La Chronique Matières du Jeudi (29/06/2017)

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Les marchés de matières premières ont encore été sous le diktat des devises cette semaine. Mercredi, on a assisté à une hausse généralisée sur les matières agricoles comme sur les minières et le pétrole face à un dollar qui perdait des couleurs, tandis que le cacao, jeudi, glissait sur une livre sterling au plus haut de ces dernières semaines. On retrouve aussi de façon particulièrement prégnante cette semaine ces considérations monétaires au Brésil mais aussi en Inde sur le sucre. Des situations qui interrogent toujours sur les monnaies et leur impact sur les matières premières des pays producteurs/exportateurs (lire l'interview de Karim El Aynaoui du 23 juin). Certains marchés sont fermés pour célébrer l'Aïd El Fitr.

CACAO

C'est le forte remontée de la livre sterling hier qui a fait perdre encore £ 24 au cacao à la clôture hier soir, terminant ainsi la période sous revue à £ 1 473. En effet, mercredi le gouverneur de la Banque d'Angleterre, Mark Carney, a annoncé qu'une hausse prochaine des taux était probable car l'économie tournait quasiment à pleine capacité. Suite à cette annonce, les investisseurs se sont rués sur la livre sterling, la faisant grimper hier soir à $ 1,30, son niveau le plus élevé depuis le 25 mai, soit avant les élections parlementaires du Royaume.

Le marché à terme de New York a emboîté le pas de Londres à la baisse, enregistrant -$ 23 à $ 1 861 la tonne en clôture hier soir, jeudi. Un marché global, à Londres comme à New York, qui est estimé totalement survendu par nombre de négociants, ce qui pourrait montrer que le sentiment baissier des spéculateurs commence à s'estomper.

Vendredi dernier, la tonne de cacao cotait $ 1,879 à New York et £ 1 518 à Londres.

En Côte d'Ivoire, les fortes pluies et un ensoleillement insuffisant endommagent les cabosses et inondent les plantations, soulignent les producteurs, ce qui pourrait impacter les volumes de la campagne intermédiaire actuellement en cours. Les arrivages de fèves aux deux ports ivoiriens d'Abidjan et de San Pedro ont atteint 1 689 000 tonnes (t) au 25 juin et ce, depuis le début de la campagne, contre 1 420 000 t sur la même période la campagne précédente, selon les exportateurs. Sur la semaine dernière, du 19 au 25 juin, les arrivages ont totalisé 19 000 t contre 20 000 t sur la même période la campagne dernière.

Au Ghana, les exportateurs estiment que 80 000 t de cacao sont entrées en fraude de Côte d'Ivoire depuis le début du mois d'avril, soit depuis le démarrage de la campagne intermédiaire en Côte d'Ivoire et l'abaissement du prix garanti au planteur à FCFA 700 le kilo ou encore $ 1 190 la tonne. Le Ghana, quant à lui, n'a pas modifié son prix au planteur, à $ 1,914 la tonne lors de l'ouverture de sa propre campagne intermédiaire le 9 juin, l'écart de prix entre les deux leaders mondiaux du cacao grimpant alors à environ $ 700 la tonne (lire nos informations). Un trafic qui pourrait atteindre un total de 120 000 t sur la campagne 2016/17 et qui expliquerait, en bonne partie, les bonnes performances du Ghana à l'export (lire nos informations). Rappelons que le Ghana a produit 882 175 t sur sa campagne principale qui s'est achevée le 18 mai, son volume le plus élevé en six ans, et sur la campagne intermédiaire elle pourrait même atteindre 100 000 t, a expliqué un membre du Cocobod à Reuters la semaine dernière. Jusque là, les volumes de la campagne intermédiaires étaient estimés à 70 000 t. Ce même responsable précisant à l'agence de presse que les contrôles aux frontières avaient été renforcés.

Au Cameroun, le prix bord champ sur ce mois de juin qui s'achève aura été un des plus bas de ces récents mois, ont souligné hier des producteurs et exportateurs. Un prix au planteur qui est totalement libéralisé au Cameroun et qui, par conséquent, suit le cours mondial. Sur ce mois de juin, il est de moitié son niveau d'il y a un an, oscillant entre FCFA 650 à Mamfe ou encore Konye dans la région du sud-ouest, à FCFA 850 à Mbalmayo et Emana dans la région du Centre.

CAFÉ

On commence à craindre un déficit mondial d'Arabica, ce qui a permis à cette variété de café de terminer en hausse à la clôture jeudi soir, à New York, à $ 1,2635 la livre contre $ 1,23 vendredi dernier. Quant au Robusta, il a également terminé en hausse sur le marché à terme de Londres jeudi soir à $ 2 132 la tonne contre $ 2 078 en fin de semaine dernière. A noter que le marché en Indonésie est fermé hier et aujourd'hui pour célébrer l'Aïd El Fitr.

En effet, selon un rapport de Marex Spectron, le prix actuel des Arabica reflète l'excédent sur 2016/17 mais en 2017/18, il est fort possible que le marché mondial soit déficitaire. Marex estime à 4,4 millions de sacs de 60 kg (Ms) le déficit en 2017/18 alors que 2016/17 est attendue en excédent de 0,9 Ms. La production mondiale est estimée atteindre 152,4 Ms contre 155,5 Ms la campagne précédente. Car la pluviométrie dans les régions de production de l'Arabica a été en deçà de la moyenne durant les trois derniers mois de la croissance des cerises. Une production qui se déclinerait en 38,5 Ms d'Arabica et 11,5 Ms de Robusta. Au Vietnam, leader mondial du Robusta, Marex estime la production à 28 Ms contre 24,5 Ms en 2016/17. Par conséquent, la production de Robusta augmenterait de 4 Ms mais demeurerait déficitaire.

Le Vietnam, dont les exportations chuteraient de 15,5% durant le premier semestre par rapport à la même période en 2016, selon les autorités gouvernementales.

Au Brésil, 44% des superficies caféières étaient récoltées au 27 juin contre 47% à la même période l'année dernière et 45% sur une moyenne de 5 ans, selon le consultant Safras & Mercado. La récolte d'Arabica est à 35% faite contre 32% en moyenne sur les 5 ans, et celle de Robusta à 75% contre 88% l'année dernière et 80% en moyenne.

CAOUTCHOUC

Après avoir terminé en recul de 6% la semaine dernière à 189,3 yens ($1,70) le kilo à Tokyo,  les cours du caoutchouc ont enchainé trois séances de hausse pour clôturer mercredi à 199,2 yens ($1,68) le kilo pour une livraison en décembre. Un gain qui s’explique par la reprise des cours du pétrole, une augmentation des contrats à terme à Shanghai et un yen plus faible par rapport au dollar. Mais les inquiétudes sur une offre excédentaire en Asie ne se sont pour autant pas dissipées.

Les cours sur le marché de Shanghai pour une livraison septembre ont grimpé mercredi de 285 yuans à 13 080 yuans ($1 928) la tonne, soutenus par l’amélioration de l’économie chinoise au second trimestre.

Au Japon, les stocks de caoutchouc brut dans les ports se sont élevés à 4 999 tonnes au 20 juin, en hausse de 5,8% par rapport à la dernière date d'inventaire selon les données de l'Association du commerce du caoutchouc du Japon.

En Inde, le Rubber Research Institute of India (RRII) a créé l’application RubSIS sur Smartphone pour optimiser l’efficacité des engrais sur les plantations de caoutchouc (cf. nos informations).  

COTON

Les cours du coton se sont très légèrement appréciés en ce début de semaine après avoir clôturé à un plus bas de 10 mois vendredi dernier à 67,02 cents la livre pour le contrat de décembre. C’est la troisième semaine consécutive de baisse, le contrat de décembre perdant 6% de sa valeur. Le marché est en liquidation mais la baisse pourrait s’arrêter (cf. nos informations). Mercredi, ils clôturaient à 67,65 cents la livre avec des volumes échangés faibles.

En Inde, premier producteur mondial, la production de coton pourrait atteindre 37,5 à 38 millions de balles en 2017/18 contre 34,1 millions en 2016/17, a estimé le président de la Cotton Association of India, Nayan Mirani. Ce sera alors la plus grosse production depuis 3 ans. La superficie pourrait s’accroître de 10% suite à des prix locaux élevés. En revanche, pour la campagne 2016/17, les exportations reculeront probablement de 17% à 6 millions de balles.

Par ailleurs, des milliers d’usines et de commerçants dans le textile à travers le pays sont en grève cette semaine pour protester contre l’introduction de la taxe sur les biens et services (GST) qui entrera en vigueur le 1er juillet. Annoncée comme la plus grande réforme fiscale en 70 ans, la GST (Goods and Services Tax), elle remplacera environ 20 taxes fédérales, étatiques et locales. La taxe sur la fibre de coton, le fil et le tissu est fixée à 5% (elle est nulle aujourd’hui) et celle sur les vêtements à 12% contre 6-7%.

Au Bénin, une mission d’audit de la filière coton sur trois campagnes (2013/14 à 2015/16) relève de graves dysfonctionnements dans la gestion de la filière ce qui porte un lourd préjudice à l’Etat (cf. nos informations).

Human Rights Watch et le Forum ouzbéko-allemand dans un rapport « « We Can’t Refuse to Pick Cotton’: Forced and Child Labor Linked to World Bank Group Investments in Uzbekistan» publié le 28 juin accuse la Banque mondiale de financer des projets agricoles en Ouzbékistan qui sont liés au travail forcé des enfants à hauteur de $500 millions.

HUILE DE PALME

La perspective d’une hausse de la production pèse toujours sur le marché de l’huile de palme. Surtout qu’avec la fin du Ramadan, la saignée des arbres devrait être plus active. Après avoir clôturé en baisse vendredi, la Bursa Malaysia Derivatives Exchange, qui n’a rouvert que le 28 juin, a clôturé en légère baisse à 2 440 ringgits ($567,97) la tonne, la hausse du prix du pétrole et un ringgit plus faible ne sont finalement pas parvenus à soutenir les cours.

Les données officielles les plus récentes du Conseil de l'huile de palme de Malaisie ont montré que la production a progressé de 6,9% en mai à 1,65 million de tonnes (Mt) par rapport au mois précédent. En Indonésie, premier producteur mondial, elle a probablement augmenté en mai pour atteindre 3,38 Mt contre 2,9 Mt en avril, selon un sondage réalisé début de juin par Reuters.

En Indonésie, un rapport du ministère de l’Energie et des ressources minérales (MEMR) estime que la production de biodiesel a atteint 3,656 milliards de litres en 2016 tandis que la consommation s’est élevée à 3,008 milliards de litres et les exportations à 478 millions de litres. Le département américain de l’Agriculture (USDA) estime que la production devrait chuter à 2,9 milliards de litres en 2017 pour rebondir à 3,3 milliards de litres en 2018. Du côté de la demande, les exportations devraient décliner à 200 millions de litres en 2017 et se maintenir à ce niveau en 2018.

RIZ

Tendance au ralentissement des prix cette semaine dans les trois pays d’Asie après un mois de juin où les prix ont grimpé avec en toile de fonds les perspectives d’exportation au Bangladesh. Rappelons que les prix en Thaïlande ont atteint un sommet de 4 ans ce mois-ci tandis ceux du Vietnam se sont envolés jusqu’à un plus haut de plus de 2 ans.

En Thaïlande, le Thaï 5% s’est établi à $432- $440 $ la tonne contre $450- $460 la tonne la semaine dernière, après une hausse constante depuis mars. Les prix élevés semblent décourager les acheteurs dans l’attente d’une baisse de prix.

La Thaïlande pourrait atteindre les 10 millions de tonnes (Mt) de riz exportées cette année estime le président d’honneur de l’Association thaïlandaise des exportateurs de riz, Chookiat Ophaswongse. En 2016, elle avait exporté 9,63 Mt, selon les chiffres du Commerce. La demande est forte tant de la part du Bangladesh, que des Philippines mais aussi du Moyen-Orient, Irak et Iran. Pour le président, l’écart de prix entre la Thaïlande et le Vietnam (respectivement $450-$460 et $400-$420 la tonne du riz 5% de brisures) n’est pas préoccupant car le riz thaïlandais est de meilleur qualité. « Tant que notre prix se situe à environ $450 la tonne, nous allons bien » a-t-il déclaré. Le pays a djà exporté 5,9 Mt de riz jusqu’à maintenant.

Au Vietnam, le VIET 5% se situait à $410- $415 la tonne contre $400- $420 la tonne la semaine dernière. « Le marché a été assez calme en raison des prix élevés et d’une offre limitée face à une demande étrangère croissante. Des offres ont été faites, des questions posées mais en définitive elles se sont très peu concrétisées en commerce réel », a déclaré un négociant basé à Ho Chi Minh-Ville.

Les exportations de riz du Vietnam devraient grimper de 13,5% au premier semestre 2017 à 2,96 millions de tonnes et pour une valeur de $1,31 milliard, en hausse de près de 12% par rapport au premier semestre 2016, selon le gouvernement.

En Inde, le prix du riz étuvé 5% de brisure a diminué de $3 la tonne à $421-$424. « Le marché a progressé en attendant une forte demande du Bangladesh, mais au niveau supérieur, les acheteurs africains réduisent leurs achats », a déclaré un exportateur basé à Kakinada dans l'État sud de l'Andhra Pradesh.

SUCRE

Après une chute au plus bas en seize mois mercredi soir, le prix du sucre roux s'est ressaisi jeudi, gagnant 5,8%, pour clôturer à 13,5 cents la livre (lb). Une hausse liée, essentiellement, à des couvertures spéculatives à court terme. Le sucre blanc, quant à lui, a terminé jeudi soir également en hausse, à $ 399,70 la tonne. Ceci dit, le début de la semaine a été plus que morose pour l'édulcorant, ne cessant de baisser au fil des jours.

Le sucre qui, lui aussi, a été impacté par les questions monétaires, le real, la monnaie brésilienne, perdant de sa valeur mardi après que le président Michel Temer ait été accusé de corruption passive. Rappelons qu'un real affaibli incite les producteurs à exporter davantage de sucre car il devient encore plus compétitif puisqu'il est négocié, comme la plupart des autres matières premières, en dollar.

Autre facteur baissier, le temps très sec au Brésil ce qui fournit les conditions idéales pour la récolte de la canne à sucre chez le premier producteur et exportateur mondial, le Brésil. Et selon les servi ces météorologiques, ce temps devrait durer encore une semaine dans la région sucrière majeure qu'est le Centre-Sud. A noter que la région centre-sud a produit 2,379 Mt durant la première moitié de juin par rapport à 1,754 Mt sur les deux semaines précédentes, a annoncé mercredi le groupe dédié à la canne à sucre Unica. Les unités ont broyé 34,408 Mt de canne contre 31,587 Mt.

Cette baisse des cours internationaux pourrait conduire l'Inde à davantage importer prochainement. Selon le négoce interrogé par Reuters, le prix du sucre importé, dont la taxe de 40%, est d'environ 32 000 roupies ($ 496) la tonne, soit 8% de moins que le sucre local qui est à 34 600 roupies. En outre, la fermeté de la monnaie du premier consommateur mondial -la roupie a gagné 5% face au dollar depuis le début de l'année- rend encore plus intéressant le sucre venant de l'extérieur et qui se négocie en dollar. Rappelons qu'en avril, le gouvernement a autorisé l'importation de 500 000 t de sucre sans droit de douane jusqu'à fin juin, et pourrait renouveler ceci sur encore deux mois. Ceci permet de maintenir le prix du sucre assez bas sur le marché local alors que la production nationale est attendue en baisse de 5 Mt cette campagne, à 20,3 Mt.

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