Les opportunités agricoles au Ghana passées au peigne fin par la Banque mondiale et la SFI

 Les opportunités agricoles au Ghana passées au peigne fin par la Banque mondiale et la SFI
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L’agribusiness, aux côtés des nouvelles technologies et des services à l’éducation, ont été identifiés au Ghana comme des secteurs à forte potentialité de croissance, selon une récente étude de la Banque mondiale (BM) et de la Société financière internationale (SFI) Creating Markets in Ghana, Country Private Sector Diagnostic.*

Un certain nombre de réformes sont nécessaires afin que ces potentiels deviennent réalités, notamment l’ouverture de marchés des terres rurales ou encore la fourniture d’une énergie bon marché, le développement de compétences technologiques ou encore le financement de PME et de PMI. Sans compter l’importance de faciliter l’émergence d'”investisseurs pionniers” qui donnent l’exemple et créent une impulsion.

40% des travailleurs agricoles au Ghana ne sont pas rémunérés

Tout d’abord, les auteurs dressent un état des lieux. L’agribusiness au sens large, comprenant l’agriculture et les activités en aval, représente 25% du PIB au Ghana et 35% des exportations. Depuis 2008, ce secteur croît au rythme annuel de 5%. A noter que 40% des travailleurs au Ghana travaillent dans des activités agricoles non salariées.

En 2016, les exportations alimentaires du Ghana ont représenté $ 13,6 milliards. Le cacao est, bien évidemment, en tête, représentant 81% du total, 25% des entrées en devises, soit $ 3 milliards en 2016. La viande et les oléagineux représentent, chacun, 4% des exportations agricoles. Les fruits  ont généré $ 227 millions en 2016, soit 6% des exports, dominées par les bananes, les mangues, les noix de cajou et les ananas. Parmi les “divers” (5%), on note les légumes frais, essentiellement le manioc, qui ont totalisé $ 35 millions à l’export et les jus $ 8 millions.

La plupart des produits agricoles sont exportés aux Etats-Unis, dans l’Union européenne et au Japon mais les marchés régionaux progressent. Les noix de cajou ont trouvé de nouveaux marchés en Inde et au Vietnam“, soulignent les auteurs.

A l’importation, les produits agricoles et agroalimentaires représentent 11% de la facture totale, les produits animaux 3%. Une facture alimentaire qui ne cesse de croître, passant de $ 8,7 milliards en 2007 à $ 13,3 milliards en 2014, en raison de la croissance démographique et urbaine, mais aussi des revenus en hausse : la demande en produits importés est particulièrement forte pour la viande, les produits laitiers, les légumes frais et transformés. Les Ghanéens se tournent vers les produits importés pour avoir de la qualité et une sécurité alimentaire, ont observé les auteurs. Les importations sont estimées être multipliées par 4 sur les prochaines vingt années, sauf si la production locale produit de la qualité.

Les plaines d’Accra et la Northern Savannah Agro-ecological Zone identifiées

Dans un modèle multiplicateur associant les emplois potentiels et la valeur ajoutée élaboré par les auteurs du rapport de la Banque mondiale et de la SFI, les secteurs aux plus fortes potentialités sont largement agricoles comme les graines oléagineuses, l’élevage de bétail, de mouton, de chèvres voire de chevaux, les légumes et fruits, la forêt, les céréales et les haricots, les produits animaux, la canne à sucre. A noter que chaque million de dollar investi dans la production agroindustrielle génère 750 emplois, selon la BM-SFI.

En termes géographiques, les plaines d’Accra offrent des conditions propices à l’horticulture avec des produits à “haute valeur” comme les fruits frais, les jus, les légumes notamment les avocats. Ceci peut être développé au travers de l’agriculture contractuelle.

Les auteurs ont également identifié la zone agro-écologique de la Savannah du Nord (NSEZ), plus pauvre, mais où peuvent être développés, sur quelque 6 millions d’hectares arables, la canne à sucre, le manioc, le coton, les noix de coco, de cajou, le karité mais aussi l’élevage. Quelque  400 000 emplois pourraient être ainsi créés, selon les calculs de la Banque mondiale dans une note sectorielle à venir: ‘Ghana: Transforming and Modernizing Agriculture’. Actuellement, les cultures sont à 40% seulement de leur potentiel, selon un calcul du ministère de l’Agriculture.

Des obstacles identifiés

Pour développer ceci, il faut, selon la BM-SFI, permettre à de gros investisseurs d’accéder à la terre. Or, l’administration et la gouvernance foncière sont actuellement très complexes au Ghana. Et les auteurs de citer le cas  dans la région du Volta où il a fallu plusieurs années avant que des entreprises puissent sécuriser des titres fonciers sur des terres préalablement identifiées.

Il faut aussi un meilleur accès à la formation, à l’irrigation, aux finances. Le gouvernement doit être plus partie prenante et soutenir le développement de l’agriculture commerciale. Il doit aussi veiller à ce que les normes de qualité et phytosanitaires soient respectés. Ceci, rappellent les auteurs, aurait permis d’éviter l’embargo de l’UE en 2015 sur les légumes venant du Ghana, un secteur qui représentait en 2014 $ 7 millions, portant sur 2 900 tonnes (lire nos informations). Rappelons que l’interdiction  été étendue en 2016 aux poivrons, aubergines et courges.  Le Ghana demeure sous surveillance. Ceci lui a  fait perdre des parts sur ce marché européen lucratif.

Quelques clés du succès

Pour avoir un retour assez rapide et donc attirer des investissements conséquents, nationaux ou étrangers,  il faut se concentrer sur les activités destinées à l’exportation, précisent les auteurs, car pour l’instant le marché national ghanéen est trop étroit pour permettre de dégager des économies d’échelle.

Le secteur privé peut jouer aussi un grand rôle notamment dans la promotion des marchés du foncier rural. Les auteurs rappellent les importants projets en cours notamment au travers du Ghana Commercial Agricultural Development Project de la Banque mondiale qui développent des contrats de location types entre communautés locales, investisseurs privés et l’administration foncière. Le développement de marchés fonciers peut passer par la mise sur le marché ou aux enchères  de terres gouvernementales.

La Bank of Ghana a un rôle déterminant dans un meilleur accès aux financements. Et les auteurs de souligner quelques initiatives qui connaissent déjà un succès au Ghana comme le financement au travers les récépissés d’entrepôts utilisé par le Ghana Grains Council, en collaboration avec des agences de certification. L’USAID a également un projet dans le nord du Ghana dans les filières maïs, soja et riz pour identifier des opportunités d’investissements et proposer des “packages” financiers, tandis que la KfW allemande a développé un “Outgrower value chain fund” permettant du refinancement bancaire pour des investissements à moyen et long termes.

L’accès à la formation et à l’irrigation sont, également, soulignés comme étant des éléments majeurs de développement, davantage de liens devant être établis, de façon générale, avec  le développement des TIC et les opportunités que cela ouvre.

Enfin, la Banque mondiale et la SFI invitent le gouvernement ghanéen à soutenir tout particulièrement l’arrivée des premiers – ces “investisseurs pionniers”, les “first-mover“- dans une filière ou une région, afin de réduire leurs coûts et leurs risques. Ceci a notamment été le cas pour des chaînes de valeur en matière horticoles qui ont investi et développé avec succès des marchés à l’export.

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