Diaspora : les sirènes cacao et café du Cameroun

 Diaspora : les sirènes cacao et café du Cameroun
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De la Chambre de commerce et d'industrie de Milan, le Conseil interprofessionnel du cacao et du café (CICC)du Cameroun a lancé un vibrant appel aux jeunes Camerounais de la diaspora vivant en Italie. "Revenez au pays car vous avez un avenir garanti dans la cacaoculture et la caféiculture", a assuré, chiffres à l'appui, le secrétaire général du CICC, Omer Gatien Maledy. "Notre programme New Generation vous offre ce choix économique gagnant".

Le constat est simple, a souligné M. Yanga, conseiller à l'ambassade du Cameroun en Italie. La consommation mondiale de cacao croît à un rythme de 2,5% par an et ce sans doute jusqu'en 2020-2025, tandis que la production n'augmente que de 1,8 à 1,9% par an. Ce qui signifie qu'on va manquer de cacao, sans pour autant parler de pénurie. Ce qui signifie aussi que les prix du cacao vont demeurer soutenus et donc rémunérateurs pour les producteurs. Quant au café, si les cours mondiaux sont beaucoup plus volatils que ceux du cacao, l'offre de café vert baisse d'environ 2% par an, ce qui, là aussi, assure d'un bel avenir pour ceux dans la filière.

Révolutionner la donne

Face à cela, le cacao camerounais est très apprécié des marchés mondiaux, notamment pour sa couleur rouge brique qui donne une belle poudre, tandis que le café camerounais est de plus en plus primé dans les instances internationales, comme au Salon de l'agriculture de Paris l'année dernière. Pourtant, les volumes de production de ces deux filières sont faibles et, en conséquence, le potentiel énorme. "Actuellement, 450 000 ha sont dédiés au café et au cacao au Cameroun et on pourrait facilement tripler ses superficies", précise le diplomate.

Pour ce faire, il faut révolutionner la donne. "L'âge moyen des producteurs est de 60 ans et celui du verger est de 30 ans. La filière vieillit. Les jeunes doivent prendre la relève," a fait remarquer Michèle Biwole, responsable du programme New Generation au CICC. Ce dernier, lancé en juin 2012, est "un véritable success story", a témoigné, pour sa part, Hilary Barry du programme UE-ACP, ColeACP.

New Generation dépassé par son succès

Qu'en est-il ? Ce programme a pour objectif d'accroître la production et la qualité des deux filières. "Le programme s'adresse aux jeunes qui veulent faire du café et du cacao leur métier", précise Michèle Biwole. Il forme et encadre les jeunes (18 à 40 ans, mais ce peut être souple…) pendant 3 ans et leur met le pied à l'étrier  pour exploiter dans un premier temps 3 ha de cacao et/ou 1 ha de café. "New Generation donne tout au planteur sauf la terre et la force de travail", déclare Omer Maldedy. La formation est de A à Z, portant sur les filières, sur la production en pépinières, la conduite d'une exploitation, les éco-systèmes, les produits phytosanitaires et l'utilisation d'engrais, les techniques de régénération, sans oublier les modules sur l'entreprenariat agricole, la création et la gestion de coopératives et les processus de certification, explique Simon Bassanaga, agronome et formateur.

Avec des résultats patents. "En 3 ans, le nombre de jeunes impliqués dans le programme est passé de 93 à 1042 et les superficies nouvellement consacrées au café et au cacao sont passées de 147 ha à 1395 ha", selon Michème Biwole. "L'objectif initialement fixé par le programme était d'impliquer 200 nouveaux jeunes par an. Nous avons doublé notre objectif et nous nous acheminons vers 1500 jeunes en 2016", précise Omer Maledy.

L'appel vers la diaspora

L'Exposition universelle de Milan, qui ferme ses portes à la fin du mois et qui a pour thème l'agriculture, était l'occasion rêvée pour le CICC de lancer un appel. Un appel dénué de toute connotation politique, a tenu à affirmer le responsable du CICC. "Nous n'avons pas d'intérêt politique ou démagogique. C'est une initiative strictement économique. Notre intérêt est que la production augmente dans les deux filières."

L'appel, de la Chambre de Commerce de Milan, était à l'adresse des jeunes Camerounais venus très nombreux. "Dans la tête de jeunes ici, il y a toujours la question du retour au pays", a rappelé Yves Abissi, responsable communication au CICC.

Un bénéfice net de € 7600 par an

Et Omer Maledy de parler chiffres. "Dans le cadre d'un retour d'un jeune de la diaspora dans le cadre de New Generation, on lui demande de trouver  7 ha, d'avoir une présence effective sur la plantation et de prendre en charge la main d'œuvre, "au moins un ouvrier que vous payez", a-t-il précisé. "De son côté, le CICC apporte une aide pour trouver le terrain si besoin, (à l'achat, 1 ha coûte FCFA 150 000 en moyenne, soit € 250), l'abattage de votre terrain, toutes les formations gratuites, tous les apports en intrants, en matériel et en petit équipement, toute l'assistance technique."

Le résultat sera payant, assure le patron du CICC.  A raison d'un rendement moyen de 1000 kg de cacao par hectare au prix minimum moyen de FCFA 1000/kg de fèves bord champ et en retirant FCFA 300 000/ha de charges, cela fait un bénéfice net d'environ FCFA 5 millions pour 7 ha, soit € 7600. "C'est du bénéfice net car il n'y a pas d'amortissement puisque tout a été donné par le CICC", précise encore Omer Maledy qui rappelle que le salaire moyen au Cameroun est de FCFA 150 000.

"C'est du bénéfice net car, par ailleurs, dans la cadre de New Generation, il est interdit de ne faire que du café ou du cacao. Il faut une activité annexe, de l'élevage, des autres cultures comme par exemple le manioc qui est un marché très porteur actuellement. D'ailleurs, à partir de 2016, le CICC donnera des semences de manioc à nos apprenants. L'argent provenant du café et du cacao n'est pas fait pour vivre au quotidien. Vous vivez sur les autres cultures ou sur l'élevage."

Le relais politique

 Si le programme New Generation relève strictement du secteur privé, il devrait trouver un écho politique, assure la député Marlyse Douala Bell également présente à Milan. Dès le mois de novembre, elle se fait fort de présenter 4 propositions qui vont dans le sens du projet "Retour au pays" du CICC : permettre aux Camerounais d'avoir la double nationalité ce qui leur est refusé actuellement ; relancer le débat sur l'accès à la propriété notamment pour les femmes ; renforcer le budget alloué aux filières café et cacao ; élaborer des stratégies favorisant l'insertion des jeunes de la diaspora de retour au Cameroun, dans le cadre du programme New Generation. Un programme qui est amené à faire des émules, assure-t-elle.

Une initiative qui, dans le contexte politique européen actuel, ne devrait pas laisser indifférentes les autorités à Bruxelles…

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