Le Carreau du Temple à Paris, à l’heure de la cuisine africaine

 Le Carreau du Temple à Paris, à l’heure de la cuisine africaine
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Pour sa quatrième édition, le Food Temple ou le festival des cuisines, a mis à l’honneur le week-end du 26/27 septembre au Carreau du Temple à Paris l’art culinaire africain à travers ses chefs,  ses produits du terroir, sa culture. Une cuisine mais aussi une richesse et diversité de produits encore largement méconnues. « Je suis convaincue que l’Afrique a encore une mine d’or à apporter au marché de l’agro-industrie, de la pharmacie et de la cosmétique dans les années à venir car nous disposons de merveilles non encore connues sur le marché international » affirme la jeune entrepreneuse Aïssata Diakité à la tête de l’’entreprise Zabbaan.

Sous la verrière du Carreau du Temple, le visiteur a pu faire ses emplettes au marché de producteurs et d’artisans, déguster des plats africains – des traditionnels du mafé ou cornes de gazelles jusqu’à la glace au poivre de Penja -, apprendre à cuisiner lors d’ateliers le gombo, le manioc, le gari foto, le Mbouraké coco, etc. et suivre des masters class par des grands chefs comme Clarence Kopogo et les feuilles de Gnetum, Rougui Dia et son risotto à la sénégalaise, Christina Abégan et ses pâtes de niébé, Pierre Siewe et le Djansan, Harouna Sow et le Thiakry ou encore Fatou Meite révisant le cheescake et Moualye Fanny alliant maïs et café.

 

Transformer en Afrique

Les Africains, eux-mêmes, doivent aussi partir à la redécouverte de leurs produits, comme le mil, le sorgho ou le niébé et ne plus consommer du blé, se les réapproprier et délaisser les produits importés, transformés, bourrés de glutamate et souvent mauvais pour la santé souligne le chef camerounais Christina Abégan lors d’une table ronde organisée la Maison de l’Afrique et le Conseil présidentiel pour l’Afrique (CPA) sur le thème « Afrique, terres (s) fertiles (s). Pour développer une culture culinaire, l’Afrique doit aussi transformer ses produits et la jeunesse doit s’y impliquer totalement, ajoute- t-il.

A l’image d’ Aïssata Diakité qui se définit comme une ambassadrice du Made in Africa, une Afrique qui valorise ses produits agricoles sur toute la chaîne de valeur. Originaire de Mopti, elle le fait en fabricant au Mali des jus de fruits, des tisanes et des confitures à partir de fruits, racines, feuilles, tiges, fleurs locales comme le kinbéliba, le moringa, le tamarin, l’hibiscus ou le baobab mais aussi le fruit zaban issu d’une liane sauvage, dont est tiré le nom de son entreprise. Elle a démarré en structurant et organisant les filières. Aujourd’hui, elle compte plusieurs milliers de petits exploitants pour une vingtaine de filière. « Il est difficile d’entreprendre sur le continent car les consommateurs ont toujours vu des produits importés en face d’eux. Lancer une marque au niveau local demande beaucoup de travail » souligne Aïssata Diakité. En outre, disposer de machines qui correspondent aux matières premières africaines, d’étiquettes ou d’emballage relève d’un véritable challenge. Sans parler du financement, largement inaccessible, et plus compliqué encore quand on est une femme et jeune.

 

Comment financer ?

L’investissement a été progressif, près d’un million d’euros depuis 2012, et financé par ses propres économies, les prix qu’elle a gagné lors de concours, les fonds de garantie. Les banques pratiquent des taux très élevés et souvent manquent de compétences technico-commerciales, remarque-telle. Quant à la diaspora, les fonds sont encore majoritairement investis dans le social et elle estime qu’il faudra encore des années pour qu’ils se dirigent vers le secteur privé. En revanche, elle table sur les tontines classiques mais au niveau des entreprises.

Hervé Bourguinon partage ce sentiment de frilosité des investisseurs vis-à-vis du secteur agricole même si cela commence à changer. «C’est un patient capital » (ndrl un rendement à long terme) affirme le co-fondateur du Fonds Moringa, un véhicule d’investissement fondé à l’initiative de la Banque Edmond Rothschild avec la filiale internationale de l’Office national des forêts (ONF) avec l’idée de financer des projets agro forestiers en Afrique et en Amérique latine à partir du système paysan et en créant de la valeur ajoutée en construisant des usines de transformation près des lieux de production. Plusieurs projets ont été financés en Afrique de l’Ouest, au Mali (Lire : Le fonds Moringa investit dans la société de boissons Sobema au Mali), au Togo (Lire : L’usine de jus d’ananas de Jus Délice au Togo est ouverte), au Ghana (Le fonds Moringa investit $5 millions dans B-Bovid au Ghana) ou encore au Bénin dans la noix de cajou avec Tolaro Global.

Il recommande de viser à la fois les marchés locaux/régionaux mais aussi internationaux. Car si un certain nombre d’obstacles doivent être surmontés, au niveau des normes, de la certification par exemple, les marchés d’exportation sont plus rémunérateurs. Parmi les freins pour investir dans l’agriculture, il mentionne aussi le franc CFA, tout en ajoutant que la dépréciation des monnaies dans des pays comme le Ghana ou le Nigeria n’est pas enviable, et le manque de soutien des administrations.

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