26 avril 2015 - 00:00 |
à Yaoundé

A l'image de la Côte d'Ivoire, le Cameroun envisage des prix administrés des café et cacao

Le Cameroun pourrait revenir à un système de prix garanti pour les filières cacao et café. La décision serait déjà prise au niveau du ministère de l'Agriculture mais le dossier devrait encore être soumis à l'approbation du chef de l'Etat. Ce qui ne serait pas chose acquise, souligne-t-on de source autorisée.

Les enjeux sont majeurs. Rappelons, tout d'abord, qu'à l'instar de nombreux pays africains, à l'exception du Ghana qui a toujours gardé un mécanisme de prix garanti pour ses café et cacao, le Cameroun avait dû libéraliser ses filières sous la pression de la Banque mondiale et du Fonds monétaire international (FMI). La Côte d'Ivoire, qui avait dû faire de même, est revenue à un système stabilisé et régulé en 2012. Le projet camerounais actuel serait d'ailleurs un véritable "copier-coller" du mécanisme de régulation ivoirienne, souligne une autre source.

Le dossier n'est pas sans susciter de polémiques. Si les excellentes performances de la  Côte d'Ivoire en matière cacaoyère, avec une production record attendue cette campagne, et pour la deuxième consécutive, aux alentours des 1,7 à 1,8 million de tonnes (Mt),  font envie au Cameroun qui tente de redresser ses filières, le retour à la stabilisation pourrait avoir certains écueils, ne manque-t-on pas de souligner. Parmi ceux-ci, la perspective d'une baisse du prix au planteur. Le prix élevé mondial du cacao permet au planteur camerounais de percevoir actuellement entre FCFA 1 200 et 1 400 le kilo bord champ alors que son homologue ivoirien perçoit un prix minimum, certes garanti, mais de "seulement" FCFA 850 le kilo actuellement pour la campagne intermédiaire.  

Quant au café, le prix bord champ au Cameroun est actuellement de FCFA 650 le kilo de Robusta, comme en Côte d'Ivoire,  et de FCFA 750 pour l'Arabica (FCFA 1100 FOB Douala). Au Togo, également libéralisé, le prix indicatif est de FCFA 600-650 mais les enchères bord champ font grimper les prix à FCFA 700-750. Au Gabon, le Grade 1 est à FCFA 500, le Grade 2 à 450 et le café lavé à FCFA 1200 le kilo.

"Le retour à un prix garanti au Cameroun entrainerait nécessairement une baisse du prix au planteur", affirme-t-on. "Globalement, les planteurs ne sont pas favorables à un retour au prix stabilisé", précise un représentant du secteur privé.

Et les non-partisans du prix stabilisé de faire le parallèle avec la Côte d'Ivoire : le prix garanti au planteur en Côte d'Ivoire étant calculé (60% au minimum) sur la base du prix mondial – principalement le marché à terme de Londres, si ce dernier chute, le prix garanti ivoirien chutera proportionnellement, comme celui du Cameroun. Mais le planteur camerounais continuera à percevoir davantage car il part, à la base, de plus haut. Quant au fonds de garantie pour les années moins fastes qui a été mis en place en Côte d'Ivoire, on s'interroge depuis le début, même en Côte d'Ivoire, sur sa pérennité si les prix venaient à chuter plusieurs années de suite.

Un tel retour à la stabilisation au Cameroun  ne serait pas sans provoquer beaucoup de confusion au sein des filières et sa mise en œuvre prendrait du temps, paralysant sans doute des projets et autres réformes, souligne-t-on encore, alors que le pays déploie actuellement des efforts importants pour redresser la qualité et les volumes tant en café qu'en cacao. D'autres réformes seraient plus salutaires, suggère-t-on, comme une réforme de l'Office national café cacao (ONCC) ou encore du Fonds de développement de l'épargne et du crédit ( Fodec).

Mais les tenants à un retour à des prix administrés ne sont pas, pour autant, à bout d'arguments. Tout d'abord, l'exemple édifiant de la Côte d'Ivoire et de sa remontée fantastique de production. Ensuite, la possibilité, grâce aux prix garantis, d'accéder à des pré-financements de campagnes sur les marchés internationaux. Enfin, entre autres arguments, une plus grande maîtrise des intervenants et du fonctionnement au sein des filières.

D'ailleurs, au Cameroun, le dossier est suivi de près par l'important et souvent influent réseau – tant décrié – représentant et lié aux "coxeurs", ces "intermédiaires" qui vont chercher bord champ le cacao et le café et qui sont critiqués par la profession, notamment le Conseil interprofessionnel du café cacao (CICC), pour leurs prix d'achat aux planteurs souvent bas. Des coxeurs qui sont, cependant "le symptôme et non la maladie" au sein de la filière, dit-on.

Un dossier à suivre….

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