Yaron Tamir : AgroStudies, un programme israƩlien unique pour devenir entrepreneur agricole

 Yaron Tamir : AgroStudies, un programme israƩlien unique pour devenir entrepreneur agricole
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L’agriculture est une entreprise lucrative si l’agriculteur est un vĆ©ritable entrepreneur qui applique les solutions les meilleures et les plus appropriĆ©es au contexte local. Ce concept est enseignĆ© au centre international de formation AgroStudies en IsraĆ«l, que Yaron Tamir dirige depuis 2005.

Il s’agit essentiellement d’un enseignement de terrain accessible aux Ć©tudiants agricoles les plus motivĆ©s d’Afrique de l’Ouest et de l’Est ainsi que d’Asie, sĆ©lectionnĆ©s par les universitĆ©s dans leurs pays en partenariat avec les Ambassades d’IsraĆ«l, Mashav qui est l’Agence de coopĆ©ration israĆ©lienne au dĆ©veloppement international du MinistĆØre des Affaires Ć©trangĆØres, et AgroStudies.

 

Pouvez-vous nous parler d’AgroStudies et de vos liens avec le MinistĆØre ?

AgroStudies a Ć©tĆ© crĆ©Ć© il y a 17 ans. C’est une organisation fille de Granot qui est une coopĆ©rative agricole appartenant aux kibboutz. C’est donc une coopĆ©rative secondaire, la plus grande coopĆ©rative agricole d’IsraĆ«l.

AgroStudies fait partie d’un concept gĆ©nĆ©ral selon lequel les connaissances israĆ©liennes devraient ĆŖtre partagĆ©es avec d’autres pays. Comme vous le savez, IsraĆ«l est un tout petit pays avec presque pas de terre, pas d’eau, un climat trĆØs chaud. Nous avons donc dĆ» nous amĆ©liorer pour ne pas mourir de faim et dĆ©velopper une agriculture performante et avancĆ©e.

Le concept d’AgroStudies est que les Ć©tudiants qui terminent leur diplĆ“me dans leur universitĆ© -que ce soit en Afrique, en Asie ou en AmĆ©rique latine- ont un savoir commun : l’eau est toujours de l’eau, la plante est la mĆŖme plante, la chimie est la mĆŖme chimie. Mais la grande diffĆ©rence est que dans les pays oĆ¹ l’agriculture est plus traditionnelle, les connaissances restent gĆ©nĆ©ralement Ć  l’universitĆ©. Elles ne se poursuivent pas sur le terrain.

Sur ce sujet, IsraĆ«l est un trĆØs bon exemple du partage des connaissances. Notre concept est que le futur agriculteur qui vient de l’Ć©tranger a appris ce qu’il ou elle doit savoir en thĆ©orie Ć  l’universitĆ© et lorsqu’il vient en IsraĆ«l, nous voulons l’exposer Ć  une agriculture qu’il ne pourrait pas expĆ©rimenter dans son propre pays. Donc, nous ne sommes pas une universitĆ© et nous ne remplaƧons pas l’universitĆ©. Pour nous, ils ont appris la langue Ć  l’universitĆ© et maintenant nous devons leur apprendre Ć  Ć©crire leur propre livre, Ć  l’utiliser.

Comment sĆ©lectionnez-vous vos Ć©lĆØves ?

Le ministĆØre israĆ©lien des Affaires Ć©trangĆØres dĆ©cide quels pays font partie de ce programme et du quota attribuĆ© Ć  chaque pays. Ce n’est pas considĆ©rĆ© comme une aide Ć©trangĆØre mais comme un renforcement des liens entre IsraĆ«l et ces pays, car notre programme a un impact formidable sur l’agriculture dans ces pays. Par exemple, le ministĆØre de l’Enseignement supĆ©rieur des Philippines nous a dit que selon une Ć©tude, les universitĆ©s avec lesquelles nous opĆ©rons ont vu leurs inscriptions dans les cours d’agriculture augmenter de 300% parce que la majoritĆ© des Ć©tudiants souhaite aller Ć©tudier en IsraĆ«l. Ainsi, dans un pays agricole comme les Philippines, cela aide le pays.

Lorsque nous sĆ©lectionnons des universitĆ©s pour rejoindre le programme AgroStudies, nous envoyons d’abord une mission d’enquĆŖte. Ensuite, ce sont les universitĆ©s des diffĆ©rents pays qui sĆ©lectionnent les Ć©tudiants censĆ©s venir en IsraĆ«l. Notre concept est que les Ć©tudiants doivent venir d’une universitĆ© de rĆ©gions retirĆ©es, car nous visons Ć  ce qu’une fois le programme terminĆ©, ils retournent dans leur village et crĆ©ent leur propre ferme.

En IsraĆ«l, nous l’aidons Ć  explorer et Ć  dĆ©velopper son cĆ“tĆ© entrepreneurial et son caractĆØre. Ainsi, l’une des choses les plus importantes que nous examinons dans notre sĆ©lection d’Ć©tudiants est leur cĆ“tĆ© entrepreneurial et leur niveau d’attente, ceux qui ont le dĆ©sir de faire les choses, d’amĆ©liorer les choses. Notre objectif est qu’une fois de retour dans son village, il crĆ©Ć© sa ferme, il utilise ce qu’il a appris en IsraĆ«l et le partage avec les autres agriculteurs du village. Et nous avons des milliers de cas qui montrent que cela se produit.

Vous savez, aujourd’hui, il n’est pas facile de convaincre quelqu’un de se lancer dans l’agriculture. Ils prĆ©fĆØrent souvent se lancer dans des travaux moins intensifs en salle climatisĆ©e. Ce n’est pas facile d’ĆŖtre agriculteur !

C’est donc un programme assez unique. Vous ne l’avez pratiquement nulle part ailleurs dans le monde. Nous savons que c’est un succĆØs parce que tous les pays qui y participent recherchent des quotas d’Ć©tudiants plus Ć©levĆ©s pour leur pays et pour leur universitĆ©.

Avec combien de pays ĆŖtes-vous partenaire ?

14 actuellement dont 9 africains.

Combien d’Ć©tudiants avez-vous eu d’Afrique de l’Ouest l’annĆ©e derniĆØre ?

En Afrique de l’Ouest, nous intervenons en CĆ“te d’Ivoire, au BĆ©nin, au Togo, au Ghana, au LibĆ©ria. On travaillait au Burkina mais Ƨa devient difficile.

Je suis Ć©tudiant, disons, en CĆ“te d’Ivoire, comment puis-je vous joindre ?

Tout d’abord, vous devez ĆŖtre inscrit dans l’une des universitĆ©s avec lesquelles nous opĆ©rons. Nos partenaires sont tous des universitĆ©s agricoles. IsraĆ«l doit faire partie de son diplĆ“me en agriculture, donc il vient en IsraĆ«l juste avant de terminer son diplĆ“me ou juste aprĆØs. Car si l’Ć©tudiant retourne dans son pays pour une annĆ©e de plus Ć  l’universitĆ©, il oublie ce qu’il a appris en IsraĆ«l.

En IsraĆ«l, avant l’arrivĆ©e d’un Ć©tudiant, nous dĆ©cidons dans quelle ferme il ira. Pour ce faire, nous donnons Ć  l’universitĆ© Ć  l’Ć©tranger une description de la ferme avec toutes les activitĆ©s agricoles qui se dĆ©roulent sur cette ferme en IsraĆ«l. Et l’universitĆ© doit faire correspondre l’intĆ©rĆŖt que l’Ć©tudiant porte Ć  certains produits agricoles et ce que nous avons Ć  offrir dans cette ferme. L’universitĆ© a donc un rĆ“le trĆØs important.

Lorsque l’Ć©tudiant arrive en IsraĆ«l, le premier jour, on lui donne un ordinateur portable. Tout est dessus et il le garde car lorsqu’il rentrera dans son pays, lorsqu’il verra sur le terrain un insecte qu’il ne connaĆ®t pas ou un problĆØme, il pourra se connecter Ć  notre systĆØme et trouver la rĆ©ponse. Il pourra Ć©galement contacter son confĆ©rencier en IsraĆ«l. Notre but est de les aider avec des connaissances une fois qu’ils sont retournĆ©s dans leur patrie.

Cinq jours par semaine, l’Ć©tudiant est sur le terrain avec un fermier israĆ©lien. C’est la chose la plus importante que le fermier israĆ©lien puisse lui donner parce que le fermier est trĆØs axĆ© sur le travail concret. Lā€™agriculteur souhaite gagner de l’argent et il lui apprendra Ć  devenir un professionnel de l’agriculture moderne. Par exemple, nous avions beaucoup de manguiers en IsraĆ«l, mais ce n’Ć©tait pas rentable, alors nous les avons coupĆ©s pour planter d’autres choses comme des avocats. Il est donc important que les Ć©lĆØves comprennent qu’un agriculteur est un homme d’affaires. Vous devez gagner de l’argent.

Le problĆØme de la sĆ©curitĆ© alimentaire consiste Ć  augmenter les rendements. Ainsi, nous enseignons aux Ć©tudiants comment gĆ©rer une plantation, comment faire la bonne taille, comment permettre Ć  la plantation de se dĆ©velopper correctement et comment planter correctement. Nous avons une ferme de dĆ©monstration Ć  cĆ“tĆ© de chaque campus. Cette ferme de dĆ©monstration montre en fait une agriculture Ć  faible coĆ»t, mais une agriculture trĆØs moderne. Cela pourrait montrer les meilleures pratiques agricoles, mais ils prĆ©fĆØrent leur montrer quelque chose qui sera important lorsqu’ils seront de retour dans leur pays. Car parfois, avec de trĆØs petites choses, vous pouvez augmenter considĆ©rablement vos rendements.

Par exemple ?

Nous savons aujourd’hui que la culture du riz par inondation endommage les terres parce que la racine du riz reƧoit de l’oxygĆØne, mais pas autant qu’elle le devrait. Donc, nous avons recours Ć  l’irrigation goutte Ć  goutte et vous obtenez en fait des rendements plus Ć©levĆ©s car le riz est mieux oxygĆ©nĆ©. Et quand on rĆ©colte, on coupe la tige mais il fait laisser 30 cm. AprĆØs 60 jours, vous avez une autre rĆ©colte avec un rendement de 85%. L’irrigation goutte Ć  goutte pour le riz est une technologie israĆ©lienne. C’est trĆØs populaire en Inde !

Quels programmes avez-vous ?

Nous en avons deux : l’horticulture qui se fait en anglais et en franƧais ; Animal Science est en anglais (le rendement le plus Ć©levĆ© en lait est fait par une vache israĆ©lienne) qui comprend la volaille et l’aquaculture.

Les Ć©tudiants ont-ils une bourse ?

Cinq jours par semaine, l’Ć©tudiant est Ć  la ferme avec l’agronome ou l’agriculteur israĆ©lien. Il s’occupe de toute l’activitĆ© agricole de la ferme. Pour cela, il est payĆ© selon la loi israĆ©lienne qui est d’environ $ 9 de l’heure. De ce montant, il paie ses frais de scolaritĆ©, son voyage en IsraĆ«l et pourtant il est en mesure d’Ć©conomiser une somme d’argent importante.

Ici, tout au long du cours d’agriculture, les Ć©tudiants ont un cours de commerce avec toutes les donnĆ©es provenant de leur pays : le sol, le climat, etc. Ils font leur propre business plan pour une mise en œuvre immĆ©diate. Donc, ils reviennent avec les connaissances qu’ils ont du terrain, ils ont leur proposition d’affaires et ils ont le capital pour commencer.

Nous encourageons les universitĆ©s agricoles en Afrique Ć  crĆ©er un pĆ“le agricole et Ć  louer les terres Ć  nos diplĆ“mĆ©s qui reviennent d’IsraĆ«l. Et s’ils fondent ensemble une coopĆ©rative et que l’universitĆ© leur loue le terrain, ils peuvent enseigner Ć  ceux qui n’ont pas eu la possibilitĆ© d’aller en IsraĆ«l. Encore une fois, c’est du gagnant-gagnant pour la communautĆ©.

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