La Chronique matières premières agricoles au 16 juin 2022

 La Chronique matières premières agricoles au 16 juin 2022
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Les hausses de taux annoncées successivement depuis mercredi par la Réserve fédérale américaine, la Banque d’Angleterre et surtout la Banque nationale suisse (BNS) ont ramené en force les craintes de récession aux Etats-Unis et en Europe, car il implique des menaces sur les perspectives de résultats et la valorisation des sociétés cotées partout dans le monde. En conséquence, les marchés financiers ont chuté hier. “La Fed dépeint désormais un scénario central qui se rapproche beaucoup plus d’un atterrissage brutal”, a souligné Jim Reid, stratège chez Deutsche Bank.

De ce fait, le dollar a perdu 1,45% hier, l’euro clôturant à $ 1,0511.

Les cours du Brent devraient enregistrer cette semaine leur première performance négative en cinq semaines et la première en huit semaines pour le WTI face à la crainte d’une dégradation de la demande et malgré l’annonce par les Etats-Unis de nouvelles sanctions visant le secteur pétrochimique iranien. Le baril de Brent a terminé hier soir à $ 118,64 et le brut léger américain (WTI) à $ 116,02.

 

CACAO  CAFE  CAOUTCHOUC  COTON  HUILE DE PALME  RIZ  SUCRE 

 

CACAO

La fève poursuit sa chute ! Partie de £ 1 758 la tonne vendredi dernier à Londres, la tonne (t) de cacao a clôturé hier soir à £ 1 708 sur l’échéance septembre, la même tendance étant notée à New York où on est passé de $ 2 432 sur septembre à $ 2 344 ; mercredi, on était tombé à un plus bas en six mois et demi. A Londres, la fermeté de la livre sterling a pesé sur les transactions, ce qui a fait chuter les cours.

En effet, les statistiques de l’ICE révèlent des stocks qui sont à leur plus haut niveau en un an alors que la demande mondiale est léthargique. Les broyages de fèves au Brésil ont chuté de 7,5% en mai et le groupe industriel AIPC s’attend à ce que les importations mondiales soient à leur plus faible niveau en quatre ans.

Au Ghana, les arrivages de fèves totalisaient 651 000 t entre le 1er octobre et le 9 juin, en chute de 32,2% par rapport aux 961 000 t atteintes sur la même période la campagne précédente. Les prévisions du Cocobod sur 2021/22 demeurent inchangées à 800 000 t.

En Côte d’Ivoire, les arrivages aux ports d’Abidjan et de San Pedro auraient atteint 1,913 Mt, selon les exportateurs, en baisse de 5,1% par rapport à la même période la campagne précédente. Des chiffres qui rejoignent les statistiques officielles du Conseil café cacao (CCC) publiées lundi, faisant état de de 1,866 Mt exportées entre le 1er octobre et le 31 mai, en recul de 5% sur la même période en 2020/21

La Côte d’Ivoire enregistre de beaux résultats en termes de transformation locale des fèves avec une hausse de 65,6% en un an à fin mai. Depuis le 1er octobre, ils atteignent 417 000 t contre 376 000 t sur la même période la campagne précédente, sur une capacité industrielle installée inchangée de 712 000 t.

CAFE

Le café toujours plus fort ! La livre (lb) d’Arabica est passé de $ 2,288 vendredi dernier sur l’échéance septembre à $ 2,318 hier soir, tandis que la tonne de Robusta à Londres grimpait de $ 2 095 à $ 2 104 sur la même période. Dix traders interrogés par Reuters voient le prix du Robusta en fin d’année à $ 2 275, soit 4% plus cher que fin 2021.

Fait rare mais facteur haussier, on assiste à des expéditions de café Arabica des entrepôts européens du marché à terme ICE vers les Etats-Unis, indique Reuters. Ceci interpelle car rappelons que la plupart de la production mondiale d’Arabica se situe en Amérique latine. En outre, cela signifie aussi que les stocks privés nord-américains sont faibles sinon l’ICE s’approvisionnerait, en toute logique géographique, auprès de ceux-ci. Ceci a permis aux stocks nord-américains de se reconstituer quelque peu, le café vert entreposé dans les ports aux Etats-Unis augmentant de 97 125 sacs à fin mai les faisant repasser au-dessus des 6 Ms, selon les statistiques de la Green Coffee Association. Toutefois, ils demeurent bas si on dresse un parallèle avec 2019, soit avant la Covid, lorsqu’ils comptaient 7,5 Ms.

Autre facteur haussier cette semaine, l’importance des différentiels entre les marchés physiques et à terme.

Rien d’étonnant car les gelées et les sécheresses au Brésil l’année dernière ont fait tomber le marché mondial dans une situation déficitaire estimée à 8,45 Ms pour l’actuelle campagne. Rappelons que de janvier à juin, l’Arabica a gagné près de 15% après avoir enregistré une hausse fantastique de 75% l’année dernière. Ceci dit, les 10 traders interrogés par Reuters, estiment qu’en 2022/23, le marché sera équilibré, se basant sur une production brésilienne qui atteindrait 63,38 Ms, le leader mondial du café étant alors dans son année « haute » de son cycle végétal caféier. Ils estiment que sa production n’a été que de 54,4 Ms en 2021/22, ce qui a engendré ce déficit de 8,45 Ms.

Pourtant, la semaine dernière, le café avait été impacté par le real qui avait enregistré sa plus forte baisse en plus de deux ans. Un real faible signifie des exportations brésiliennes de café en hausse car le café est plus compétitif. Selon le consultant brésilien Safras & Mercado, les producteurs ont encore relativement peu vendus de leur récolte 2022/23 par rapport à la même période la campagne dernière, avec 33% contre 40% mais ces 33% sont supérieurs aux 29% en moyenne ces cinq dernières années.

Côté Robusta, en Asie, au Vietnam, les planteurs des Central Highlands ont obtenu entre 41 500 et 42 200 dongs ($ 1,79-$ 1,82) le kilo contre 41 900 à 42 900 dongs la semaine dernière. Il n’y a quasiment plus de café, la campagne 2021/22 s’achevant officiellement le 30 septembre. A l’export, le Grade 2, 5% brisures et grains noirs, s’est vendu avec une décote de $ 160 la tonne sur le contrat de septembre contre $ 150 à $ 160 la semaine dernière. Certains traders ont même enregistré une décote de $ 200 sur les contrats juillet et septembre.

En Indonésie où la récolte commence à battre son plein, la décote pour du Robusta de Sumatra a été de $ 140 à $ 150 cette semaine sur l’échéance juillet contre $ 170 à $ 180 la semaine dernière, certains traders offrant une décote jusqu’à $ 250 sur les contrats de septembre. A noter que les volumes exportés en mai ont chuté de 72% par rapport à mai 2021 pour se situer à 2 633 tonnes, selon les douanes.

CAOUTCHOUC

Le caoutchouc dégringole affecté par l’environnement extérieur peu porteur. Au Japon sur l’Osaka Echange, les cours ont terminé hier à 254,1 yens ($1,89) le kilo contre 264 yens vendredi dernier. A Shanghai, même tendance, avec une clôture hier à 12 840 yuans ($1 912,93) contre 13 380 yuans vendredi.

Les nouveaux confinements ciblés en Chine suscitent de l’inquiétude sur le rebond de la demande du premier consommateur mondial de caoutchouc. D’un autre côté, l’économie chinoise a montré des signes de reprise en mai après s’être effondrée le mois précédent, avec une hausse de la production industrielle, mais la consommation est toujours faible.

Quant au Japon, il a enregistré son plus gros déficit commercial sur un mois en plus de huit ans en mai, alors que les prix élevés des produits de base et la baisse du yen ont gonflé les importations, assombrissant les perspectives économiques du pays. La hausse des taux d’intérêt aux Etats-Unis ainsi qu’un manque toujours persistant de composants électroniques pour le marché automobile font pression sur le prix. De plus,  depuis vendredi dernier, les prix du latex en Thaïlande, premier producteur mondial de caoutchouc, ont beaucoup baissé. Ils ont atteint leur plus bas niveau depuis le 7 février à 47,65 baths ($1,36) le kilo mercredi.

En Malaisie, la production de caoutchouc naturel a chuté de 20%  au mois d’avril pour atteindre 22 498 tonnes par rapport au mois de mars,  et de 2,2% en glissement annuel, selon le Department of Statistics Malaysia (DoSM). Les stocks ont diminué de 4,1% à 297 673 tonnes, tandis que les exportations ont progressé de 10,2% à 58 755 tonnes en avril.

Le Cambodge a exporté 105 048 tonnes de caoutchouc sec au cours des cinq premiers mois de 2022, en hausse de 3% par rapport à la même période l’an dernier, pour une valeur de $168 millions, en baisse de 1,7%,  a indiqué vendredi un rapport de la Direction générale du caoutchouc. “Une tonne de caoutchouc sec a coûté en moyenne $1 604 dollars au cours des cinq premiers mois de 2022, soit environ $71 dollars de moins qu’à la même période l’année dernière”, a déclaré Him Oun, directeur général de la Direction générale du caoutchouc.

COTON

Le coton glisse … Les cours sur l’ICE pour le contrat de décembre, le plus échangé, sont passés de 122,86 cents la livre vendredi dernier à 119,23 cents hier. Le contrat de juillet, qui expire très prochainement, a clôturé hier à 143,53 cents contre 145,06 cents vendredi dernier.

L’environnement macroéconomique extérieur pèse sur le marché du coton. L’appréciation du dollar, rendant le coton plus cher pour les acheteurs étrangers, la faiblesse des marchés boursiers et la chute des marchés des céréales, le relèvement du taux d’intérêt de la FED pour tenter de juguler l’inflation avec un risque de récession et la politique anti-Covid de la Chine avec des confinements partiels sont autant de facteurs altérant le marché. Les signes d’un ralentissement de la demande de coton sont aussi maintenant plus perceptibles avec la baisse au mois de mai des ventes de détail aux Etats-Unis et l’accumulation des stocks dans les grandes enseignes.

Un environnement défavorable qui prend le dessus sur  des conditions météorologiques guères favorables pour l’instant dans plusieurs zones de production.

Le département américain de l’Agriculture (USDA) a laissé ses prévisions d’offre et de demande de coton aux États-Unis pour 2022/23 inchangées par rapport au mois dernier, mais a annoncé une production mondiale légèrement supérieure (Egypte et Afrique de l’Ouest) et une consommation légèrement inférieure (Bangladesh, Mexique, Vietnam) par rapport au mois précédent, avec des stocks de clôture pratiquement inchangés. “Les stocks de départ pour 2022/23 sont également plus bas ce mois-ci, car une baisse de 1,5 million de balles de la production mondiale 2021/22 compense largement une baisse de 1,25 million de balles de la consommation prévue”, a déclaré l’USDA.

En Chine,  les importations 2021/22 devraient chuter de plus de 4,3 millions de balles par rapport à l’année précédente à 8,5 millions, selon l’USDA. Une forte réduction qui s’explique par des importations antérieures massives qui sont restées au début de l’année dans des entrepôts sous douane, une consommation en Chine plus faible que prévu, une variation brutale du prix différentiel entre les importations et le coton intérieur, et la baisse de la demande des entreprises commerciales d’État par rapport à l’année précédente.

Toutefois, pour la campagne 2022/23, l’USDA anticipe une hausse des importations de 2 millions de balles pour atteindre 10,5 millions de balles, restant les plus importantes au monde pour la troisième année consécutive.

En Egypte, la production de coton de la campagne 2022/23 (août à septembre) devrait grimper de 50% par rapport à la campagne précédente pour atteindre 420 000 balles  (480 livres) avec une superficie en hausse de 53 % à environ 130 000 ha.

HUILE DE PALME

C’est encore l’Indonésie qui donne le tempo du marché de l’huile de palme et il était clairement baissier cette semaine. Les cours sur la Bursa Malaysia Derivatives Exchange ont clôturé hier à 5 477 ringgits ($1 244,77) la tonne contre 5 940 ringgits vendredi dernier. C’est un plus bas de quatre mois. Ils avaient déjà cédé 8% la semaine dernière.

Après la pénurie, l’offre d’huile de palme devrait retrouver un certain niveau. En premier lieu, car l’Indonésie a décidé d’accélérer ses volumes d’exportation, après les avoirs suspendues en avril dernier. Mercredi, elle a délivré des permis pour l’expédition de 602 142 tonnes d’huile comestible dans le cadre de son programme d’obligation sur le marché intérieur, selon le ministère du Commerce. L’Indonésie a également décidé de  réduire les taxes à l’exportation nettes à payer ce qui a exercé aussi une pression sur l’huile de palme malaisienne. Les exportations de la Malaisie entre le 1er et le 15 juin ont déjà diminué entre 3,5% et 6,1% par rapport à la même période en mai, selon les estimations de deux contrôleurs de fret. Mais Intertek Testing Services estime qu’elles ont augmenté de 5,6%.

Outre la politique indonésienne, la production d’huile de palme devrait reprendre tandis que la politique anti-Covid de la Chine  et les récents nouveaux confinements pourraient heurter la reprise de la demande de Pékin.

En Inde, les importations d’huile de palme ont chuté de 10% en mai par rapport au mois d’avril. L’Inde a importé 514 022 tonnes d’huile de palme en mai, contre 572 508 tonnes en avril, selon la Solvent Extractors’ Association (SEA). En mai, les raffineurs indiens ont acheté plus d’huile de palme en Malaisie, en Thaïlande et en Papouasie-Nouvelle-Guinée, mais les importations globales étaient toujours en baisse, a indiqué la SEA. “En juin, les importations d’huile de palme pourraient dépasser les 600 000 tonnes car l’Indonésie a commencé à accorder des permis d’exportation”, a déclaré un revendeur basé à Mumbai. Les importations d’huile de soja ont bondi de 37% en mai  à  373 043 tonnes, tandis que celles d’huile de tournesol ont plus que doublé pour atteindre 118 482 tonnes.

RIZ

Les prix à l’exportation du riz thaïlandais ont chuté cette semaine mais ceux de l’Inde et du Vietnam sont demeurés inchangés.

En Thaïlande, les prix du riz Thaï 5 % ont chuté à $430-$440 $$ la tonne, contre $450-$460 la semaine dernière en raison de la dépréciation du bath, tombé à un creux de plus de 5 ans. La demande est aussi modérée alors que l’offre reste abondante avec de nouvelles récoltes attendues à la fin du mois prochain.

En Inde, les prix du riz étuvée 5 % sont restés inchangés à $357-$362 la tonne. Les exportateurs indiens n’augmentent pas les prix car  la roupie s’est dépréciée à un niveau record, ce qui augmente leur marge.

New Dehli, par la voix du ministère de l’Alimentation, a à nouveau affirmé cette semaine que le pays disposait d’importants stocks de riz et qu’il n’était donc pas envisagé de restreindre ses exportations. Les stocks de riz usiné et paddy dans les greniers gouvernementaux s’élèvent à 57,82 millions de tonnes  (Mt)  et ont  plus que quadruplés par rapport à l’objectif de 13,54 Mt.

Au Vietnam, les prix du Viet 5% sont également stables à $420-$425 la tonne. “La demande augmente alors que les pays augmentent leurs achats dans un contexte d’inquiétudes concernant une nouvelle augmentation des prix mondiaux des denrées alimentaires”, a déclaré un négociant basé à Ho Chi Minh-Ville. Ajoutant “Les prix intérieurs du paddy augmentent légèrement par rapport à il y a une semaine et pourraient exercer une pression à la hausse sur les prix à l’exportation du riz au cours des prochaines semaines”.

SUCRE

Sur juillet, le sucre roux a démarré la période sous revue, vendredi dernier, à 18,87 cents la livre (lb) pour glisser et clôturer hier soir à 18,58 cents à New York. Le sucre blanc à Londres a connu la même tendance, terminant hier soir à $ 558,80 la tonne sur l’échéance août contre $ 564,30 en fin de semaine dernière.

Un marché qui, en ce vendredi, ne fait que parler de la rumeur selon laquelle l’Inde imposerait en octobre un nouveau plafond à l’exportation de sucre sur 2022/23, à 6 ou 7 Mt et ce pour la deuxième année consécutive. Objectif ? Protéger son marché local et éviter que les prix ne flambent. Rappelons que cette année, l’Inde va, en définitive, exporter environ 10 Mt. On parle donc d’un tiers en moins. Ceci devrait faire grimper els cours du sucre blanc qui sont déjà aux plus hauts en cinq ans et demi.

Un marché qui, cette semaine, a digéré l’adoption par le Parlement au Brésil d’un plafonnement de la fiscalité sur les combustibles et d’autres produits pour lutter contre l’inflation. Le gouvernement envisagerait aussi de baisser les taxes sur les biocarburants, toutes ces modifications ayant une incidence sur le sucre puisque les raffineurs décident en dernier ressort des volumes de canne qui vont à la production d’éthanol ou de sucre en fonction de l’évolution des cours mondiaux de chaque produit.

Le marché du sucre a également été impacté cette semaine par la forte baisse de la valeur du real face au dollar, incitant les Brésiliens à vendre leur sucre sur le marché mondial car il est plus compétitif.

Pour terminer sur l’actualité brésilienne, notons la forte baisse des volumes de sucre exportés du Brésil en mai, à 1,58 Mt contre 2,48 Mt en mai 2021, selon les statistiques gouvernementales.

Le Département américain de l’Agriculture (USDA) a très fortement abaissé ses prévisions de ratio stock/utilisation qui ne serait plus que de 7,6% sur la campagne 2022/23 contre les 10,1% estimés en mai. En cause ? Une production aux Etats-Unis qui serait plus basse que prévue à 8,82 Mt contre les 9,04 Mt estimées en mai, car les plantations de betterave sucrière ont été tardives du fait de la sécheresse, impactant les rendements : ils seraient de 27,88 t à l’acre, leur plus faible niveau depuis 2014/15. En outre, suite à la flambée des cours des céréales, certains agriculteurs auraient préféré planter des céréales plutôt que des betteraves. Tout ceci laisse dire à l’USDA que les importations nord-américaines de sucre seront en hausse ces prochains mois.

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