Audit de la filière coton au Bénin : tirs à boulet rouge sur la précédente législature

 Audit de la filière coton au Bénin : tirs à boulet rouge sur la précédente législature
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On pouvait s’imaginer que l’audit de la filière coton durant le deuxième mandat du président Boni Yayi serait critique. Il s’avère que c’est une véritable attaque en règle que se livre la mission d’audit sur la gestion de la filière sur trois campagnes (2013/14 à 2015/16) mais aussi sur la Société nationale pour la promotion agricole (Sonapra) et la Centrale d’achat des intrants agricoles (CAIA). Une période où les tensions entre le président Boni Yayi et Patrice Talon étaient vives et où le « roi du coton » avait été mis en retrait forcé de la filière, accusé notamment de détournement de fonds (cf. nos informations). 

Le compte-rendu de la mission d’audit a été révélé lors du conseil des ministres du 28 juin. Quels en sont les points principaux ?

Un préjudice important pour l’Etat

La mission estime que les pertes sont estimées à FCFA 125 milliards (€ 190,6 millions) causées par trois campagnes déficitaires. En outre, la mission note que la reprise en main de la filière par l’Etat en 2012 s’est faite sans la mise en place de règles, de procédures ni d’outils de gestion et de coordination. Des manquements qui n’ont pas permis une gestion transparente et rigoureuse de la filière et ont conduit à de graves irrégularités. La mission  observe qu’en particulier la Sonapra, qui gérait le flux physiques du coton, et l’Office national de stabilisation et de soutien des revenus agricoles (ONS), qui gérait le flux financiers, n’étaient dotés ni de procédures, ni d’outils de gestion.

Une mauvaise gestion des intrants

La gestion des intrants est vivement critiquée, la mission estime que les besoins ont été sous-estimés d’environ 20% à chaque campagne mais aussi  que les achats ont été effectués « en violation des dispositions du code des marchés publics et à des conditions non optimales pour la filière ». Dans le rapport sont pointés des achats effectués de gré à gré pour des montants variant de FCFA 10 à FCFA 58 milliards suivant les campagnes mais aussi des commandes non livrées par certains fournisseurs (Agrophyto, Klass, APS et Evakely Group).

Des ventes de coton pas optimisées

La mission indique que le manque à gagner sur les ventes de coton s'éleverait à  FCFA 6,9 milliards suite à la mauvaise organisation et gestion de la filière.

Gestion financière hasardeuse

La mission relève des dépenses non justifiées pour un montant de FCFA 39 milliards, des ventes d’insecticides non facturées, l’existence de créances résiduelles … Sont aussi mentionnées des irrégularités constatées dans le cadre de la réquisition des usines de la Société pour le développement du coton (Sodeco). 

Le gouvernement béninois ne compte pas s’arrêter à un simple constat. Le conseil des ministres a demandé au ministre de la Justice et de la législation « d’engager des poursuites judiciaires appropriées et de faire prendre des mesures de saisies conservatoires pour assurer les remboursement, par les membres des commissions mises en place pour la gestion de la filière coton, les dirigeants de la Sonapra, de l’ONS, de la CAIA et leurs complices dès lors que leur responsabilité serait établie », indique le communiqué des conseil des ministres.

Dés son arrivée au pouvoir, Patrice Talon, s’était attelé à détricoter les mesures prises par son prédécesseur libérant la filière du joug de l’Etat. Entre avril et mai 2016, il a  notamment mis fin aux réquisitions usines d’égrenage de la Société pour le développement du coton (Sodeco) dont Patrice Talon détenait la majorité et a  rétabli l’Association interprofessionnelle du coton (AIC, supprimée en 2012).

La campagne  cotonnière 2016/17  a battu des records avec plus de 450 000 tonnes de coton récoltés. 

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