconde moitié du mois de novembre, selon le groupe Unica contre 880 000 t sur la première quinzaine. Les raffineries dans la principale ceinture sucrière du pays ont broyé 14,578 Mt de canne contre 21,296 Mt sur ces deux périodes respectivement.

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