L’industrie française du caoutchouc sous tension

 L’industrie  française du caoutchouc sous tension
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Les tensions sur les matières premières et plus globalement sur l’ensemble des approvisionnements s’intensifient depuis le début de l’année. Elles se traduisent par des pénuries doublées par des hausses de prix. « La situation s’avère critique pour nombre de transformateurs de caoutchouc » s’alarme le Syndicat national du caoutchouc et des polymères (SNPC), qui représente en France plus de 120 entreprises transformatrices de caoutchouc (pneumatiques, pièces techniques, rubans adhésifs, etc.) et fournisseurs de matières premières ou d’équipements.

Dans l’industrie du caoutchouc, on achète du caoutchouc naturel et synthétique, mais aussi pléthore d’autres matières, comme des plastifiants, des antioxydants, etc., qui rentrent dans une formule de caoutchouc ainsi que du métal. Or, aujourd’hui, souligne Bruno Muret, directeur économie et communication du SNPC « les entreprises sont confrontées à des pénuries, des hausses de prix, des mises sous allocations, des retards de livraison, une multiplication des cas de forces majeures, qui complexifient extrêmement leur travail ». Une situation complexe alors même que les entreprises observent un net regain d’activité, avec une reprise de la demande plus rapide qu’anticipée et plus forte que celle observée après la crise financière de 2028/09, mais font face à des problèmes d’approvisionnement. «On vit une période de désynchronisation entre l’offre et la demande dans la branche industrielle », constate Bruno Muret.

Premier constat, mais qui n’est pas nouveau, les filières d’approvisionnement sont de plus en plus longues et de moins en moins européennes et la crise de la Covid-19 a été un révélateur de notre dépendance de plus en plus marquée pour nombre de matières – des antioxydants aux accélérateurs- qui sont massivement localisées en Asie du Sud-Est où l’offre est  souvent à caractère oligopolistique,  souligne-t-il. Les semi-conducteurs dans l’industrie automobile ont valeur d’exemple avec une offre détenue à 70% par une entreprise taïwanaise (TSMC).

Or, en Asie, qui a dépassé ses niveaux de production de 2019 à la fin de l’année 2020, les capacités de production ont été mobilisées pour satisfaire la demande asiatique et des secteurs plus porteurs que l’industrie du caoutchouc, de l’automobile ou de l’aéronautique, à commencer par l’informatique, la téléphonie, des secteurs qui ont performé pendant la crise de la covid-19 dans le sillage du télétravail. En outre, ajoute Bruno Muret, « de nombreux acteurs chinois ont eu des logiques de stockage assez opportunistes en particulier au printemps dernier quand les prix des matières premières de base ont fortement chuté. Or, en Europe, nous avons fait le contraire dans plusieurs industries et le caoutchouc n’y déroge pas ». Ainsi quand la demande a rebondi à l’automne, tout le monde a passé à nouveau des commandes, ce qui causé des goulets d’étranglement et ralenti la reprise des capacités de production. A cela se sont ajoutées des difficultés logistiques à partir du mois de novembre avec pour conséquence une multiplication par quatre du prix d’un conteneur.

« Si les problèmes sanitaires sont levés en Europe, la demande risque d’être encore plus vigoureuse mais il faut que l’offre suive. Nous nous sommes créés des dépendances, ce n’est pas une surprise, mais elles peuvent se révéler être des armes stratégiques dans ces périodes de tension. Il faut en avoir conscience, un peu plus demain qu’aujourd’hui, et trouver des palliatifs pour éviter d’être complétement dépendants, mais cette mécanique s’est construite au fil des années » souligne Bruno Muret. L’année 2021 sera compliquée pour tous les acheteurs et les services des achats des transformateurs de caoutchouc.

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