La Chronique Matières Premières Agricoles au 25 juin 2020

 La Chronique Matières Premières Agricoles au 25 juin 2020
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L’annonce hier par la Banque centrale européenne (BCE) d’une injection record de € 2 700 milliards de liquidités dans le cadre des opérations de refinancement à plus long terme ainsi que l’engagement à fournir aux banques centrales en dehors de la zone euro des prêts en euro pour faciliter la reprise économique, ont boosté les marchés financiers européens. Toutefois, le climat mondial demeure lourd avec l’évolution inquiétante de la pandémie notamment aux Etats-Unis où la Floride, l’Oklahoma et la Caroline du Sud ont fait état mercredi d’un nombre record de nouveaux cas d’infection par le coronavirus. Au total, le pays a enregistré près de 36 000 cas supplémentaires en 24 heures, un chiffre proche du pic atteint fin avril à 36 426.

Face à cela et malgré tout, le dollar n’a pas perdu sa qualité de valeur refuge avec une valeur qui s’est renforcée hier face à l’euro qui a terminé à $ 1,1224. Quant au pétrole, après avoir chuté de plus de 5% mercredi suite à l’annonce d’un nouveau record des stocks de brut américain, le baril de Brent a terminé en hausse hier à $ 40,92 et le brut léger américain (WTI) à plus de $ 38.

CACAOCAFÉCAOUTCHOUCCOTONHUILE DE PALMERIZSUCRE

CACAO

C’est une très belle remontée que la fève a effectué cette semaine. Partie de £ 1 690 la tonne, elle a clôturé hier soir à Londres à £ 1 764 sur l’échéance septembre, gagnant ainsi £ 74 sur quatre jours de marché. New York lui a emboîté le pas, passant de $ 2 252 à $ 2 386 la tonne.

Mais la grimpée s’est faite le nez dans le guidon. L’impossibilité à maîtriser le coronavirus dans un certain nombre d’endroits de la planète et sa réapparition dans d’autres font craindre pour l’évolution de la demande en cacao, faisant chuter le prix de la fève à son plus bas en un an au cours de la semaine écoulée. “Je présume que les commerciaux ont décidé de revenir à l’achat après la baisse. Mais je ne pense pas que ce sera une tendance à long terme“, a déclaré un courtier new-yorkais.

En effet, cette baisse anticipée de la demande alors que la campagne 2020/21 s’annonce belle pourrait faire grimper l’excédent à 300 000 tonnes (t), soit le double des prévisions initiales, a indiqué Citi dans sa note de marché, prenant à témoin les broyages au Brésil qui ont baissé de 7% en avril et de 36% en mai. Aux Etats-Unis, Citi estime que la demande en confiserie baissera aussi de 7% à 10% cette année.

Commerzbank partage le même pessimisme, soulignant que les craintes du coronavirus et la crise économique mondiale impacteront défavorablement la demande même sur le plus long terme. “En outre, les traders s’attendent à ce que la prime des $ 400 la tonne qui seront payable au dessus du prix coté sur les marchés à terme pour du cacao de Côte d’Ivoire et du Ghana sera un élément de plus qui freinera la demande”, écrit la banque dans sa note de marché.

Côté pays producteurs, les arrivages aux ports ivoiriens ont atteint 1,936 million de tonnes (Mt) entre le 1er octobre et le 21 juin, estiment les exportateurs interrogés par Reuters. Ceci représente une baisse de 6,9% par rapport aux 2,080 Mt reçues à pareille époque la campagne dernière.

Dans les campagnes productrices du n°1 mondial, la pluviométrie est bonne, supérieure à la moyenne de ces dernières années, mais il manque un peu de soleil pour booster la récolte intermédiaire qui s’étend d’avril à septembre.

Le Ghana, pour sa part, a tenu à rassurer les marchés cette semaine quant à sa capacité à lever son prêt annuel de préfinancement de campagne 2020/21. «Le 12 juin 2020, les institutions financières dont les banques traditionnelles du Cocobod ont soumis leurs propositions. Ainsi, le Cocobod négocie actuellement les termes des propositions avec les banques, ce qui est la pratique normale. Une fois les termes finalisés, toutes les procédures seront suivies jusqu’à leur conclusion logique, jusqu’à la signature de la facilité prévue en septembre 2020 », a précisé Joseph Boahen Aido, directeur général du Cocobod (lLire : Cacao : mise au point du Cocobod sur le financement de la campagne cacaoyère 2020/21).

Côté entreprises, l’américain Cargill a annoncé cette semaine lancer en Inde sa première unité de fabrication de chocolat en Asie. Elle devrait être opérationnelle d’ici la mi-2021 et devrait créer 100 nouveaux emplois. Au démarrage, sa production annuelle de chocolat serait de 10 000 tonnes. D’autre part, hier, Cargill annonçait un investissement de $ 3,9 millions dans une cinquième ligne de production et de nouveaux tanks à chocolat dans son unité de fabrication à Kalmthout en Belgique (Lire : Cargill investit à tour de bras dans le cacao).

CAFÉ

Quasiment du sur place. De 95,9 cents la livre (lb) vendredi dernier, l’Arabica a terminé hier soir à New York à 95,8 cents face à la faiblesse de la demande en perspective et le fort potentiel productif notamment au Brésil. Le Robusta, quant à lui, a glissé de $ 1 175 à $ 1 154 la tonne hier soir à Londres.

En revanche, sur les marchés en Asie, le Robusta est parti à la hausse car l’offre est étroite au Vietnam, n°1 mondial de cette variété de café. Les producteurs dans la ceinture caféière des Central Highlands se sont vus offrir 32 000 dongs ($ 1,38) pour leur kilo de café contre 31 300 à 31 700 dongs il y a une semaine. Mais ceci reste en dessous de leurs coûts de production qui est de 33 000 dongs et donc ils sont récalcitrants à vendre. En outre, ils ont déjà vendu leur poivre qu’ils cultivent en binôme avec le café et cela leur a permis de faire rentrer de l’argent frais ; ils peuvent donc attendre un peu pour le café dans l’espoir que les prix remontent. En revanche, les traders estiment, quant à eux, que ces prix sont trop élevés et ne permettent pas de dégager de marges. Selon un autre trader interrogé par Reuters, il n’y a aucune raison pour que les prix remontent et il estime qu’ils devraient être aux alentours des 30 600 à 32 000 dongs durant le prochain mois. A l’export, les traders au Vietnam ont proposé le Grade 2, 5% brisures et grains noirs, avec une prime de $ 240 la tonne par rapport au prix à Londres contre $ 250 à $ 260 la semaine dernière.

En Indonésie, les volumes récoltés commencent à arriver de façon soutenue. Les traders dans la province de Lampung à Sumatra ont indiqué que la prime par rapport à la cotation de Londres était inchangée par rapport à la semaine dernière et ce, malgré des volumes plus importants de produits physiques car maintenant les récoltes rentrent bien. Mais la raison du bon maintien des prix se trouve en ce que les acheteurs internationaux sont toujours en concurrence frontale avec les acheteurs locaux qui fabriquent essentiellement du café soluble. Et cette concurrence attise les prix. Un trader a indiqué que la prime était de $ 340 par rapport au contrat sur septembre et un autre $ 370.

CAOUTCHOUC

Le marché du caoutchouc s’est affaibli cette semaine lesté par le nombre croissant de cas de Covid-19 au niveau mondial et par les perspectives économiques baissières du Fonds monétaire international avec une contraction de 4,9% de l’économie mondiale en 2020. Les cours sur le Tokyo Commodity Exchange (Tocom) ont clôturé hier à 157,4 yens ($1,47) le kilo contre 158,2 yens vendredi dernier. Les marchés des matières premières sont fermés en Chine jeudi et vendredi à l’occasion de la fête des bateaux dragons.

Côté entreprises, le fabricant thaïlandais de gants en caoutchouc, Sri Trang Gloves Thailand (STGT) filiale du plus grand producteur de caoutchouc naturel du pays, Sri Trang Agro Industry Pcl, prévoit de lever 14,9 milliards de baths ($480,34 millions) dans le cadre d’un premier appel public à l’épargne (IPO). Les fonds serviront à accroître la capacité de production – qui devrait passer de 32,6 milliards de gants par an à 100 milliards d’ici 2032 – et à rembourser la dette. STGT a enregistré un chiffre d’affaires de 3,79 milliards de bahts au cours des trois mois se terminant en mars, en hausse de 25% par rapport à 2,98 milliards de bahts il y a un an.

La période d’introduction en bourse devrait se dérouler du 23 au 25 juin avec la vente de 438,78 millions d’actions au prix de 34 bahts chacune. Le premier jour de bourse est prévu pour le 2 juillet, selon un communiqué de l’entreprise. Après la vente d’actions, sa société mère, Sri Trang Agro Industry, réduira ses participations de 73% à 50,7%.

COTON

Les cours du coton n’ont guère varié cette semaine avec une clôture hier à 59,81 cents la livre contre 59,7 cents vendredi dernier. Un marché une nouvelle fois soutenu par les bonnes ventes de coton américain, notamment vers la Chine, qui a absorbé environ les ¾ des ventes de cette semaine. Autre élément favorable, le manque de précipitations dans la plus grande région productrice de coton aux Etats-Unis, le Texas. Le dernier rapport du département américain de l’agriculture (USDA) a montré que le coton était planté à hauteur de 96%.

La pandémie de la Covid-19 a frappé de plein fouet l’industrie textile mondiale et ainsi toute la chaîne de valeur du coton. Les dégâts se chiffrent en milliards de dollars. Le Comité consultatif international du coton (ICAC) vient de publier un rapport très riche sur les impacts potentiels du Covid-19 sur le coton, passant en revue les impacts sur les principaux pays producteurs de coton, sur l’industrie textile, le négoce (Lire : Le marché du coton peut-il se redresser après le choc violent de la Covid-19 sur la demande ?).

La Côte d’Ivoire n’aurait vendu que 20% de la récolte 2019/20 qui s’est établie à 210 902 tonnes de coton fibre, selon l’Association professionnelle des sociétés cotonnières de Côte d’Ivoire (Lire : Les filières coton et cajou en Côte d’Ivoire durement frappées).

HUILE DE PALME

Après avoir gagné 3,8% la semaine dernière, marquant son sixième gain hebdomadaire, les cours de l’huile de palme se sont contractés cette semaine passant de 2475 ringgits la tonne vendredi dernier sur la Bursa Malaysia Derivatives Exchange à 2398 ringgits ($560,94) hier à la clôture. Les marchés extérieurs – la chute des marchés boursiers et du pétrole et la hausse des cas de coronavirus – ont pesé sur l’huile de palme ainsi que la perspective d’une baisse historique de la consommation mondiale.

Si l’assouplissement des mesures de confinement à travers le monde a impulsé un regain de demande pour l’huile de palme – les exportations de la Malaisie ont d’ailleurs grimpé de 35,5% à 37,2% du 1er au 25 juin – la reprise pourrait être de courte durée, estiment les experts. Ils tablent sur une demande encore faible cette année qui ne reprendra que l’année prochaine. Pour la première fois, la consommation d’huile de palme diminuera suite à la pandémie du Covid-19, estime le principal analyste du secteur, le directeur d’Oil World, Thomas Mielke. Elle pourrait baisser de 3% en 2019-20 (octobre-septembre), soit de 2,2 millions de tonnes (Mt). “Ceci est sans précédent et se compare à une augmentation de la consommation mondiale de 8 Mt la saison dernière”, a déclaré Thomas Mielke lors d’un séminaire en ligne. Précisant “L’effet persistant de la crise du Covid-19 réduira le revenu disponible, limitant les dépenses alimentaires, en particulier dans les pays en développement“. La consommation de biodiesel a aussi souffert dans le prolongement de la chute des prix du pétrole, a estimé lors de ce même séminaire James Fry, président de LMC International. Il a également prévu que les stocks d’huile de palme de Malaisie pourraient augmenter de 50% à 3 Mt d’ici la fin de l’année. Une analyse que ne partage pas le Malaysian Palm Oil Board, tablant sur une hausse de 14,4% à 2,3 Mt.

L’Afrique suscite la convoitise des deux grands producteurs d’huile de palme, l’Indonésie et la Malaisie, le continent présentant des opportunités d’exportation (Lire : La Malaisie augmente ses ventes d’huile de palme à l’Afrique, notamment à la Côte d’Ivoire et L’Indonésie lorgne sur l’Afrique pour ses exportations d’huile de palme).

L’accord de libre échange entre la Suisse et l’Indonésie, signé par le Parlement en décembre 2019, sera soumis à référendum dans les mois à venir, l’initiative « Stop à l’huile de palme » ayant recueillie le nombre suffisant de signatures. C’est la première fois en Suisse qu’un accord de libre échange est soumis à la votation du peuple (Lire : L’ALE entre l’Indonésie et la Suisse soumis à référendum à cause de l’huile de palme).

RIZ

Evolution divergente des prix à l’exportation en Asie avec une baisse des prix au Vietnam tandis qu’ils ont rebondi en Inde avec un regain de demande africaine.

Au Vietnam, les prix du Viet 5% ont chuté dans une fourchette entre $405 et $450 la tonne jeudi, contre $450 la semaine dernière. Le riz d’hiver-printemps est offert à $450 la tonne, tandis que la récolte d’été-automne est proposée à $405 -$ 410 la tonne, ont indiqué les commerçants. La qualité du riz été-automne serait plus faible en raison des fortes pluies pendant la récolte. Mais la demande des acheteurs étrangers est aussi faible, ce qui pèse également sur les prix.

En Inde, les prix du riz étuvé 5% se sont appréciés à $ 373 -$378 la tonne contre $366 -$372 la semaine dernière. L’augmentation des cas de coronavirus a incité certains acheteurs en Afrique à augmenter leurs achats, a déclaré un exportateur basé à Kakinada dans l’Etat du sud de l’Andhra Pradesh.

En Thaïlande, les prix du Thaï 5% se sont établis à $514- $ 520 la tonne, contre $505- $525 la semaine dernière. La demande est toujours modérée mais l’offre est faible et le bath s’est apprécié.

En Indonésie, l’agence indonésienne d’achat de produits alimentaires Bulog prévoit d’acheter 1,57 million de tonnes (Mt) d’équivalent riz aux agriculteurs locaux l’an prochain, selon une déclaration du directeur général Budi Waseso au Parlement. Elle ne prévoit pas d’importer de riz cette année. En réponse au Covid-19, l’agence distribuera 900 000 tonnes de riz dans le cadre du programme d’assistance sociale du gouvernement à 10 millions de familles bénéficiaires à l’échelle nationale. 450 000 premières tonnes devant être distribuées au cours des trois prochains mois, tandis que 450 000 tonnes supplémentaires seront distribuées jusqu’à la fin de l’année.

SUCRE

Le sucre roux a glissé sur la période sous revue, passant de 12,05 cents la livre (lb)à la clôture vendredi dernier à 11,81 cents hier soir à New York. Le sucre blanc l’a suivi, avec une clôture à Londres hier soir à $ 356,60 la tonne contre $ 368,30 en fin de semaine dernière.

Un marché lourd avec non seulement le Brésil qui produit à tour de bras mais aussi l’Inde. L’Indian Sugar Mills Association a déclaré hier que la production nationale serait en hausse de 12% la prochaine campagne 2020/21, à 30,5 Mt contre 27,2 Mt attendue pour la campagne en cours qui s’achève fin septembre. Ainsi, dans le deuxième Etat producteur de sucre du pays, dans le Maharashtra, les superficies consacrées à la canne ont augmenté par rapport à l’année dernière et dans ce seul Etat, la production atteindrait 10,13 Mt en 2020/21 contre 6,16 Mt pour celle en cours.

Au Brésil, l’heure est aussi à l’abondance. La production sucrière dans le centre-sud a atteint 10,57 Mt jusqu’à maintenant sur la campagne 2020/21 qui a démarré en avril, soit 57% de plus qu’à la même période la campagne précédente, a souligné mercredi le groupe industriel Unica.

Pour sa part, le négociant de sucre et d’éthanol Copersucar a déclaré qu’une grande partie, 65% à 75%, de ses ventes de sucre sur 2020/21, avaient déjà été couvertes -hedgées. Copersucar qui est un partenaire de Cargill dans la plus grosse entreprise de négoce mondiale du sucre Alvean Sugar, voit une forte hausse des exportations brésiliennes tandis que la demande mondiale devrait rester relativement stable sur 2020/21, estime-t-il. En revanche, le marché de l’éthanol est plutôt calme actuellement mais pourrait se dynamiser un peu plus tard cette année, ce qui pourrait donner lieu à davantage d’importations par le Brésil d’éthanol des Etats-Unis dans quelques mois, souligne le directeur financier de Copersucar Thomas Caetano Manzano. Une analyse que partage Rabobank qui a indiqué cette semaine que si les raffineries brésiliennes continuaient à miser autant sur le sucre, l’offre d’éthanol pourrait être étroite en fin d’année si la demande se dynamise.

Quant au groupe coopératif français Cristal union, n°4 européen du sucre, mardi il a encore fait état de pertes financières annuelles mais qui sont moins importantes que l’exercice précédent, avec un résultat net de -€ 89 millions sur son exercice 2019/20, au 31 janvier contre -€ 99 millions l’exercice précédent, essentiellement à cause du financement du plan de restructuration lancé au printemps 2019. En effet, ont été fermées les sucreries de Bourdon, Toury et l’unité de conditionnement d’Erstein, ce qui a occasionné une perte de € 61 millions pour accompagner le personnel et les planteurs et engager la revitalisation des sites. Mais, dès la prochaine campagne, le groupe renouerait avec les bénéfices. Son chiffre d’affaires a reculé légèrement à € 1,59 milliard contre € 1,69 million l’exercice précédent.

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