Sicot : tirer le meilleur profit du coton burkinabè

 Sicot : tirer le meilleur profit du coton burkinabè
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Durant trois jours et trois nuits, le berceau de l’industrie textile au Burkina Faso, Koudougou, a vécu au rythme du coton et de sa transformation avec la tenue du 27 au 29 septembre du premier Salon international du coton et du textile (Sicot), réunissant environ un millier de professionnels de la chaîne de valeur du coton. Une forte volonté politique s’est affichée qui suscite beaucoup d’espoir dans la troisième ville du pays où l’industrie a été sinistrée.

On le dénomme fréquemment l’or blanc. Matière première primordiale pour nombre d’économies d’Afrique de l’Ouest, en particulier pour le Burkina Faso, dans la structuration du mode rural, l’emploi et sa contribution aux recettes d’exportation mais le potentiel du coton est très largement sous-estimé. Le valoriser pour créer de la valeur ajoutée et générer des emplois est l’ambition affichée du Burkina Faso où moins de 3% de la production est transformée. Les exportations de coton brut au Burkina génèrent environ $450 millions (€388,6 millions) par an. Or, on gagne 50% de la valeur ajoutée si l’on file le coton, 75% si on le tisse et 90% si on passe à la confection. Sans compter que le pays dépense chaque année environ FCFA 80 milliards (€121,6 millions) en importations de textile.

« Je tiens à rassurer les filles et les fis de la région centre ouest que mon engagement en faveur d’une industrie textile florissante et créatrice d’emplois à Koudougou sera bel et bien respecté » a déclaré le chef de l’Etat, Roch Marc Christian Kaboré, qui se rendait pour la première fois à Koudougou depuis sa prise de fonction, à l’ouverture du Sicot.

Investisseurs Turcs, Japonais, Indiens dans les starting blocks

La promesse de campagne du président Roch Kaboré pourrait se concrétiser et de ne pas rester sans suite comme d’autres par le passé. Les investisseurs ont répondu présents au Sicot. Parmi ceux-ci bien sur la société turque Ayka Textile, dont la future construction de l’usine textile à Ouagadougou (cf. nos informations) avait suscité la colère de Koudougou. « Le tour de table définitif du financement du projet est attendu dans une dizaine de jours » affirme à CommodAfrica le conseiller spécial du président, Stéphane Ouédraogo. Les bailleurs de fonds ont donné leur accord pour le financement de 70% de l’investissement, qui s’élève à environ $400 millions y compris la centrale thermique. Parmi ceux-ci l’Afreximbank et la Banque africaine de développement (BAD). Le solde de l’investissement est financé par les actionnaires dont l’Etat burkinabè et des privés burkinabè. « La mobilisation des ressources doit se passer pour la première tranche fin 2018 et pour la deuxième tranche au 1er trimestre 2019 », précise le conseiller. D’un seul site de production dans la zone industrielle de Ouagadougou dédié à l’exportation, le projet d’Ayka Textile devrait voir également la réalisation d’une unité à Koudougou avec 1 000 emplois à la clé et à Bobo Dioulasso (plus de 1 500 emplois), unités plutôt orientées vers le marché local et régional. Enfin, la Sofitex jouera sa partition avec la fourniture de 20 à 25 000 tonnes de coton par an à un prix négocié.

D’autres projets d’industries textiles à Koudougou, dont la reprise de l’emblématique de l’ex Faso Fani, sont aussi dans l’escarcelle avec des investisseurs indiens et japonais. « Nous voulons bâtir une unité textile du filage aux vêtements au Burkina Faso pour l’exportation vers les Etats-Unis, l’Europe, l’Australie, Canada et le Japon en bénéficiant des exceptions de droits de douanes. Les produits bénéficieront d’un coût moindre et d’une bonne qualité. Nous sommes en négociations avancées avec le gouvernement et nous devrions commencer la production dans l’année à venir » a précisé à CommodAfrica, Tarun Jain, président des Associations des industriels du textile de l’Etat du Punjab en Inde. Une délégation du japonais Marubeni Corporation était aussi présente au Sicot avec le projet de monter une filature à Koudougou.

Des projets qui devront encore trouver leur accès au marché, un des défis les plus importants selon Abdelkader Kadi, programme development expert à l’Onudi.

Au delà du textile

Si bien sur en termes d’emploi et de valeur ajoutée créé, le textile arrive en tête, la transformation artisanale est une tradition très ancienne au Burkina Faso et on dénombre environ 50 000 tisserands à travers le pays largement présents dans le secteur informel (nous y reviendrons dans nos prochaines éditions).

Signalons aussi la création par Céline Kontyaré-Kobeané de la Société de fabrication de coton du Burkina (Socafob) qui fabrique depuis juillet 2016 du coton médical hydrophile. Sur une plus petite échelle et dans un autre domaine, Émilie Kyedrebeogo, à la tête de la startup Palobdé Service, qui a bénéficié du Fonds commun Genre (FCG) en faveur de l’entreprenariat féminin, a lancé les serviettes hygiéniques lavables, Palobdé, à base de produits locaux dont le Faso Dan Fani. Émilie Kyedrebeogo veut lever le tabou des menstrues qui empêchent une fille sur dix d’aller à l’école  durant ses règles et favoriser l’hygiène menstruelle. Et puis, l’entreprise vosgienne Tenthorey, qui a lancé le concept du sac-citoyen, s’approvisionne en fil de coton auprès de la seule unité industrielle de transformation du coton du fil de coton, la filature du Sahel (Filsah), pour fabriquer ses sacs en coton bio-équitable pour de grandes enseignes et tout récemment l’Elysée.

Une dynamique est enclanchée. Elle devrait se poursuivre avec une nouvelle édition du Sicot programmée du 30 et 31 janvier 2020.

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