Noix de cola : pourquoi ce regain d’intérêt en Côte d’Ivoire ?

 Noix de cola : pourquoi ce regain d’intérêt en Côte d’Ivoire ?
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Depuis près d’une dizaine d’années, la culture de la noix de cola en Côte d’Ivoire connaît une véritable révolution et un engouement réel dans le monde paysan, avec un nombre croissant de producteurs ivoiriens et des plantations allant jusqu’à 10 hectares (ha). Certes, l’activité de la cola est très ancienne en Côte d’Ivoire mais elle a longtemps été considérée comme un produit de cueillette, les producteurs se contentant d’exploiter des arbres spontanés trouvés lors de la création des plantations de cacao et de café. Aujourd’hui, avec l’avènement sur les marchés de nouveaux produits à base d’extraits de la noix de cola et l’exploitation abusive des forêts avec pour corollaire la disparition des colatiers spontanés, on assiste à la création de plantations, de colateraies, la culture se substituant à la seule cueillette.

La colaculture a toujours fait vivre bon nombre d’Ivoiriens et constitue une source de revenu substantiel pour de nombreuses familles.

Un produit aux multiples utilisations

Rappelons que le colatier est un arbre typiquement Africain, cultivé dans de nombreux pays du continent comme la Côte d’Ivoire, le Nigeria, le Cameroun mais aussi ailleurs comme en Jamaïque. Pouvant atteindre jusqu’à 20 m de hauteur, ses fruits sont constitués de 3 à 5 follicules dans lesquels sont logées des noix dont la couleur varie du rouge foncé au blanc crème, en passant par le rose. Ses noix sont très prisées dans la pharmacie moderne, dans l’industrie textile (confection de la teinture), dans la cosmétologie. Dans l’agroalimentaire, du fait de sa forte teneur en caféine, la noix de cola est utilisée pour la fabrication de boissons gazeuses, tonifiantes et énergisantes, de vins, de liqueurs, etc. Dans la médecine traditionnelle africaine, on utilise la cola pour traiter certaines maladies (toux, fontanelle, diarrhée, etc.). Par ailleurs, dans la zone soudano-sahéliennes à dominante musulmane, la cola exerce des fonctions sociales, culturelles et religieuses importantes.

En Côte d’Ivoire,outre les principales cultures d’exportations (café, cacao, palmier à huile, hévéa, coton, anacarde, etc.), la noix cola fait partie des produits de plus en plus exploités. En termes de production de noix fraîche, le rendement moyen est de l’ordre de 2 à 2,5 tonnes par hectare (t/ha). Mais le rendement augmentant avec l’âge des arbres, certains peuvent atteindre 7 à 10 tonnes. Le prix d’achat variant entre FCFA 250 et 600 le kilo, le producteur peut tirer un revenu allant de FCFA 975 000 à plus de FCFA 2 millions par hectare et par récolte, sachant que la récolte se fait deux fois par an. Hormis ces deux récoltes, il existe quelques petites productions qui interviennent au cours de l’année. Tout ceci constitue un réel avantage pour le colaculteur.

Un prix multiplié par deux à l’export

La Côte d’Ivoire est le deuxième producteur mondial de noix de cola et le premier exportateur avec une récolte annuelle estimée à environ 260 000 t de noix fraîches en 2016 et des exportations de 200 000 t, générant un chiffre d’affaires estimé actuellement à plus de FCFA 100 milliards.

Au niveau de la commercialisation, le marché ivoirien de la cola est très spéculatif. La fixation des prix se fait par l’acheteur, après négociations avec le producteur. Les noix fraîches sont vendues par kilo entre FCFA 250 à 600 selon les périodes et les localités. Certaines structures de transformation achètent les follicules entre FCFA 125 et 150 F le kilo. Il faut également savoir que la cola se vend au détail entre FCFA 15 et 25 la noix selon la couleur des noix, les blanches étant beaucoup plus chères que les rouges.

La commercialisation extérieure est assurée par les commerçants grossistes qui exportent vers le Nigéria qui représente le plus gros acheteur de noix ivoiriennes, de l’ordre de 70 % de ses exportations, mais aussi les pays sahéliens (Mali, Burkina Faso, Niger etc.). Les exportateurs s’approvisionnent sur les principaux marchés localisés à Bouaké et Anyama et revendent à l’export le kilo de noix fraîche entre FCFA 1 300 et 1 800 en moyenne, soit largement plus du double du prix perçu par le producteur. Ceci dit, bien que regroupés en association ou en coopérative, les producteurs peuvent exporter eux-mêmes leur noix. Tout dépend alors de leurs capacités financières et de leurs relations avec l’extérieur.

Une filière à façonner

En dépit de son importance socioéconomique et de sa rentabilité, la production de cola en Côte d’Ivoire se heurte à plusieurs difficultés aussi bien au niveau de la production que de la commercialisation. D’où la volonté de l’Etat ivoirien avec l’Association professionnelle des producteurs et exportateurs de la cola de Côte d’Ivoire (Apprexco-CI)[1], (voir La culture de la cola se ravive-t-elle en Côte d’Ivoire ?) de redynamiser et moderniser le secteur. La mise en filière de la noix de cola constitue un élément catalyseur afin de pouvoir mener des actions constructives en direction des différents acteurs. Ces actions portent sur la promotion la cola ivoirienne sur les marchés, l’exploitation de nouveaux marchés (notamment les marchés asiatiques), l’organisation de la filière en termes de production, de commercialisation et de fiscalité, la mise en place d’un système communication entre les acteurs, la réglementation de la filière, la mise en place de coopératives agricoles et l’harmonisation des prix d’achat au producteur. En septembre dernier, l’Organisation interprofessionnelle agricole de la filière cola (Oiacola) a été créée par décret en Conseil des ministres.

Au niveau de la recherche, d’importants travaux portant sur la sélection de nouvelles variétéset la mise en place d’itinéraires techniques performants, les traitements post-récolte des noix sont en cours d’exécution par le Centre national de recherche agronomique (CNRA). Il s’agit d’améliorer le matériel végétal en qualité et en quantité, de maîtriser les itinéraires techniqueset de réduire les pertes post-récolte.

 

 

[1]Plusieurs associations interviennent dans la filière : l’Association nationale des planteurs, producteurs et magasiniers de Cola de Côte d’Ivoire (ANAPPROMACOCI), l’Association nationale des producteurs, acheteurs et assimilés dela Cola de Côte d’Ivoire (ANAPROACOCI), l’Association nationale des planteurs, producteurs, importateurset exportateurs de colas de Côted’Ivoire (ANAPPIEXCOCI). Elles sont toutes regroupées dans la Fédération nationale des professionnels de la filière cola de Côte d’Ivoire (FENAPROCOCI).

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