Au Centre d’excellence de l’Université Houphouët-Boigny, les préoccupations des agriculteurs deviennent des sujets de doctorat

 Au Centre d’excellence de l’Université Houphouët-Boigny, les préoccupations des agriculteurs deviennent des sujets de doctorat
Partager vers

Selon François Kouamé N'Guessan, enseignant-chercheur, la création en 2015 d'un Centre d'excellence à l'Université Félix Houphouët-Boigny  (CEA – lire l'interview d'Andreas Blom et de Kokou Tona) a permis de réviser en profondeur les curricula et de développer une spécialisation dans la diversité biologique et l'adaptation de l'agriculture aux changements climatiques. Des formations courtes et de terrain auprès des agriculteurs ont pu être lancées.

Au-delà, l'Université a pu accroître le nombre d'étudiants en doctorat et en master, a expliqué François Kouamé N'Guessan à CommodAfrica lors du 6ème atelier du projet CEA qui s'est tenu le 15 novembre à Abidjan.

 

Comment l'Université Félix Houphouët-Boigny a-t-elle été choisie comme Centre d'excellence ?

Le programme de Centres d'excellence de l'enseignement supérieur en Afrique a été lancé en 2012 par la Banque mondiale mais la Côte d'Ivoire était alors en crise et nous n'avons pas pu postuler. Mais en 2014, à l'occasion de sa visite à Washington, le Premier ministre Daniel Kablan Duncan a demandé à la Banque mondiale que la Côte d'Ivoire puisse postuler à ce projet et la  Banque mondiale a accédé à cette demande.

Nous étions sept centres ivoiriens à soumettre un dossier. Cinq ont été présélectionnés, puis, après une visite de terrain, trois centres ont été acceptés en 2015 pour être promus au rang de Centre d'excellence : deux grandes écoles dont l'Ecole nationale supérieure de statistique et d'économie appliquée à Abidjan et l'Institut national polytechnique à Yamoussoukro, économie et statistiques, ainsi qu'une université classique. Et c'est nous, l'Université Félix Houphouët-Boigny à Abidjan, qui avons été sélectionnés comme l'université classique.

Que vous apporte le programme de Centre d'excellence régional ?

Nous avons une Ecole doctorale au sein de l'université Félix Houphouët-Boigny qui  formait depuis 2012 des doctorants en matière de changement climatique et de biodiversité dans le cadre d'un projet allemand couvrant 10 pays d'Afrique de l'Ouest. Ce projet avait pour objet de former 10 doctorants chaque année dans toute la sous-région, avec un doctorant par pays.

Mais avec le Centre d'excellence, c'est nous maintenant qui fixons le nombre d'étudiants que nous voulons former dans le domaine. Nous avons aussi ajouté un volet agriculture durable en lien avec les changements climatiques, ce qui n'existait pas auparavant.

En outre, nous ne nous limitons plus à la formation de doctorants. Nous prenons des étudiants en formation de Master et nous avons aussi développer des formations de courte durée comme le renforcement des capacités des paysans. Car, auparavant,  l'école doctorale se limitait à former des doctorants. Maintenant, avec le Centre d'excellence, nous rencontrons les paysans pour voir quelles sont leurs préoccupations à l'égard des changements climatiques. Nous prenons en compte ces préoccupations que nous transformons en sujet de recherche.  Donc les préoccupations des agriculteurs deviennent les sujets des doctorants.

Nous avons même signé un MOU avec une coopérative de production de cacao pour prendre en compte toutes leurs préoccupations : maladies des cacaoyers, vieillissement des vergers, etc.

Donc nous avons élargi notre champ d'application et nous avons plus d'étudiants. Ainsi, au lieu de former chaque année 10 doctorants, en un an nous avons recruté plus de 40 doctorants et autant d'étudiants en Master dont 30 viennent de la sous-région.

Mais vous auriez pu faire ceci de toute façon. En quoi avoir intégré le Centre d'excellence a changé quelque chose?

Avec la création du Centre d'excellence, on a révisé nos curricula. Car les curricula qui existaient remontaient à 1960 et donc n'étaient pas adaptés aux réalités actuelles.  Ils avaient été élaborés à partir de réflexions académiques.

Maintenant, nous inversons la tendance. Nous partons de constats de terrain des préoccupations de la communauté, nous recensons leurs problèmes mais aussi leurs attentes par rapport à la recherche, et nous en faisons notre affaire pour pouvoir répondre à leurs préoccupations.

Faire partie des Centres d'excellence vous donne-t-il plus de moyens pour atteindre vos objectifs ?

On a plus de moyens financiers, plus de matériel technique. On est en train d'acheter du matériel que nous n'avions pas pour faire des analyses de sol. Nous étions obligés d'aller dans d'autres pays, notamment en Europe pour pouvoir faire ses analyses. Grâce au Centre d'excellence, nous faisons ces analyses sur place. Et ce sont des équipements qui vont rester après le projet.

 

Autres Articles

Leave a Reply

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *