Les acteurs ivoiriens du cacao plaident pour leur survie face aux primes de cacao certifié durable

 Les acteurs ivoiriens du cacao plaident pour leur survie face aux primes de cacao certifié durable
Partager vers

CommodAfrica s’est fait l’écho vendredi dernier (lire : Âpres négociations entre exportateurs ivoiriens et multinationales du cacao en Côte d’Ivoire) de la difficulté que les négociants ivoiriens avaient pour s’approvisionner en fèves et donc honorer leurs contrats. Des négociations avec le Conseil du café cacao (CCC) et le Groupement professionnel des exportateurs de café et de cacao de Côte d’Ivoire (Gepex), réunissant  les multinationales impliquées dans la filière cacao, se sont déroulées la semaine dernière.

Notre confrère Abidjan.net a interrogé le Secrétariat général du Groupement des négociants ivoiriens (GNI) et publie aujourd’hui ses réponses dont nous nous faisons l’écho ci-dessous.

Rappelons, au préalable, que les acteurs ivoiriens de la filière comprennent les membres du GNI qui ont des “capacités réelles d’achat de 250 000 tonnes” et ceux non membres du GNI qui représentent 150 000 t, soit un total de 400 000 t sur une production nationale d’environ 2 millions de tonnes (Mt). Concrètement, le GNI demande un  contact direct avec les clients que sont les chocolatiers internationaux et non avec le seul Gepex, et que les exportateurs internationaux acceptent de partager avec les transformateurs et exportateurs ivoiriens ces primes de certification des chocolatiers pour un volume de 200 000 t de cacao certifié durable.

Et il y a urgence car, selon le Secrétariat général du GNI, tous les opérateurs ivoiriens sont touchés. “Tous les transformateurs et exportateurs ivoiriens qui opèrent en propre, qu’ils soient du GNI ou pas, sont menacés de faillite, car ils ne peuvent plus acheter de fèves de cacao, qu’elles soient certifiées ou non (appelées fèves ordinaires ou conventionnelles). D’ailleurs plusieurs sont en train de fermer, le dernier étant le transformateur Susco.

Les cacaos certifiés et ordinaires indissociables aujourd’hui

Le cœur du problème est qu’on ne peut plus, en Côte d’Ivoire aujourd’hui, acheter du cacao lambda sans aussi acheter du cacao certifié qui est plus cher, car tous les intermédiaires et les producteurs, “que ce soit des gérants de coopératives ou des commerçants, imposent, pour livrer du cacao ordinaire, qu’on leur achète aussi du cacao certifié durable, et donc qu’ils reçoivent des primes de cacao certifié durable.

Or, il se trouve que les chocolatiers donnent 97 à 99% des primes certifiées aux sociétés internationales installées en Côte d’Ivoire. Les sociétés internationales en Côte d’Ivoire sont donc les seuls à pouvoir acquérir tout le cacao, celui certifié et non certifié.

Actuellement, selon le GNI, 50% du cacao ivoirien serait certifié, soit un million de tonnes (Mt) sur 2 Mt. Il est acheté au prix de stabilisation auquel s’ajoute cette prime de certification ce que seules les multinationales sont en mesure d’acheter. Cela ne serait pas grave en soi si elles n’obligeaient pas les intermédiaires à leur livrer aussi du cacao non certifié.

Ces primes de certification provoquent par conséquent des sur-paiements et des distorsions sur le marché et permettent donc aux acteurs qui les payent, c’est-à-dire les sociétés internationales installées en Côte d’Ivoire, d’acheter tout le cacao au détriment des acteurs ivoiriens qui eux ne disposent pas de contrat de cacao certifié”, précise le GNI à notre confrère Abidjan.net.

Le paiement direct des primes de certification aux producteurs

Les exportateurs locaux risquent-ils de faire défaut par rapport à leurs engagements contractuels ? Non, précise encore le GNI, car le Conseil café-cacao (CCC) “impose à ceux qui ont acheté trop de stocks par rapport à leurs contrats d’exportation, de revendre leur surplus aux autres afin que ceux-ci puissent honorer leurs contrats d’exportation. Grace à cela, nous allons donc, cette année, être en mesure d’exporter le cacao et ne pas faire défaut.

L’autre option qu’aurait pu choisir le CCC mais qu’il n’a pas fait, selon le GNI, aurait été “d’enlever les contrats d’exportation (déblocages) aux acteurs ivoiriens qui n’ont pas pu acheter le cacao en raison de l’avantage concurrentiel que confèrent les primes de certification aux acteurs internationaux installés en Côte d’Ivoire pour les réattribuer à ceux qui ont des surplus de stocks. En effet, les sociétés internationales réunies au Gepex sont très demandeuses de ces contrats d’exportation.” Cela aurait signé une quasi mort des opérateurs ivoiriens dont “une grande partie“, qui avait fait défaut en 2017, a déjà été éliminée par le CCC.

A la question de notre confrère sur la destination des primes de certification, le GNI répond : ” 90 % de leurs valeurs [les primes de certification, ndlr] sont destinées aux producteurs. Mais, contrairement au Ghana, le marché en Côte d’Ivoire est organisé avec des intermédiaires qui sont, soit gérants de coopératives, soit des commençants appelés traitants. Tous les organes de certification, comme Rainforest/Utz, Fairtrade, acceptent, depuis de longues années, de certifier des intermédiaires commerçants qui reçoivent les primes de certification des chocolatiers et qui ont la responsabilité, dans ce schéma de certification propre à la Cote d’Ivoire, de remettre ces primes aux producteurs. Sans rentrer dans ce débat, et tout en étant reconnaissants des efforts des chocolatiers, au GNI nous demandons depuis notre création, le paiement direct des primes de certification aux producteurs, notamment via le mobile money, pour ceux qui n’ont pas de comptes bancaires. Nous pourrions aussi imaginer que le CCC soit en charge de payer les producteurs directement, au lieu que les paiements soient faits à des intermédiaires par les transformateurs ou exportateurs, cela éviterait les conflits d’intérêts.

Autres Articles

Leave a Reply

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *