22 mars 2007 - 10:10 |

L'Université du Coton au service du management

Bernard Bachelier, directeur de la Fondation pour l’agriculture et la ruralité dans le monde (FARM)

L’Université du Coton au service du management

Bernard Bachelier, directeur de la Fondation pour l’agriculture et la ruralité dans le monde (FARM)_

(06/03/07)

L’Université du coton est en fait un projet qui a démarré il y a un an, ici au Salon de l’Agriculture, car il y avait une réunion des organisations de producteurs de coton. Vous savez qu’il existe une organisation des producteurs, l’AProCA — l’Organisation des producteurs de coton africains — qui a été créé en décembre 2004. C’est assez récent. Lorsqu’on leur a demandé quels étaient leurs besoins, la demande de l’AProCA — de son président en particulier, François Traoré — a été de nous dire : nous avons besoin d’une formation au management. Qu’est-ce que c’est que le management pour des producteurs de coton ? C’est gérer les organisations professionnelles, créer des interprofessions, travailler sur le marketing pour promouvoir le coton africain, faire du lobbying auprès des instances internationales, c’est élaborer des projets stratégiques, c’est assumer aussi leurs responsabilités d’administrateur au sein des sociétés cotonnières. C’est toutes ces questions là dont ils voulaient maitriser les compétences : jouer leur rôle aujourd’hui de leader professionnel agricole dans la filière coton.
Cela repose aussi sur l’idée que, bien sur, il faut se battre contre les subventions américaines pour essayer d’avoir des cours internationaux du coton plus élevés. Mais il faut aussi promouvoir la compétitivité du coton africain à moyen et long terme. Et pour cela il faut maitriser les compétences d’entrepreneur.

Cette université sera-t-elle une université classique, avec des enseignants, un pôle recherche ou autre ? Comment va-t-elle fonctionner concrètement ?
L’Université du coton sera une université sans mur. Elle a deux volets : un volet de formation continue et un volet diplômant pour un master de spécialisation qui, lui, sera forcément localisé dans une université africaine qui est en train d’être identifiée. On parle beaucoup de Bobo-Dioulasso, au cœur de la zone cotonnière du Burkina Faso, mais cela pourrait être aussi dans d’autres lieux.
La formation continue se déroulera par modules au plus près des acteurs, c’est-à-dire les leaders professionnels et les permanents des organisations professionnelles partout en Afrique, dans la sous-région car cela va concerner les 13 pays membres de l’AProCA, d’Afrique de l’Ouest et du Centre.
L’originalité est que le projet de faisabilité a été élaboré avec HEC. On est allé chercher la meilleure école de gestion dans tous les classements européens pour franchir une nouvelle étape. Je crois qu’il y a beaucoup de travail qui a été fait précédemment pour que les professionnels africains s’organisent en structure associative. C’est une étape faite. Maintenant, ce qu’ils réclament est de maitriser les compétences comme n’importe quel entrepreneur. Donc le déficit était un déficit de compétence entrepreneurial.
C’est pour ça qu’on a mobilisé HEC. Le projet est aujourd’hui porté par ce comité des fondateurs qui réunit l’AProCA, FARM et HEC.

L’Université est plus axée sur le commerce, l’agronomie, ou l’ensemble des éléments ?
L’ensemble des éléments, mais maitriser par les compétences de gestion. Par exemple en matière de marketing, quelle est la demande en coton et comment peut-on ajuster ou améliorer la réponse du coton africain pour qu’il soit mieux adapté à la demande ? En terme de recherche technologique, quelles sont les innovations disponibles : les variétés, le labour, les intrants. Qu’est-ce que ça rapporte ? Qu’est-ce que ça coute ? Comment gère-t-on l’accès aux innovations pour qu’on accroisse la compétitivité. Le conseil en gestion ? Ils ont mis en place dans certaines régions du Burkina des conseils en gestion et ils ont pu gagner 50% de rendement par une meilleure utilisation des intrants, des pesticides, de la récolte, de la date de la récolte, du transport, etc.

Quand l’université va-t-elle ouvrir ses portes ?
On espère démarrer les formations continues à partir de l’automne et préparer le contenu pédagogique du master pour la rentrée universitaire 2008.

Si Bobo-Dioulasso est retenu, y aura-t-il de nouveaux bâtiments construits ou sera-t-elle abritée dans des espaces existants ?
Ce sera abrité dans un espace déjà existant. C’est vraiment une université sans mur qui n’a pas l’intention de créer des infrastructures supplémentaires, peut-être renforcer certaines capacités d’accueil local. Mais, s’agissant de la formation continue, l’idée est de former environ 300 leaders et permanents des organisations professionnelles et puis une collectivité d’environ 10 000 personnes qui sont les unions locales.
En terme de formation dans le master de spécialisation, c’est une vingtaine d’étudiants par an. Donc ce ne sont pas des effectifs considérables.

Qui financera cette structure ?
La structure sera financée par des financements privés et des financements publics. FARM est une fondation qui regroupe un certain nombre de grandes entreprises : Crédit agricole, Suez, Casino, Air France-KLM, Limagrain, GNIS, l’Agence française de développement.
Nous recherchons aussi d’autres partenaires plus spécialisés vers le projet. Et puis nous comptons, bien sur, sur le soutien de la Commission européennes et des bailleurs de fond français et plus largement européens

Le coût de cette université ?
Le coût de cette université a été chiffré à 4 600 000 euros pour une première période de trois ans comprenant l’ensemble des formations continues, le master et l’accueil de l’ensemble des étudiants.

Les enseignants seront-ils africains, européens, américains ?
Ils seront africains et européens. D’ailleurs, il y a une chose intéressante à noter : il y aura une ingénierie de pédagogie. HEC a une méthode la dessus. L’idée est de former dans chacune des unions professionnelles africaines des responsables de formation qui seront capables de monter leur programme de formation continue et d’évaluer les compétences des formateurs qu’ils mobiliseront. C’est très intéressant. Il y aura, bien sur, un apport de HEC. Il y aura aussi des partenariats avec des équipes de recherche, universitaire, économistes, des équipes de recherches africaines, le Coraf, le Cirad, etc.

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