L’industrialisation de l’agriculture au premier rang de l’action à venir de la BAD

 L’industrialisation de l’agriculture au premier rang de l’action à venir de la BAD
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Aujourd’hui s’achèvent à Busan, en Corée, les 53èmes assemblées annuelles de la Banque africaine de développement (BAD) ouvertes mercredi.  Des assemblées qui ont permis à la Banque de faire état de résultats financiers “jamais atteints depuis sa création en 1964“, à savoir des approbations de projets pour une valeur totale de $ 8,7 milliards et des décaissements atteignant $ 7 milliards.

Enjeu central des assemblées, les 80 gouverneurs de la Banque ont donné leur feu vert pour démarrer des consultations afin d’accroître capital de la Banque, tout en soulignant l’importance d’associer la recherche de financements extérieurs à la mobilisation de ressources internes, notamment, à travers une gestion plus efficace des finances publiques et une lutte sans merci contre les flux financiers illicites qui sortent du continent africain.

L’industrialisation, la clef de tout

Des assemblées qui avaient pour thème l’industrialisation de l’Afrique, le président de la Bad, Akinwumi A. Adesina, ne manquant pas de rappeler dans son propos introductif qu'”Il y a soixante ans, la Corée était un pays pauvre. Aujourd’hui, c’est la 11e économie mondiale. Le miracle ne s’est pas produit par hasard sur le fleuve Han. Il a eu lieu grâce à l’industrialisation, purement et simplement.

“L’Afrique doit apprendre de l’expérience industrielle de la Corée, ainsi que des expériences tout aussi remarquables de la Chine, du Japon et d’autres régions du monde. Pourquoi ? Parce que l’Afrique est dans une phase de désindustrialisation !”, a-t-il poursuivi.

“Entre 2012 et 2018, la valeur ajoutée industrielle de l’Afrique a baissé de $ 702 à 630 milliards – soit une perte de $ 72 milliards. Dans les pays affichant la plus grande production industrielle, cette valeur a fortement diminué : de 41 % au Nigeria, 26 % en Afrique du Sud, 64 % en Egypte et 67 % en Algérie.

“Toutefois, certains pays s’en sortent bien. La production industrielle du Maroc a augmenté de 16 % pendant la même période, le pays étant devenu une plateforme pour les sociétés aéronautiques mondiales.L’Ethiopie a quintuplé sa valeur ajoutée industrielle, grâce à ses investissements massifs dans des parcs industriels, des zones économiques spéciales, ainsi que des partenariats stratégiques avec des entreprises chinoises pour l’industrie du cuir, et d’autres entreprises mondiales du textile et du vêtement.

“Le ralentissement de la production industrielle de l’Afrique est au cœur du problème du chômage massif des jeunes. C’est pourquoi, sur les 11 millions de jeunes qui entrent tous les ans sur le marché du travail, seuls 3 millions obtiennent des emplois. Pour créer davantage d’emplois – je veux dire des emplois de qualité et bien rémunérés –, l’Afrique doit accélérer son industrialisation.

“Consciente de cette situation, la Banque africaine de développement entend investir $ 35 milliards dans les dix ans, au titre de sa stratégie pour l’industrialisation. L’objectif est d’aider l’Afrique à accroitre son PIB industriel, pour le faire passer d’un peu plus de $ 700 milliards aujourd’hui à plus de $ 1 720 milliards à l’horizon 2030. Atteindre cet objectif permettra au continent de relever son PIB à plus de $ 5 600 milliards et son PIB par habitant à plus de $ 3 350.”

Des économies affectées par la volatilité des cours mondiaux

“L’Afrique est véritablement une région bénie. Avec ses vastes terres agricoles inexploitées qui représentent 65 % des terres arables disponibles aujourd’hui dans le monde, et ses riches gisements de gaz naturel, de pétrole, de minéraux et de métaux, le continent regorge de ressources naturelles. Le paradoxe est que l’Afrique n’exporte, pour l’essentiel, que des matières premières non transformées. Aussi, il n’est guère surprenant que ses économies soient souvent affectées par la volatilité des cours mondiaux des produits de base.

“Les agriculteurs africains travaillent dur, tous les ans, pour fournir 75 % de la production mondiale de cacao, mais perçoivent moins de 5 % des bénéfices de $ 120 milliards annuels réalisés sur le marché du chocolat. L’Afrique fournit 50 % de la production mondiale d’or, mais ne reçoit que 4 % des 300 milliards de dollars des recettes mondiales générées par l’or.

“La recette pour la richesse des nations est claire : les pays riches ajoutent de la valeur à tout ce qu’ils produisent ; les pays pauvres n’exportent que des matières premières. L’Afrique doit s’industrialiser et ajouter de la valeur à tout ce qu’elle produit – des ressources agricoles aux métaux, en passant par les minéraux, le pétrole et le gaz. Elle doit cesser d’être au bas des chaines de valeur mondiales pour chercher à atteindre le sommet.

“Pour donner une impulsion à son processus d’industrialisation, l’Afrique doit rapidement constituer une main-d’œuvre compétitive, bien formée et très qualifiée pour demain. Et nous sommes déjà demain. On ne peut plus se permettre de perdre du temps ! La 4e révolution industrielle est déjà amorcée et la nature des emplois évolue rapidement. L’Afrique doit préparer ses jeunes aux emplois d’avenir et non à ceux du passé. Elle doit renforcer l’enseignement supérieur et la formation technique et professionnelle, pour créer les compétences de demain. Surtout, elle doit mettre l’accent sur le numérique, la mathématique, les sciences des matériaux, la biotechnologie, l’ingénierie, l’intelligence artificielle, la robotique et l’informatique quantique, qui occuperont la première place de la révolution industrielle dans un proche avenir. L’Afrique ne doit pas rester à la traine.

La Banque africaine de développement a donné la preuve de son engagement en faveur du développement des compétences et de l’innovation. Que ce soit en créant des Centres d’excellence dans plusieurs universités africaines, au Nigeria, au Kenya et au Rwanda notamment, ou en investissant plus de $ 200 millions  dans des parcs technologiques en Ethiopie, à Cabo Verde et au Sénégal. L’Afrique doit mieux tirer parti de l’économie numérique. […]

L’industrialisation de l’agriculture au premier rang

“Pour aider l’Afrique dans son effort d’industrialisation, la BAD va concentrer son action sur quelques domaines essentiels.

“Premièrement, la Banque appuiera la promotion de l’industrialisation de l’agriculture, en mettant l’accent sur l’aide au développement de pôles de transformation des cultures de base, afin d’aider les agro-industries et industries connexes à s’implanter en milieu rural. Avec l’appui d’une infrastructure intégrée, qui inclue routes, électricité, eau et TIC, les pôles de transformation des cultures de base favoriseront l’essor de nouvelles zones de prospérité économique dans les économies rurales du continent.

“Deuxièmement, la Banque investira dans les nouvelles compétences requises pour l’industrialisation. Des pôles d’amélioration des compétences seront créées, pour aider les jeunes diplômés à entrer en contact avec les industries et les exposer à un large éventail de compétences dont celles-ci ont besoin. Nous offrirons un appui accru à la création de parcs technologiques et de programmes d’incubateurs et d’accélérateurs d’entreprises, afin de connecter les petites et moyennes entreprises aux pôles de croissance industrielle.

“Troisièmement, la Banque continuera de soutenir le secteur privé dans les industries essentielles, par le biais de prises de participations, notamment dans des petites et moyennes entreprises.

“Quatrièmement, la Banque continuera à soutenir le développement des marchés des capitaux, afin d’élargir l’accès aux financements dont les entreprises du continent ont besoin pour croître et prospérer.

“Enfin, la Banque joindra ses efforts à ceux de ses partenaires pour encourager la coopération Nord-Sud et Sud-Sud en matière de développement industriel, notamment dans les zones économiques spéciales, afin que l’Afrique tire les leçons de ce qui a fonctionné et évite certaines des erreurs que d’autres ont commises.”

­[…]

“C’est dans cet esprit que la Banque africaine de développement a créé avec ses partenaires une plateforme transactionnelle, pour amener les fonds de pension, les fonds souverains et d’autres investisseurs institutionnels mondiaux à investir massivement en Afrique. Ce nouveau marché de l’investissement pour l’Afrique, dénommé Forum pour l’investissement en Afrique, sera lancé du 7 au 9 novembre 2018 à Johannesburg, en Afrique du Sud. “

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