L’agriculture au Sahel en filigrane de la politique diplomatique et sécuritaire d’Emmanuel Macron

 L’agriculture au Sahel en filigrane de la politique diplomatique et sécuritaire d’Emmanuel Macron
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Face aux ambassadeurs de France réunis hier, le président Emmanuel Macron a dressé sa feuille de route de la diplomatie française. “Continent d’avenir“, l’Afrique, notamment le Sahel, a tenu une place majeure dans la description de ses priorités que sont la sécurité, la lutte contre le “terrorisme islamiste“, les réfugiés. Un plan de bataille dans lequel, en filigrane, on trouve l’agriculture au Sahel.

 

Hier, en France, à l’occasion de la conférence annuelle des ambassadeurs, le président français, Emmanuel Macron, a annoncé donner la priorité à la sécurité des Français et donc à la lutte contre le terrorisme dans deux grandes zones au monde, l’une d’elles étant le Sahel et la Libye.*

Au Sahel, a-t-il expliqué, cette lutte se décline, d’une part, par une “présence militaire” mais qui “n’a de sens que dans le cadre d’un travail politique en profondeur” allant au-delà de “la mise en œuvre de l’accord de paix d’Alger, tout particulièrement en ce qui concerne la situation interne au Mali“, mais aussi, en “faisant davantage sur le volet du développement“.

“[…]ce fut le sens de mon déplacement à Bamako, accompagné de la ministre des Armées et du ministre des Affaires étrangères, nous avons lancé une alliance pour le développement du Sahel avec nos principaux partenaires en juillet dernier “, a déclaré hier le président Macron.

L’agriculture, priorité du G5

Et l’agriculture ne serait pas oubliée. En effet, rappelons que le 3 juillet dernier, lors de la conférence de presse commune des présidents français et maliens, Emmanuel Macron avait cité l’agriculture parmi les secteurs bénéficiaires d’une enveloppe spéciale de € 200 millions en faveur du G5 Sahel. Ainsi, la France entend s’engager, avait-t-il dit début juillet, “pour développer justement les initiatives d’accompagnement de la composante militaire de notre intervention. Une initiative spécifique sur les pays du G5 Sahel mobilisera 200 millions d’euros spécifiquement pour les pays du G5. Elle apportera avec des moyens additionnels en subventions, des initiatives transfrontières centrées sur les zones de crise, les projets à impact rapide aussi bien que les actions de moyen et plus long terme qui sont structurantes et qui sont centrées sur les priorités que j’évoquais tout à l’heure dans ma déclaration, éducation, agriculture, énergies renouvelables principalement. L’AFD est pleinement mobilisée dans ces initiatives“.

Hier, devant les ambassadeurs de France, après avoir évoqué la “crise migratoire” et la nécessaire distinction -voire tri- à faire entre “les migrants économiques et les réfugiés” qui sera dorénavant effectuée sur place, en Afrique, en collaboration avec le HCR,  le président français a tenu à préciser que “l’Afrique n’est pas seulement le continent des migrations et des crises, c’est un continent d’avenir, c’est aussi, à ce titre, que nous ne pouvons pas le laisser seul face à ses défis démographiques, climatiques, politiques, nos entreprises, nos étudiants, nos chercheurs, nos artistes doivent s’y intéresser.

Sara Toumi, “la Dame des acacias”, au nouveau Conseil présidentiel pour l’Afrique

Et le chef de l’Etat d’annoncer la création d’un Conseil présidentiel pour l’Afrique (CPA). “Structure inédite, tournée vers les attentes de nos jeunesses“,  “Ce Conseil transformera la gouvernance de la politique africaine en réunissant auprès de moi un groupe de personnalités engagées et issues de la société civile. L’Afrique l’illustre parfaitement, une politique étrangère désireuse de rétablir la sécurité doit activer trois grands leviers, presque concomitamment, ces leviers sont ce que j’appelle en quelque sorte les trois D, Défense, Développement et Diplomatie. Le Sahel est un excellent exemple de cette combinaison des leviers d’action, mais cela vaut partout.

 

Pour l’instant, le CPA est composé de onze membres, bénévoles, très diversifiés, français et africains**. Un de ces membres s’intéresse à l’agriculture, notamment à travers ses combats contre la désertification et pour l’émancipation des femmes : Sarah Toumi, franco-tunisienne de 30 ans, épouse d’un agriculteur. Elle est surtout connue pour son projet Acacias pour Tous -d’où son surnom “La Dame des acacias”- monté en 2012 en Tunisie : une centaine de milliers d’arbres a été plantée et une pépinière créée, permettant aux femmes de récolter et vendre la gomme arabique.

 

Plus innovant, elle a recruté 13 agriculteurs-ambassadeurs en Tunisie, chargés de diffuser les bonnes pratiques de la permaculture, de l’agroforesterie et du moringa souvent surnommé l'”arbre de vie” en raison de ses nombreuses vertus. Elle s’est lancée aussi dans des projets d’irrigation au goutte à goutte, de dessalement de l’eau ainsi que dans des projets agro-industriels, notamment la transformation des feuilles de moringa  en huile, décrivait Le Monde en décembre dernier.

 

Ces projets originaux et son association Dream in Tunisia lui ont valu d’obtenir, fin 2016, une bourse d’Ashoka et une autre d’Echoing Green, deux ONG américaines soutenant les entrepreneurs sociaux. A la fin de l’année dernière, elle a remporté successivement le prix de “La France s’engage au Sud” et le “Rolex Awards for Enterprise”. « Avec l’argent de Rolex, je vais acheter 500 kg de graines de moringa, prévoit-elle, construire un centre de formation pour agriculteurs et équiper trois hectares pour tester toutes sortes d’espèces et de systèmes d’irrigation”, rapportait Le Monde en décembre dernier.

 

* Pour le discours intégral : http://www.elysee.fr/declarations/article/discours-du-president-de-la-re…

**Jean-Marc Adjovi-Boco, franco-béninois, 54 ans, ancien sportif et entrepreneur ; Jules-Armand Aniambossou, franco-béninois, 55 ans, directeur général Afrique et Outre-Mer du groupe Duval ; Diane Binder, française, 37 ans, directrice adjointe du développement international du groupe Suez ; Yves-Justice Djimi, français, 36 ans, avocat ; Liz Gomis, française, 36 ans, journaliste et réalisatrice ; Jeremy Hadjenberg, français, 43 ans, directeur général adjoint chez I & P ; Yvonne Mburu, kényane, chercheuse et consultante en santé/membre de la première promotion des Young Leaders d’Africa France ; Vanessa Moungar, franco-tchadienne, 33 ans, directrice genre, femmes et société civile à la Banque africaine de développement ; Nomaza Nongqunga Coupez, sud-africaine, 36 ans, entrepreneuse dans la culture ; Karim Sy, franco-libano-malien, 49 ans, entrepreneur dans le numérique ; Sarah Toumi, franco-tunisienne, 30 ans, entrepreneuse.

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