La Chronique Matières premières agricoles au 27 janvier 2022

 La Chronique Matières premières agricoles au 27 janvier 2022
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Les marchés de matières premières agricoles ont plongé, de façon générale, cette semaine car la perspective d’un resserrement de la politique monétaire de la Réserve fédérale américaine conduit les investisseurs à se défaire de leurs avoirs les plus risqués, typiquement les matières premières agricoles.  Ceci a provoqué une forte volatilité des marchés cette semaine, stimulée par le bruit de bottes en Russie et en Ukraine.

Toutefois, les excellents résultats de nombreuses entreprises et la publication d’indicateurs macroéconomiques jugés favorables ont contrebalancé la situation. Ainsi, le PIB de la France a progressé de 7% en 2021, une croissance supérieure aux prévisions officielles et la plus forte depuis 1969. Aux Etats-Unis, elle est de 5,7%, sa meilleure performance annuelle depuis 1984 après une contraction de 3,4% du PIB en 2020, la plus forte depuis 74 ans, a annoncé le Département du Commerce. Au quatrième trimestre 2021, sa croissance a été de 6,9% en rythme annualisé (+2,3% au troisième trimestre) grâce notamment à la reconstitution des stocks des entreprises pour répondre à la reprise de la demande. La poursuite de la reprise économique, qui a contribué à la forte baisse du chômage tout en alimentant l’inflation, est l’un des principaux facteurs qui ont conduit mercredi la Réserve fédérale à annoncer qu’elle relèverait “bientôt” ses taux d’intérêt.

A noter que de nombreux pays en Asie fêteront la semaine prochaine le Nouvel an lunaire, entrainant la fermeture de marchés et un ralentissement de l’activité économique.

Hier soir, l’euro est tombé à $ 1,1150, le dollar étant à son plus haut depuis juillet 2020 face à un panier de devises de référence.

Quant au pétrole, le Brent a terminé à $ 89,9 le baril et le brut léger américain (WTI) à $ 87,25.

CACAOCAFÉCAOUTCHOUC COTON HUILE DE PALME RIZSUCRE

CACAO

C’est la chute ! A Londres, la tonne (t) de fèves a clôturé hier soir à £ 1 680 alors qu’elle était encore à £ 1 737 en fin de semaine dernière, tandis que New York passait de $ 2576 à 2 451 la tonne hier soir. On retrouve les cours quasiment aux mêmes niveaux qu’en début de mois…

Selon Citigroup, le cours du cacao serait actuellement un juste reflet du marché. Il estime que le marché mondial sera déficitaire de seulement 85 000 t.

De Côte d’Ivoire viennent des avis divergents quant à la météo. Pour certains, elle serait plutôt bonne pour l’évolution de la campagne cacaoyère mais d’autres s’inquiètent du manque de pluies et d’un harmattan plus fort ces derniers jours sur l’évolution de la récolte intermédiaire d’avril à septembre. Quant aux arrivages aux ports d’Abidjan et de San Pedro, ils ont totalisé 1,259 Mt entre le 1er octobre et le 23 janvier, estiment les exportateurs, en baisse de seulement 0,9% par rapport à la même période la campagne dernière. L’écart se resserre….

Face à cela, le dynamisme des grands groupes de confiseurs s’est encore affiché cette semaine.  Ainsi, le suisse Barry Callebaut a annoncé une hausse de plus de 14% de son chiffre d’affaires au premier trimestre de son exercice 2021/22, à 2,032,3 millions de francs suisses (Fs), ce qui excède sa performance de ses volumes de ventes (+8,9%) sur les trois premiers mois de son actuel exercice 2021/22 (Lire : Barry Callebaut affiche une véritable performance sur son 1er trimestre). Nestlé, l’autre géant, a annoncé vouloir verser une prime de € 480 aux cacaoculteurs qui mettent en œuvre des mesures durables sur leur ferme, dont l’envoi des enfants à l’école. “Une prime aux ménages est bien plus inclusive pour les petits agriculteurs, en s’assurant véritablement que personne n’est laissé de côté“, a déclaré le responsable de l’activité confiserie de Nestlé, Alexander von Maillot, à Reuters (Lire : € 480 de Nestlé pour le cacaoculteur qui scolarise ses enfants, élague, plante et se diversifie).

CAFÉ

Le café perd de son tonus ! Le cours de l’Arabica coté à New York est passé de $ 2,305 la livre (lb) vendredi dernier à $ 2,379 hier soir, tandis que le Robusta à Londres chutait de $ 2 213 la tonne (t) à $ 2 174.

« Le marché de l’Arabica a tenté de percer le seuil de résistance des prix qui est d’environ $ 2,50. Mais les questions des chaines d’approvisionnement et l’équilibre étroit à terme devraient continuer à soutenir les cours à ou au-dessus des $ 2,20 la livre à court terme », indique Citigroup dans une note. La banque estime que le marché mondial du café sera légèrement excédentaire, de l’ordre de 1,1 million de sacs de 60 kg (Ms) sur la prochaine campagne 2022/23. Mais il met en garde contre l’éventuel impact négatif des récentes pluies très abondantes au Brésil et en Colombie, ce qui pourrait réduire l’équilibre à venir du marché.

En Asie, on s’apprête à célébrer le Nouvel an lunaire. Selon les différents acteurs interrogés par Reuters, les producteurs ont déjà vendu ce qu’ils voulaient et certains ne travaillaient même pas cette semaine, tandis que les traders, eux, tentaient de boucler des dernières ventes pour dégager des liquidités avant les fêtes. En conséquence, les producteurs dans les Central Highlands n’ont enregistré que peu de changement dans le prix qui leur a été offert pour leur kilo de café vert, à 38 800-40 200 dongs ($ 1,71-1,78) contre 38 800-40 700 dongs la semaine dernière. « Les producteurs gardent leur café car ils ne sont plus sous la pression de vendre pour les fêtes. Certains ont même déjà fermé leur magasin », explique un opérateur à Reuters. En revanche, à l’export, les traders vietnamiens ont offert le Grade 2, 5% grains noirs et brisures, avec une décote allant de $ 270 à $ 280 la tonne sur le contrat mai contre $ 250 à $ 270 la semaine dernière. Ce coup d’accélérateur à l’export a pesé cette semaine sur le marché du Robusta.

« Les prix baissent face à un approvisionnement accru mais une demande tiède », souligne un trader qui souligne les perturbations persistantes sur toute la filière au plan local.

En Indonésie, rappelons qu’il reste très peu de café à vendre. Les quelques lots proposés cette semaine ont été offerts avec une décote allant de $ 120 sur le contrat février à $ 200 sur mars, ce qui était en nette amélioration par rapport à la semaine dernière où la décote atteignait $ 250.

CAOUTCHOUC

Forte glissade des cours du caoutchouc, démarrée vendredi dernier avec la chute des prix du pétrole et des marchés boursiers et qui s’est prolongée toute la semaine. Partis de 244,4 yens sur l’Osaka Exchange, les cours ont clôturé hier à 236,5 yens ($2,1) le kilo. Même tendance sur le marché de Shanghai, les cours passant de 14 615 yuans vendredi dernier à 14 105 yuans ($2 200) la tonne hier.

Un marché qui a chuté surtout en raison de l’environnement extérieur, des tensions géopolitiques en passant par la hausse anticipée des taux d’intérêts aux Etats-Unis ou la chute des marchés boursiers asiatiques, tandis que les investisseurs ont pris leurs bénéfices avant les vacances du Nouvel An lunaire chez le principal acheteur, la Chine.

Les marchés en Chine seront fermés une semaine à partir du 31 janvier.

Le Cambodge a exporté 366 300 tonnes de caoutchouc naturel en 2021, en hausse de 8,3% par rapport à 2020. En valeur, les exportations ont grimpé de 27%  à $ 610 millions en 2021. Le prix de vente moyen du latex a progressé de 21% en 2021 à  $ 1 666  la tonne.  En 2022, les exportations devraient s’établir à  400 000 tonnes, selon H.E. Him Aun, directeur général de la Direction générale du caoutchouc du pays.

Le Vietnam a exporté 1,97 million de tonnes de caoutchouc pour une valeur de $3,3 milliards en 2021, en hausse de 12,9% en volume et de 39% en valeur par rapport à 2020, selon l’Agence pour le commerce extérieur du ministère de l’Industrie et du commerce. Des marchés tels que la Chine, l’Inde, la République de Corée, les États-Unis, l’Indonésie, la Turquie, les Pays-Bas, la République tchèque et le Canada ont accru leurs importations de caoutchouc vietnamien au cours de l’année. Les expéditions de caoutchouc du Vietnam vers l’Union européenne  en novembre se sont élevées  à 100 000 tonnes pour une valeur de $175 millions, en hausse respectivement  de 33,7 % et de 72,6 %. L’accord de libre-échange UE-Vietnam (EVFTA) devrait donner un élan aux exportations de caoutchouc du Vietnam vers l’UE.

Au Cameroun, la production de caoutchouc naturel a bondi de 33% à 60 000 tonnes en 2021 (45 000 tonnes en 2020)  malgré les contraintes induites par la pandémie, selon la Commission technique de réhabilitation des entreprises publiques et parapubliques (CTR). En 2022, la production devrait augmenter de 6 700 tonnes selon le ministre de l’Agriculture Gabriel Mbairobe.

En Europe, la Commisison européenne pourrait inscrire l’hévéa dans la liste des produits pour lutter contre la déforestation importée (Lire : Le caoutchouc bientôt sur la liste de surveillance de l’Union européenne).

COTON

Le marché du coton était sur la défensive cette semaine mais termine en légère hausse avec une clôture hier sur l’ICE à 121,63 cents la libre contre 120,75 cents vendredi dernier. La demande pour la fibre naturelle est toujours ferme et les dernières ventes américaines le montre. Mais la flambée du dollar, au plus haut depuis juillet 2020, limite les gains.

Si la demande est ferme et les ventes bonnes, la lenteur des expéditions demeure un problème majeur.  Alors que nous sommes à la moitié de la campagne, les  Etats-Unis n’ont expédié fin janvier que 3,9 millions de balles pour des engagements de 12,35 millions de balle, souligne Plexus Cotton, qui précise que la situation est similaire pour d’autres origines, comme le Brésil ou l’Afrique de l’Ouest, où les expéditions sont également très en retard.

Les dernières estimations du spécialiste Cotlook sur l’offre et la demande mondiale de coton pour 2021/22 sont aussi un soutien potentiel au marché avec une diminution des stocks mondiaux de clôture de 254 000 tonnes en 2021/22 contre une augmentation anticipée un mois plus tôt (+27 000 tonnes). Si la consommation a été légèrement revue à la baisse (- 50 000 tonnes en Chine), les estimations de la production mondiale ont été fortement diminuées, de 331 000 tonnes, avec un recul de 213 000 tonnes en Inde et de 144 000 tonnes aux Etats-Unis par rapport à ses estimations en décembre.

En Inde, l’industrie textile fait pression sur le gouvernement pour supprimer les droits d’importation sur toutes les variétés de coton ou au moins sur le coton à fibres extra-longues (ELS) pour freiner la hausse des prix. Les prix intérieurs du coton brut ont grimpé de près de 69% depuis janvier 2021 et les prix internationaux n’ont pas été en reste (+ 44% en 2021). L’industrie estime le taux d’imposition de 11% rend les importations de coton impossibles. Or, l’Inde devra accroître ses importations de coton ces prochains mois.  Le président de la  Cotton association of India estimait qu’elles pourraient bondir de 50% (Lire notre dernière Chronique). En outre, lors de la réunion avec le ministre des Finances, Nirmala Sitharaman, l’industrie s’est aussi inquiétée de la thésaurisation du coton.

HUILE DE PALME

L’huile de palme caracole ! Sur la Bursa Malaysia Derivatives Exchange, les cours ont atteint hier un record de 5 441 ringgits ($1 297,02) la tonne contre 5 323 ringgits vendredi dernier, et enregistreront probablement une sixième hausse hebdomadaire. A la hausse des prix de l’énergie et des problèmes persistants d’approvisionnement, se sont ajoutées des modifications dans la politique d’exportation du premier producteur et exportateur mondial, l’Indonésie.

La semaine dernière l’Indonésie avait imposé une exigence de permis d’exportation pour les expéditions internationales d’huile de palme (Lire notre précédente Chronique). A  partir d’hier, le pays a imposé une nouvelle règle. Elle exige qu’une portion obligatoire d’huile de palme soit vendue sur le marché intérieur à un prix maximum de 9 300 roupies ($0,6465) par kg pour l’huile de palme brute et 10 300 roupies par kg d’oléine, selon le ministre indonésien du Commerce, Muhammad Lutfi. S’exprimant lors d’une conférence de presse virtuelle le même jour, Muhammad Lutfi a déclaré que l’Obligation du marché intérieur (OMD) sera appliquée à tous les producteurs d’huile de cuisson, qui doivent vendre 20 % de leurs exportations prévues sur le marché intérieur. Selon Lutfi, la demande nationale d’huile de cuisson est estimée à 5,7 millions de kilolitres en 2022.

Cette exigence intervient alors que l’Indonésie tente de contenir une hausse des prix intérieurs de l’huile de cuisson qui ont grimpé d’environ 40 % par rapport à l’année précédent.  Le 27 janvier également, le ministère indonésien du Commerce a annoncé qu’il imposerait un ensemble de prix de détail maximaux pour l’huile de cuisson à partir du 1er février.

RIZ

Avant les saisons clés  des récoltes et des festivals, en  particulier le Nouvel An lunaire, l’activité est calme en Thaïlande et au Vietnam ainsi qu’en Inde avec la pénurie de wagon de chemin de fer.

En Inde, les prix du riz étuvé 5%  ont légèrement baissé à $372-$379 la tonne contre $375-$382  mais ils demeurent proches du pic de sept mois atteint la semaine dernière. “La dépréciation de la roupie a fait baisser les prix à l’exportation. Mais les nouvelles affaires ne se multiplient toujours pas en raison de la pénurie de wagons de chemin de fer”, a déclaré un exportateur basé à Kakinada, dans l’État méridional de l’Andhra Pradesh.

En Thaïlande, les prix du Thaï 5% ont légèrement augmenté pour atteindre $408 -$415 la tonne contre $407 -$410 la semaine dernière. La demande étrangère est modérée soulignent les négociants.

La Thaïlande a exporté 6,1 millions de tonnes de riz en 2021, en hausse de 6,7% par rapport à l’année précédente, selon les données du ministère du Commerce du pays.

Au Vietnam, les prix du Viet 5% sont inchangés à $395-$405 la tonne sur fonds d’une activité commerciale faible à l’approche des vacances du Nouvel An lunaire. Selon les négociants, la principale récolte hiver-printemps commencera la semaine prochaine pour atteindre son maximum qu’à la mi-mars. Ils anticipent qu’elle pourrait être en retrait de 10 à 20%, de nombreux agriculteurs avaient réduit la fertilisation, devenue trop onéreuse.

En Corée du Sud, la consommation de riz des Sud-Coréens a atteint un niveau historiquement bas en 2021, mais le taux de baisse a ralenti en raison d’une demande croissante de repas à domicile dans le contexte de la pandémie de la Covid-19. Le Sud-Coréen moyen a consommé 56,9 kilogrammes de riz l’année dernière, en baisse de 1,4% ou 0,8 kilogramme par rapport à l’année précédente, selon les données compilées par Statistics Korea. En 1980, il consommait 132,4 kg ! Mais, la baisse a ralenti l’année derrière après une baisse de 3% en 2019 et de 2,5% en 2020, avec la hausse des repas à domicile.

SUCRE

Le sucre n’a pas été l’exception cette semaine face à la déroute de nombreuses matières premières agricoles. Le roux coté sur le marché à terme de New York est passé de 18,90 la livre (lb) en fin de semaine dernière, à 18,41 cents à la clôture hier soir sur l’échéance mars, tandis que le blanc passait en-dessous de la barre des $ 500 pour terminer à $ 499,70 la tonne sur mars contre $ 505,40 vendredi dernier.

Il faut dire que les fondamentaux sont lourds… La production de sucre en Inde sur l’actuelle campagne 2021/22 devrait augmenter de 3% par rapport à la dernière, à 31,9 millions de tonnes (Mt), notamment en raison de rendements plus élevés recensés dans l’Etat de Maharashtra. Ce pays étant le deuxième producteur mondial de sucre, cette situation pèsera sur le marché mondial.

En outre, on annonce une bonne pluviométrie dans la ceinture sucrière au Brésil ces dix prochains jours, ce qui sera propice au développement des cultures. Mais, pour l’’heure, les exportations brésiliennes sont en nette baisse : elles ont chuté de 31% sur les trois premières semaines de janvier, selon des données encore provisoires du ministère du Commerce.

S’agissant de ces deux pays -Inde et Brésil, leur bras de fer se poursuit devant l’Organisation mondiale du commerce (OMC). Rappelons que le Brésil, l’Australie et le Guatemala ont contesté la politique indienne sucrière devant l’Organisation, notamment sa politique de subventions.  Le 14 décembre, le Groupe spécial de l’OMC a recommandé à l’Inde de retirer ses subventions dans les 120 jours. Le 11 janvier, l’Inde a fait appel. Toutefois, le dossier se heurte au fait que l’Organe d’appel de l’OMC est actuellement inopérant car les membres de l’OMC ne parviennent pas à se mettre d’accord sur les postes vacants à pourvoir dans ledit Organe… Donc, comme l’indique l’OMC, « il n’existe pas de section de l’Organe d’appel pouvant examiner l’appel ».

Face à cette situation ubuesque, le président brésilien Jair Bolsonaro a signé cette semaine un ordre exécutif autorisant son pays à des représailles unilatérales contre l’Inde si les audiences à l’OMC tardent… La guerre du sucre est-elle déclenchée entre les deux rivaux ?

Pour sa part, CovrigAnalytics s’attend à un excédent mondial de sucre mais faible, de moins de 600 000 t en 2021/22. L’excédent proviendrait de production en hausse en Inde, Thaïlande, Pakistan, en Europe et au Mexique.

En France, côté entreprises, le Groupe coopératif Cristal Union, n°2 dans la filière, annonce aujourd’hui un accord de refinancement d’un milliard d’euros conclu mardi, lui donnant de la flexibilité financière pour ses projets à venir notamment pour améliorer sa performance ESG (environnementale, sociale et gouvernance). Cette opération se fait également dans la perspective du Green Deal européen, souligne le groupe.

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