La Côte d’Ivoire cherche FCFA 6 milliards pour lutter contre la grippe aviaire

 La Côte d’Ivoire cherche FCFA 6 milliards pour lutter contre la grippe aviaire
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Le déferlement de la grippe aviaire H5NI en Afrique de l'Ouest constitue une catastrophe sanitaire et économique d'autant plus douloureuse que la région sort à peine de la crise meurtrière du virus Ebola. Coup de projecteur sur la situation en Côte d'Ivoire.

En juillet 2015, la FAO mettait en garde contre la propagation de la grippe aviaire (H5N1) en Afrique de l'Ouest, réclamant $ 20 millions pour financer des "opérations d'intervention et de prévention". Six mois après, le Nigeria est en alerte quasi générale avec 21 Etats touchés par le virus sur un total de 36 Etats. A ce jour, plus de 2 millions de volailles y ont été abattues ou sont mortes des suites du virus.

Peu de pays sont à l'abri dans la région, des cas ayant été recensés en Côte d'Ivoire, au Burkina Faso, au Niger, au Ghana.

Un fléau depuis 2006

La première incursion du virus H5N1 en Afrique de l'Ouest s'est produite en 2006, notamment en Côte d'Ivoire où la maladie avait généré une perte financière de FCFA 10 milliards, rappelle un document de la Banque africaine de développement de décembre dernier*. Puis, la maladie a été éliminée de la région  en 2008 mais est réapparue au Nigeria fin 2014 avec un premier cas confirmé le 16 janvier 2015 ; s'ensuivirent des notifications de cas au Burkina Faso le 1er avril 2015, au Niger le 22 avril, en Côte d'Ivoire le 28 mai et au Ghana le 2 juin.  En juillet 2015, la FAO lançait un appel pour réunir $ 20 millions et combattre les foyers de crises aviaire.

Un dossier majeur de santé publique mais aussi économique. Car la production de volailles a augmenté de façon constante en Afrique de l'Ouest au cours des dix dernières années, notamment en Côte d'Ivoire où la production a grimpé de plus de 60% depuis 2006.

Un enjeu ivoirien majeur

Ce bond de la production avicole ivoirienne correspond, en effet, à une place à prendre sur le marché. En effet, en 2011, le pays importait 83% de ses besoins en lait et produits laitiers, 58% en viande bovine, 32% en viande de petits ruminants et 46% en viande porcine. Pour renforcer la tendance et la structurer, le gouvernement a élaboré un Plan stratégique de développement de l’élevage, de la pêche et de l’aquaculture (PSDEPA) 2014-2020. Une filière qui comptait déjà, en 2015, 30 millions de volailles, 15 000 emplois directs ou indirects et générait un chiffre d'affaires annuel de FCFA 40 milliards (environ € 61 millions).

La réapparition du virus H5N1 est venue tout bouleverser. D'où l'importance de la "riposte" que le ministère ivoirien des Ressources animale set halieutiques (Mirah) a voulu mettre en œuvre au travers de son Comité technique pour la lutte contre la grippe aviaire, impliquant la Direction des services vétérinaires (DSV) et l’Interprofession avicole de Côte d’Ivoire (IPRAVI), avec l’appui des bailleurs dont la FAO, l'USAID, la Banque mondiale, la BAD, l'Agence française de développement, l'Union européenne et le Pnud.

Cette riposte a pris la forme d'un Plan d'action d'urgence d'un coût de FCFA 2,1 milliards auxquels il faut ajouter FCFA 4 milliards pour "la compensation des abattages sanitaires". Dès le début du mois de juillet, Abidjan sollicitait les bailleurs pour qu'ils financent son Plan d'action qui s'articule autour de 6 axes : des campagnes de communication ; la mise en place d’un système de compensation des éleveurs sinistrés et la mise en œuvre de mesures de surveillance et de contrôle de la maladie ; la réduction des risques de propagation ; l'amélioration de la biosécurité sur les fermes et les marchés ; l' amélioration de la capacité de diagnostic et de coordination ; la coordination des actions entre tous les partenaires.

A décembre 2015, le document de la BAD fait état de divers soutiens. Outre le gouvernement ivoirien lui-même qui aurait "mobilisé" FCFA 245 millions (€ 373 500), la FAO aurait accordé une assistance d'urgence ($ 470 000 ou € 432,3 millions) au Mirah pour renforcer les capacités d'analyse des laboratoires et des techniques de traçabilité, équiper les service vétérinaires et mettre en place des campagnes de communication. Un consultant national financé par l'USAID ($ 100 000, soit € 92 000) est venu renforcer les services vétérinaires.

La BAD met $ 1 million notamment pour la biosécurité

La BAD, quant à elle, a décidé en décembre une aide d'urgence de $ 1 million (€ 916 400) tirée de son Fonds spécial de secours. La somme sera décaissée en une seule fois et mise en œuvre par la FAO dans un délai maximal de 6 mois. A la clé, l'amélioration de la santé animale et la santé publique, notamment via  le renforcement de la capacité de diagnostic de la grippe aviaire dans les laboratoires mais aussi en améliorant la "biosécurité".

Et le document de la BAD de décrire l'actuelle situation des marchés de volailles en Côte d'Ivoire comme étant des " lieux de rassemblement de volailles de toutes espèces et de tous âges. Des volailles et des personnes de diverses provenances s’y rencontrent en un même lieu, entrant en contact pour ensuite se disperser. On constate un manque d’hygiène dans les marchés, sur le matériel de collecte, de transport et de commercialisation de la volaille et des produits avicoles. L’abattage de volailles dans les marchés de façon générale se fait de manière artisanale ; le sang coule sur le sol en terre, le bac d’échaudage est constitué d’un seau de peinture usé ou une grosse marmite qui sert à chauffer l’eau au feu de bois et cette eau est utilisée en continu toute la journée. Les volailles sont plumées à mains nues et la découpe se fait sur une table en bois. Ainsi le matériel utilisé sur ces aires d’abattage est globalement non conforme et sans aucune mesure d’hygiène ; en plus la volaille abattue ne fait pas l’objet d’inspection sanitaire vétérinaire. Les personnes qui travaillent dans ces tueries ne sont soumises à aucune mesure de biosécurité. Les marchés jouent très probablement un rôle dans l’exposition humaine aux oiseaux infectés par l’IAHP H5N1 et autres maladies aviaires. Ils constituent aussi un mécanisme possible de diffusion de la maladie, tant par les oiseaux que par les hommes, dans des zones auparavant non infectées."

La grippe aviaire pourrait être, un déclencheur de restructuration de la filière dans son ensemble…

 

* BAD, Proposition visant l'octroi d'un don de 1 000 000,00 $EU au titre d'aide humanitaire d'urgence pour soutenir le gouvernement de la Côte d'Ivoire dans la lutte contre la grippe aviaire, décembre 2015

Lire aussi:

21 Etats au Nigeria touchés par la grippe aviaire , 19 janvier 2016

Mesures supplémentaires pour contenir la grippe aviaire au Ghana, 8 septembre 2015

La lutte contre la grippe aviaire en Côte d'Ivoire s'intensifie, 2 septembre 2015

Alerte à la grippe aviaire en Côte d'Ivoire, 17 août 2015

Abidjan et Accra prennent des mesures pour endiguer la grippe aviaire , 22 juillet 2015

La grippe aviaire sévit en Afrique de l'Ouest  20 juillet 2015

Le Ghana interdit l'importation de volailles du Burkina Faso 4 mai 2015

 

 

 

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