09 septembre 2021 - 17:11 |

Yaron Tamir : AgroStudies, un programme israélien unique pour devenir entrepreneur agricole

L'agriculture est une entreprise lucrative si l'agriculteur est un véritable entrepreneur qui applique les solutions les meilleures et les plus appropriées au contexte local. Ce concept est enseigné au centre international de formation AgroStudies en Israël, que Yaron Tamir dirige depuis 2005.

Il s'agit essentiellement d'un enseignement de terrain accessible aux étudiants agricoles les plus motivés d'Afrique de l'Ouest et de l'Est ainsi que d'Asie, sélectionnés par les universités dans leurs pays en partenariat avec les Ambassades d'Israël, Mashav qui est l'Agence de coopération israélienne au développement international du Ministère des Affaires étrangères, et AgroStudies.

 

Pouvez-vous nous parler d'AgroStudies et de vos liens avec le Ministère ?

AgroStudies a été créé il y a 17 ans. C'est une organisation fille de Granot qui est une coopérative agricole appartenant aux kibboutz. C'est donc une coopérative secondaire, la plus grande coopérative agricole d'Israël.

AgroStudies fait partie d'un concept général selon lequel les connaissances israéliennes devraient être partagées avec d'autres pays. Comme vous le savez, Israël est un tout petit pays avec presque pas de terre, pas d'eau, un climat très chaud. Nous avons donc dû nous améliorer pour ne pas mourir de faim et développer une agriculture performante et avancée.

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Le concept d'AgroStudies est que les étudiants qui terminent leur diplôme dans leur université -que ce soit en Afrique, en Asie ou en Amérique latine- ont un savoir commun : l'eau est toujours de l'eau, la plante est la même plante, la chimie est la même chimie. Mais la grande différence est que dans les pays où l'agriculture est plus traditionnelle, les connaissances restent généralement à l'université. Elles ne se poursuivent pas sur le terrain.

Sur ce sujet, Israël est un très bon exemple du partage des connaissances. Notre concept est que le futur agriculteur qui vient de l'étranger a appris ce qu'il ou elle doit savoir en théorie à l'université et lorsqu'il vient en Israël, nous voulons l'exposer à une agriculture qu'il ne pourrait pas expérimenter dans son propre pays. Donc, nous ne sommes pas une université et nous ne remplaçons pas l'université. Pour nous, ils ont appris la langue à l'université et maintenant nous devons leur apprendre à écrire leur propre livre, à l'utiliser.

Comment sélectionnez-vous vos élèves ?

Le ministère israélien des Affaires étrangères décide quels pays font partie de ce programme et du quota attribué à chaque pays. Ce n'est pas considéré comme une aide étrangère mais comme un renforcement des liens entre Israël et ces pays, car notre programme a un impact formidable sur l'agriculture dans ces pays. Par exemple, le ministère de l'Enseignement supérieur des Philippines nous a dit que selon une étude, les universités avec lesquelles nous opérons ont vu leurs inscriptions dans les cours d'agriculture augmenter de 300% parce que la majorité des étudiants souhaite aller étudier en Israël. Ainsi, dans un pays agricole comme les Philippines, cela aide le pays.

Lorsque nous sélectionnons des universités pour rejoindre le programme AgroStudies, nous envoyons d'abord une mission d'enquête. Ensuite, ce sont les universités des différents pays qui sélectionnent les étudiants censés venir en Israël. Notre concept est que les étudiants doivent venir d'une université de régions retirées, car nous visons à ce qu'une fois le programme terminé, ils retournent dans leur village et créent leur propre ferme.

En Israël, nous l'aidons à explorer et à développer son côté entrepreneurial et son caractère. Ainsi, l'une des choses les plus importantes que nous examinons dans notre sélection d'étudiants est leur côté entrepreneurial et leur niveau d'attente, ceux qui ont le désir de faire les choses, d'améliorer les choses. Notre objectif est qu'une fois de retour dans son village, il créé sa ferme, il utilise ce qu'il a appris en Israël et le partage avec les autres agriculteurs du village. Et nous avons des milliers de cas qui montrent que cela se produit.

Vous savez, aujourd'hui, il n'est pas facile de convaincre quelqu'un de se lancer dans l'agriculture. Ils préfèrent souvent se lancer dans des travaux moins intensifs en salle climatisée. Ce n'est pas facile d'être agriculteur !

C'est donc un programme assez unique. Vous ne l'avez pratiquement nulle part ailleurs dans le monde. Nous savons que c'est un succès parce que tous les pays qui y participent recherchent des quotas d'étudiants plus élevés pour leur pays et pour leur université.

Avec combien de pays êtes-vous partenaire ?

14 actuellement dont 9 africains.

Combien d'étudiants avez-vous eu d'Afrique de l'Ouest l'année dernière ?

En Afrique de l'Ouest, nous intervenons en Côte d'Ivoire, au Bénin, au Togo, au Ghana, au Libéria. On travaillait au Burkina mais ça devient difficile.

Je suis étudiant, disons, en Côte d'Ivoire, comment puis-je vous joindre ?

Tout d'abord, vous devez être inscrit dans l'une des universités avec lesquelles nous opérons. Nos

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partenaires sont tous des universités agricoles. Israël doit faire partie de son diplôme en agriculture, donc il vient en Israël juste avant de terminer son diplôme ou juste après. Car si l'étudiant retourne dans son pays pour une année de plus à l'université, il oublie ce qu'il a appris en Israël.

En Israël, avant l'arrivée d'un étudiant, nous décidons dans quelle ferme il ira. Pour ce faire, nous donnons à l'université à l'étranger une description de la ferme avec toutes les activités agricoles qui se déroulent sur cette ferme en Israël. Et l'université doit faire correspondre l'intérêt que l'étudiant porte à certains produits agricoles et ce que nous avons à offrir dans cette ferme. L'université a donc un rôle très important.

Lorsque l'étudiant arrive en Israël, le premier jour, on lui donne un ordinateur portable. Tout est dessus et il le garde car lorsqu'il rentrera dans son pays, lorsqu'il verra sur le terrain un insecte qu'il ne connaît pas ou un problème, il pourra se connecter à notre système et trouver la réponse. Il pourra également contacter son conférencier en Israël. Notre but est de les aider avec des connaissances une fois qu'ils sont retournés dans leur patrie.

Cinq jours par semaine, l'étudiant est sur le terrain avec un fermier israélien. C'est la chose la plus importante que le fermier israélien puisse lui donner parce que le fermier est très axé sur le travail concret. L’agriculteur souhaite gagner de l'argent et il lui apprendra à devenir un professionnel de l'agriculture moderne. Par exemple, nous avions beaucoup de manguiers en Israël, mais ce n'était pas rentable, alors nous les avons coupés pour planter d'autres choses comme des avocats. Il est donc important que les élèves comprennent qu'un agriculteur est un homme d'affaires. Vous devez gagner de l'argent.

Le problème de la sécurité alimentaire consiste à augmenter les rendements. Ainsi, nous enseignons aux étudiants comment gérer une plantation, comment faire la bonne taille, comment permettre à la plantation de se développer correctement et comment planter correctement. Nous avons une ferme de démonstration à côté de chaque campus. Cette ferme de démonstration montre en fait une agriculture à faible coût, mais une agriculture très moderne. Cela pourrait montrer les meilleures pratiques agricoles, mais ils préfèrent leur montrer quelque chose qui sera important lorsqu'ils seront de retour dans leur pays. Car parfois, avec de très petites choses, vous pouvez augmenter considérablement vos rendements.

Par exemple ?

Nous savons aujourd'hui que la culture du riz par inondation endommage les terres parce que la racine du riz reçoit de l'oxygène, mais pas autant qu'elle le devrait. Donc, nous avons recours à l'irrigation goutte à goutte et vous obtenez en fait des rendements plus élevés car le riz est mieux oxygéné. Et quand on récolte, on coupe la tige mais il fait laisser 30 cm. Après 60 jours, vous avez une autre récolte avec un rendement de 85%. L'irrigation goutte à goutte pour le riz est une technologie israélienne. C'est très populaire en Inde !

Quels programmes avez-vous ?

Nous en avons deux : l'horticulture qui se fait en anglais et en français ; Animal Science est en anglais (le rendement le plus élevé en lait est fait par une vache israélienne) qui comprend la volaille et l'aquaculture.

Les étudiants ont-ils une bourse ?

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Cinq jours par semaine, l'étudiant est à la ferme avec l'agronome ou l'agriculteur israélien. Il s'occupe de toute l'activité agricole de la ferme. Pour cela, il est payé selon la loi israélienne qui est d'environ $ 9 de l'heure. De ce montant, il paie ses frais de scolarité, son voyage en Israël et pourtant il est en mesure d'économiser une somme d'argent importante.

Ici, tout au long du cours d'agriculture, les étudiants ont un cours de commerce avec toutes les données provenant de leur pays : le sol, le climat, etc. Ils font leur propre business plan pour une mise en œuvre immédiate. Donc, ils reviennent avec les connaissances qu'ils ont du terrain, ils ont leur proposition d'affaires et ils ont le capital pour commencer.

Nous encourageons les universités agricoles en Afrique à créer un pôle agricole et à louer les terres à nos diplômés qui reviennent d'Israël. Et s'ils fondent ensemble une coopérative et que l'université leur loue le terrain, ils peuvent enseigner à ceux qui n'ont pas eu la possibilité d'aller en Israël. Encore une fois, c'est du gagnant-gagnant pour la communauté.

Matières premières: 
Non
Énergies renouvelables: 
Non

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