« Le taux de change est en notre faveur et cela permet de disposer de prix qui ne sont pas catastrophiques », Jean-Paul Sawadogo, directeur général de la Sofitex
À Paris le 13 février, la Société burkinabè des fibres textiles, Sofitex, a signé une convention d’un montant de 70 millions d’euros pour le financement de la campagne 2014/15 de la culture du coton. Elle s’ajoute à la convention signée le 14 janvier à Rabat entre la Sofitex et la Société internationale islamique de financement du commerce pour un montant de 79 millions d’euros et celle signée avec pool bancaire national, conduit par Ecobank, d’un montant de 110 millions d’euros.
Ce sont donc quelque 259 millions d’euros qui ont été mobilisés pour la campagne 2014/2015 dont la production de coton graine est attendue à 540 000 tonnes, contre 508 000 tonnes réalisées en 2013/14.
A l’occasion de la signature de cette dernière convention, Jean-Paul Sawadogo, directeur général de la SOFITEX, a accordé à CommodAfrica une interview.
Contrairement aux autres conventions, ce n’est plus la HSBC qui est le chef de file de ce pool financier mais la Société générale et la SFI, filiale de la Banque mondiale pour le secteur privé, qui participe pour la première fois au financement de la campagne cotonnière de la Sofitex. Ce changement de partenaires est-il consécutif à la transition politique en cours au Burkina Faso ?
Effectivement cette année, HSBC ne fait plus partie de nos partenaires. En novembre dernier nous avons été informé par HSBC de leur décision de ne plus intervenir en Afrique pour financer les matières premières. Ce n’est donc pas lié ni à des difficultés particulières qu’auraient pu connaître la Sofitex, ni à la situation politique du pays.
Les cours du coton ont considérablement baissé depuis le printemps dernier, quels sont les impacts immédiats sur la Sofitex et ne craignez-vous pas un certain découragement des producteurs pour la prochaine campagne 2015/16 ?
Nous disposons au Burkina d’un mécanisme de financement de détermination de prix d’achat du coton-graine au producteur. Les prix sont fixés chaque année au mois d’avril, ce sont des prix planchers, qui ne peuvent pas être révisés à la baisse. Ainsi lorsque les cours au niveau mondial connaissent des baisses significatives et comme nous ne pouvons pas revenir sur le prix d’achat du coton graine, nous avons mis en place un fonds de lissage qui permet durant cette période de combler les pertes des sociétés cotonnières. Nous allons donc y avoir recours. Mais malheureusement cette année le fonds de lissage ne pourra faire face à la totalité de la perte. Nous cherchons donc des solutions pour traverser cette période difficile. Ceci étant, comme nous vendons une bonne partie du coton avant qu’il ne soit produit, la direction commerciale a anticipé cette baisse et nous avons pu vendre une grande partie, ce qui a limité un peu les pertes pour la Sofitex.
Le taux de change du FCFA par rapport au dollar avantage aussi en ce moment les filières d’exportation, comme le coton ?
Le marché en tant que tel n’a pas beaucoup évolué mais effectivement le taux de change est en notre faveur et cela permet de disposer de prix qui ne sont pas catastrophiques pour l’heure. Ce ne sont pas les prix de 2004 ou 2006.
À combien évaluez-vous les pertes cette année pour la Sofitex ?
Elles vont se situer autour de FCFA 6 milliards pour la Sofitex et FCFA 7 milliards pour l’ensemble des sociétés cotonnières du Burkina Faso alors que le fonds de lisage est abondé à hauteur de FCFA 4 milliards.
Pour la campagne à venir, 2015/16, les difficultés pourraient s’accentuer ? Le prix d’achat au producteur va baisser ?
Oui, puisque le mécanisme de fixation des prix tient compte de l’évolution des cours internationaux. Mais c’est un mécanisme suivi et connu des producteurs.
Vous n’avez pas peur d’un certain découragement du côté des producteurs ?
Nous calculons un seuil de découragement et nous en sommes encore loin de ce seuil. Nous pouvons toutefois connaitre une baisse de la production mais pas à des niveaux importants.
Il y a trois ans, vous avez perdu une grande partie de la longueur de votre fibre de coton. La mise en place de votre programme semencier vous a-t-il permis de la récupérer ?
Nous sommes en train mais nous ne l’avons pas encore récupéré à 100%. Nous ne pouvons pas résoudre un problème de semence en une ou deux campagnes. Il faut du temps et j’espère que dans deux ans ce sera fait. Aujourd’hui nous sommes à 60% de récupération.