La Chronique Matières du Jeudi (18 juin 2015)

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Visiblement, on n'échappera pas à El Niño… Les agences météorologiques des Etats-Unis, du Japon et de l'Australie ont relevé leurs évaluations du risque, tant en terme de force que de durée. A ceci se greffe une glissade du dollar, tombée aujourd'hui au plus bas en sept mois et demi face à la livre sterling. Deux facteurs qui, généralement, tirent à la hausse les prix des matières premières, quelque soit les fondamentaux.

CACAO

La faiblesse de la récolte au Ghana ajoutée à un dollar plus faible ont été les deux ingrédients majeurs à la hausse du prix de la fève de cacao sur les marchés à terme. A New York, il a touché un plus haut en 8 mois et demi, à $  3 267 la tonne, tandis qu'à Londres, marché directeur pour le cacao, il a moins fortement grimpé, à £ 2 134. Rappelons qu'Accra a révisé à la baisse ses estimations de récolte 2014/15, à 750 000 tonnes (t) contre le million initialement anticipé.

Le Ghana dont l'organe régulateur, le Cocobod, a déclaré hier que le montant du prêt syndiqué qu'il sollicitera auprès d'un consortium de banques internationales, comme chaque année, pour préfinancer sa campagne à venir, donc 2015/16, sera de $ 1,8 milliard. Ceci représente une hausse de $ 100 million par rapport aux montants levés pour 2014/15 (voir nos informations).

En Côte d'Ivoire, les arrivages aux ports d'Abidjan et de San Pedro sont estimés pas les exportateurs avoir atteint 1 493 000 t au 14 juin, et ce depuis le début de la campagne, le 1er octobre dernier. C'est en légère baisse par rapport aux 1 526 000 t l'année dernière sur la même période. Quant aux conditions de production, si les pluies avaient été les bienvenues fin mars, actuellement elles sont très fortes –trop fortes– dans les zones de production, provoquant des inondations et endommageant les routes d'accès. Surtout, cela fait craindre l'irruption de maladies liées à une humidité excessive.

Au Nigeria, un temps très sec dans la principale région productrice de cacao, l'Etat d'Ondo, au sud-ouest, a sapé les espoirs d'une belle récolte intermédiaire. La campagne du 4ème producteur mondial courre d'octobre à septembre, avec une récolte intermédiaire démarrant en mars jusqu'en septembre. En mars, l'Association du cacao au Nigeria avait annoncé que le pays avait produit plus de 350 000 t de cacao en 2013/14 et devrait atteindre des volumes similaires cette campagne. Selon Reuters, les volumes sur la campagne intermédiaire seraient en baisse de 20% par rapport aux 55 000 t de l'année dernière.

Au Cameroun, les prix bord champ ont grimpé en juin car les disponibilités sont faibles. Les prix ont atteint FCFA 1 530 le kilo contre FCFA 1 200 en moyenne en mai, selon Joseph Nde, directeur du Cameroon Marketing Commodities (Camaco). La campagne au Cameroun démarre le 1er août, avec une récolte principale d'octobre à janvier-février, puis l'intermédiaire.

Côté entreprises, Barry Callebaut a signé mardi un accord d'approvisionnement à long terme avec  le groupe GarudaFood, l'une des principales sociétés du secteur de l'alimentation et des boissons en Indonésie. A compter de mi-2016, Barry Callebaut fournira chaque année au moins 10 000 t de pâte à glacer au chocolat à la biscuiterie GarudaFood.

CAFÉ

Le Robusta s'est inscrit à la hausse, mardi, sur le marché à terme de Londres, avec l'échéance juillet en prime de $ 80 sur septembre. Le marché est donc en "backwardation" ou encore en déport, ce qui n'est pas habituel, l'échéance éloignée étant généralement plus chère que l'échéance rapprochée. Une situation nouvelle car en début de semaine encore, juillet était en décote sur septembre. Mais mardi, le marché s'est retourné, inquiet de ce que les planteurs vietnamiens, premier producteur et exportateur mondiaux de Robusta, faisaient de la rétention afin que les cours augmentent encore. En réalité, les traders ont du mal à expliquer ce revirement de marché. Quoi qu'il en soit, le Robusta cotait jeudi à Londres $ 1 760 la tonne, tirant l'Arabica côté à New York qui atteint $ 1,3085 la livre.

Cette récente hausse des prix du Robusta a ralenti les achats de café au Vietnam, tandis que la récolte en Indonésie démarre timidement. L'offre actuelle de Robusta n'est donc pas très abondante. Elle devrait, cependant, être plus élevée que l'année dernière puisque celle-ci, d'avril 2014 à mars 2015, avait chuté de 23% à 9 millions de sacs de 60 kgs (Ms). L'actuelle récolte est estimée atteindre 10 Ms, voire 10,83 Ms.

En mai, le Vietnam a exporté 105 500 t de Robusta (1,76 Ms), en hausse de 1% par rapport au mois d'avril, selon les douanes vietnamiennes. Ainsi, sur les 5 premiers mois de 2015, les exportations vietnamiennes ont été de 580 400 t, en chute de 39,2% par rapport à la même période en 2014.

CAOUTCHOUC

Le marché à terme du caoutchouc de Tokyo  cherche la direction à prendre après que les cours aient atteint un plus haut de 16 mois au début du mois de juin. Depuis ce sommet,  les contrats à terme du caoutchouc tant à Tokyo qu’à Shanghai ont perdu 10% de leur valeur, tandis que les prix du pétrole, faibles,  ajoutent de la pression sur les cours. Mercredi soir, les cours  pour le contrat de novembre ont clôturé à 229,6 yens ($1,85) le kilo dans un contexte de faibles échanges.

Les Etats-Unis ont imposé le 12 juin des taxes à l’importation sur certains pneus d'automobiles et de camions légers importés de Chine, après avoir constaté qu'ils étaient inférieurs au prix du marché et donc subventionnés par Pékin. Dans certains cas, le département américain du Commerce a décidé des droits supérieurs à 100%.  Ces taxes  auront des incidences sur les produits des entreprises y compris  Shandong Yongsheng Rubber Group Co, Cooper Tire Kunshan Co, une filiale de Cooper Tire & Rubber Co, et Giti Tire Co., une filiale de Giti Tire.

En 2014, les importations de pneus de véhicules de tourisme et camions légers en provenance de Chine se sont élevées à environ $2,3 milliards.

Ces taxes à l’importation doivent encore être avalisées  en juillet par la Commission américaine du commerce international.

Les stocks dans les ports japonais s’élevaient  à 13 271 tonnes au 21 mai en hausse de 4,4%, selon la Rubber Trade Association of Japan.

COTON

L’évolution est en dents de scie cette semaine pour les cours du coton. Les fortes pertes  de lundi ont été effacées mardi à la suite de la tempête tropicale Bill qui a touché le Texas, principale région productrice de coton, provoquant de graves inondations. Mercredi, les cours se sont rétractés pour clôturer à  64,52 cents la livre sur le contrat de décembre.

Une nouvelle étape a été franchie pour la mise en Å“uvre de son nouveau contrat à terme qu’envisage de lancer l’Intercontinental Exchange (ICE) après l’approbation par le U.S. House Agriculture Committee du projet de loi sur les contrats à termes aux Etats-Unis, comme l’ICE,  qui autorise à coter le coton "étranger" (non américain)  livré dans  différents points à travers le monde. Actuellement la US Cotton Futures Act exige que tout le coton échangé sur le marché à terme aux Etats-Unis soit échantillonné et classé par le ministère américain de l’Agriculture. Le projet de loi doit encore être approuvé par la Chambre des représentants et le Sénat.

La Chine a importé 163 100 tonnes de coton en mai, en baisse de 14,8 % par rapport à la même période de l'année 2014, selon les statistiques douanières données par le site cncotton.com.

Le phénomène El Niño, qui touche l’Australie pour la deuxième fois en cinq ans et devrait persister jusqu’à la fin de l’année selon les météorologues, a conduit  Ã  réduire  les niveaux de production prévus pour le blé, le coton et d'autres produits agricoles pour l'exercice 2015/16. Ainsi la production de coton en Australie devrait atteindre seulement que  520 000 tonnes contre une prévision de 559 500 tonnes réalisée en mars dernier du Bureau of Agricultural and Resource Economics and Sciences (ABARES).

HUILE DE PALME

Alors qu’un consensus des prévisionnistes  semble  se former quant à la forte probabilité (90%) que le phénomène El Nino  se développe d’ici à l’automne 2015, cela ne se ressent pas encore sur plusieurs marchés de produits de base en Asie. Rappelons tout de même que les prix de l’huile de palme ont bondi de 57% en 2009 en partie sous l’impulsion d’El Nino. Depuis le début l’année les prix de l’huile de palme sont particulièrement stables  progressant d’environ 1% par rapport aux 2 266 ringgits la tonne de la fin 2014 mais reculant de 5% en dollars.

Pour la semaine en cours, les prix de l’huile de palme ont atteint jeudi leur plus bas niveau depuis près de trois semaines avec l’appréciation du ringgit et la faiblesse de l’huile de soja.

La Malaisie maintiendra sa  taxe à l'exportation pour l’huile de palme brute à 0%  pour le mois de juillet selon une circulaire du gouvernement. De son côté, l’Indonésie a reporté l’application de son prélèvement sur les exportations de l’huile de palme brute prévue le 15 juin au 1er juillet. En mars dernier, le président Joko Wilodo avait annoncé puis signé le mois dernier une nouvelle réglementation du biodiesel. Elle  prévoit notamment  que les exportateurs payent une taxe de $50 par tonne d’huile de palme brute et de $30 pour l’huile de palme transformée expédiés sans taxe à l’exportation. Lorsque les prix  moyens baissent en dessous de $750 la tonne, l’Indonésie réduit la taxe à l’exportation à zéro.

La Food and Drug administration (FDA) a donné trois ans aux industriels pour éliminer les acides gras trans dans leurs recettes, ces acides gras seront interdits à l’issue de cette période. Une interdiction qui pourrait amener ces industriels à remplacer l’huile de soja par de l’huile de palme, cette dernière étant naturellement sans acides gras trans. Toutefois, le volume qui pourrait être concerné ne sera pas suffisant pour avoir un effet sur les prix par rapport aux 60 000 tonnes produites chaque année. "En supposant que 50% des graisses hydrogénées restantes aux États-Unis sont remplacées par de l'huile de palme, nous estimons que cette mesure pourrait accroître la demande pour l'huile de palme aux États-Unis de 156 000 à 453,000 tonnes au cours des trois prochaines années», a déclaré Ivy Ng, régional chef de la recherche sur les plantations à CIMB Investment Bank.

RIZ

Le commerce du riz en Asie est atone cette semaine avec des acheteurs absents alors que la petite demande des Philippines n’est pas parvenue à augmenter les prix.  En effet, on a assisté à une nouvelle dégringolade des prix en Thaïlande tandis que ceux du Vietnam se maintenaient. Le prix du Thaï 5% a chuté à $365-$368 la tonne, soit son plus bas niveau depuis janvier 2008, mais demeure encore au dessus du prix vietnamien pour un grade comparable ($350-$355 la tonne). Le gouvernement thaïlandais a vendu mardi  840 000 tonnes de riz par appel d'offres  pour une valeur de  $ 232 millions. Toutefois, les Philippines ont rejeté les offres du Vietnam, de la Thaïlande et du Cambodge pour 100 000 tonnes additionnelles estimant que les prix proposés étaient au dessus du budget fixé. Parallèlement, les Philippines ont alloué aux négociants privés des importations de riz pouvant aller jusqu’à 805 200 tonnes de riz à délivrer d’ici le 30 novembre.

L’Inde a relevé le prix d’achat  aux agriculteurs pour la nouvelle campagne pour les variétés communes de riz de 3,7% et offre de payer une prime de 2 00 roupies au prix de soutien.

Pour les grades communs de riz, le gouvernement a fixé le prix de soutien à 14 100 roupies la tonne et pour les variétés supérieures à 14 500 roupies la tonne, contre 14 000 la tonne l'an dernier,  a déclaré le ministre de la justice Ravi Shankar Prasad.

Le gouvernement indien achète du riz et du blé auprès des agriculteurs locaux à un prix fixe afin de  constituer des stocks pour ses programmes de protection de l'alimentation et de répondre aux besoins d'urgence.

SUCRE

La faiblesse du dollar a aussi soutenu le sucre roux sur le marché à terme de New York, qui demeure, néanmoins, à des niveaux très faibles, à 11,41 cents la livre. Le sucre blanc, à Londres, est légèrement à la hausse également, à $ 346,20 la tonne.

Les raisons pour des prix aussi faibles sont toujours l'abondance de l'offre mondiale, des stocks élevés, une météorologie très favorable pour la récolte au Brésil, une production plus élevée qu'attendue en Inde et en Thaïlande.

Ceci dit, la maison de négoce spécialisée Czarnikow voit un déficit mondial en 2015/16 qui atteindrait 1,7 Mt, ce qui ferait suite à plusieurs années excédentaires. Des prévisions conformes à celles de l'Organisation internationale du sucre (OIS) et l'analyste Green Pool.

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