Marché mondial du sucre : la reprise est-elle durable ?

 Marché mondial du sucre : la reprise est-elle durable ?
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On revient de loin sur le marché du sucre. Après plus d’une année de cours déprimés, ils ont rebondi depuis la mi-octobre pour se situer au-dessus des 13 cents la livre début décembre. Sommes-nous à une nouvelle inflexion du marché, rompant la tendance structurelle baissière ? Analyse d’Olivier Crassard de Sucden lors de la 23ème Journée de l’Association française de la canne à sucre (Afcas).

Le marché du sucre sort-il de sa déprime ? Les fondamentaux semblent donner une impulsion positive. En effet, après avoir atteint un sommet de 166,6 millions de tonne (Mt) en 2017/18, soit plus de 20 Mt par rapport à 2016/17 impulsé par une hausse des cours qui ont atteint jusqu’à 24 cents la livre en 2016, la production sucrière mondiale s’est contractée en 2018/19, avec la chute toute aussi brutale de cours, pour atteindre 154,2 Mt. Une grande partie de la baisse de la production mondiale de sucre est imputable au Brésil, qui a privilégié l’éthanol au sucre (65% versus 35%), retirant près de 10 Mt de sucre sur le marché mondial. Conséquence, le marché s’est un peu assaini et le surplus a été moins important.

 

Pour 2019/20, la tendance se poursuit avec une nouvelle diminution de la production attendue à 145,2 Mt. Le Brésil est toujours orienté vers l’éthanol, la production de l’hémisphère nord est baissière, à l’exception de la Russie, l’incertitude porte sur l’Asie mais l’Inde devrait avoir une moindre récolte, la mousson de 2018 n’ayant pas été bonne avec pour conséquence des réservoirs non suffisamment remplis. Face à une consommation mondiale qui globalement continue de progresser, le marché devrait donc enregistrer un déficit de l’ordre de 5 à 7 Mt. Une perspective qui a faiblement fait réagir le marché car les stocks sont records. « Comment va se dérouler le rapport de force entre des stocks élevés et un déficit ? » s’interroge Olivier Crassard. Un deuxième élément déterminant sera de savoir si ces stocks sont disponibles ou non pour le marché, ajoute-t-il.

Une grande partie de la réponse, et donc d’une hausse ou non des prix, se situe dans les perspectives de 2020/21. Le marché sera-t-il à nouveau en déficit ? Si oui, quelle sera son ampleur ? De nouveau 5 Mt ou plus proche de la neutralité ? questionne Olivier Crassard. Les réponses se situeront au Brésil et dans une moindre mesure en Inde.

Aujourd’hui, si on fait le tour des grands producteurs, le bilan est mitigé. L’Inde reste une composante plutôt baissière du marché mondial, l’abondante mousson de 2019 ajoutée à un prix de la canne compétitif par rapport aux autres cultures, devraient inciter les agriculteurs à planter de la canne. Ainsi, l’Inde pourrait revenir à une production de 31 à 32 Mt, soit une hausse potentielle de près de 5 Mt. De plus, New Delhi détient des stocks très élevés, de l’ordre de 15 Mt, ce qui représente 60% de sa consommation domestique. Va-t-elle les exporter ? Mais, pour les autres producteurs les perspectives sont moins bonnes. Ce qui conduirait à un nouveau déficit, mais moindre, de l’ordre de 3 à 4 Mt, estime l’analyste.

L’élément déterminant sera le Brésil. Comment va-t-il réagir avec des cours supérieurs d’environ 20% ? Cela va-t-il l’encourager à faire plus de sucre ? Aujourd’hui, l’éthanol paye plus toujours plus que le sucre, un différentiel de l’ordre de $30 à $40 la tonne. En outre, le programme RenovaBio, qui entrera en application en 2020, avec la mise en oeuvre d’un marché de quotas de réduction d’émissions de CO2, devrait fortement favoriser l’industrie de l’éthanol. Les prix du pétrole et la monnaie brésilienne, le real, seront des variables toutefois importantes. Et puis, mais c’est vrai pour tous les pays et toutes les commodités agricoles, les conditions climatiques seront déterminantes.

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