La Chronique Matières du Jeudi (16 juin 2016)

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La météo s'améliore au Brésil tandis que le dollar se renforce face aux autres devises, ces deux facteurs entrainant la baisse des prix de plusieurs matières premières agricoles. L'indice Thomson Reuters CoreCommodity, qui regroupe 19 matières premières, a perdu 0,6% en une semaine.

CACAO

La prochain référendum sur la sortie ou non du Royaume Uni de l'Union européenne provoque une envolée du prix de la fève de cacao ! Cocasse? Non, seulement la réalité des marchés. La crainte d'un "Brexit", une sortie du Royaume Uni de l'Union européenne (UE)  fait baisser la livre sterling, rendant très attractifs les contrats libellés en monnaie britannique, comme le cacao. Les acteurs, investisseurs, spéculateurs se sont engouffrés dans la brèche à l'achat, faisant grimper les cours du cacao. Parti de $ 3 099 sur le marché à terme de New York vendredi dernier, la tonne a terminé hier à  $ 3 104 et à £ 2 292 la tonne à Londres parti de £ 2 263.

En Côte d'Ivoire et au Ghana, les broyeurs ont considérablement réduit leurs productions et ont même suspendu leurs opérations par manque de fèves aptes à être transformées.  Actuellement, la Côte d'Ivoire est en pleine récolte intermédiaire qui, rappelons-le, court d'avril à septembre, tandis que le Ghana doit encore fixer la période de commercialisation de sa propre campagne intermédiaire. Le n°2 mondial du cacao devrait offrir aux broyeurs un prix discount pour les fèves de plus petite taille émanant de cette campagne intermédiaire. Habituellement, les broyeurs locaux achètent l'intégralité de la récolte intermédiaire mais cette année, ils manquent de produit. En Côte d'Ivoire, le nombre de fèves aux 100 gr atteint les 140, voire les 150 et 160 fèves.

Rappelons que la Côte d'Ivoire compte 12 broyeurs locaux, dont les plus importants sont Barry Callebaut, Olam, Cargill et Cemoi qui ont une capacité totale de broyages installée de 720 000 t. Le Ghana, quant à lui, a une capacité de broyage bien moindre : seulement 30% de la récolte nationale est transformée localement, avec pour principaux acteurs Cargill, Olam, Touton, Barry Callebaut et la Cocoa Processing Company. Le gouvernement et le Cocobod veulent accroître cette capacité afin que la moitié de la récolte soit transformée localement. L'année dernière, des usines au Ghana avaient acheté des fèves en Côte d'Ivoire afin de pouvoir faire tourner leurs usines mais cette année, le n°1 mondial garde ses fèves jalousement car la récolte s'annonce en baisse.

En effet, au 12 juin, les arrivages de cacao aux deux ports ivoiriens d'Abidjan et de San Pedro ont totalisé 1 354 000 t depuis le début de la campagne, le 1er octobre, contre 1 493 000 t sur la même période l'année dernière.

Selon une étude de Citigroup Global Commodities, le cacao pourrait atteindre $ 3 000 à 3 100 la tonne cette année, sur fond de déficit mondial de fèves de l'ordre de 80 000 à 100 000 t en 2015/16. Ceci dit, il semblerait qu'une situation excédentaire se dessinerait pour 2016/17, de l'ordre de 225 000 à 250 000 t.

CAFÉ

La fermeté du dollar et la disparition des craintes de gelées au Brésil ont fait baisser l'Arabica sur le marché à terme de New York, à $ 1,3705 la livre, soit bien en-deçà des $ 1,4685 atteint jeudi dernier, son plus haut en 13 mois. Le Robusta a terminé à $ 1 618 la tonne en baisse par rapport aux $ 1 643 la tonne qui a été le prix de clôture du marché vendredi dernier.

D'ici la deuxième moitié de 2017, la livre d'Arabica pourrait se situer à $ 1,50 contre une fourchette allant de $ 1,35 à 1,40 actuellement, selon une note de Citigroup Global Commodities. La récolte caféière 2015/16 serait de 149,3 millions de sacs de 60 kg (Ms), en hausse de 1% par rapport à la campagne dernière, et grimper à 148 Ms en 2016/17, avec un déficit probable de 1,5 Ms.

Selon l'association brésilienne d'exportateurs de café, Cecafé, les exportations nationales au mois de mai ont été de 2,18 Ms de café vert contre 2,15 Ms en avril. De cela, l'Arabica a représenté 2,11 Ms et les conilons -Robusta6 66 868 sacs. Les exportations de café soluble ont été de 238 178 sacs équivalent.

Le Vietnam, premier producteur et exportateur mondial de Robusta, a acheminé 162 000 t ou encore 2,7 millions de sacs de 60 kg (Ms) de café en mai, en chute de 12,9% par rapport au mois d'avril, selon les chiffres de la douane, en légère baisse par rapport aux estimations gouvernementales. Depuis le début de la campagne, en octobre dernier, ses exportations ont totalisé 1,16 million de tonnes (Mt), en hausse de 19% par rapport aux mêmes 8 mois un an auparavant.

Le Vietnam où la prime du café par rapport au marché à terme de Londres a augmenté par rapport à la semaine dernière car les ventes ont ralenti. Pourtant, l'offre est abondante, ce qui permet de réduire la pression sur les cours mondiaux car le Brésil, n° 1 mondial du café, a connu des conditions météorologiques défavorables et, d'autre part, la récolte en Indonésie ne bat pas encre son plein.

CAOUTCHOUC

Les cours du caoutchouc ont rebondi lundi après un plus bas de quatre mois atteint vendredi dernier, baissant de  2,8 yens à 148 yens le kilo et clôturant une septième perte hebdomadaire. Toutefois le rebond est fragile, les cours se repliant le mardi avec la baisse des marchés du caoutchouc  à Shanghai et Singapour et le renforcement du yen.  Mercredi, les cours ont clôturé à 149,9 yens ($1,41) le kilo pour le contrat livraison novembre. « Le Tokyo Commodity Exchange peut rester dans une fourchette étroite entre 147 et 153 yens durant un certain temps, car il existe une incertitude sur les politiques monétaires américaines et japonaises ainsi que sur la sortie du Royaume Uni de l’UE», a indiqué Jiong Gu, analyste chez Yutaka Shoji Co.

Le Cambodge a exporté 28 953 tonnes de caoutchouc au cours du premier trimestre de 2016, en baisse de 8 % par rapport à la même période en 2015 (31 476 tonnes), selon les chiffres du ministère du Commerce. En valeur, les exportations sont en recul de 26% à $31 millions.

Le leader mondial du pneumatique, le groupe Michelin s’est engagé dans une politique d’approvisionnement « zéro déforestation » basée sur l’approche High Carbon Stock où les forêts secondaires et les tourbières sont respectées.  Michelin achète pas moins de 900 000 tonnes de caoutchouc naturel par an.

Pour l’ONG Greenpeace c’est « un excellent signal envoyé à tout le secteur du caoutchouc naturel et par suite à celui de l’industrie automobile, qui à elle seule avale 80% de la production mondiale. Et cela transforme naturellement la donne pour les planteurs d’hévéas (dont le caoutchouc naturel est extrait) qui refuseraient de s’engager dans une politique zéro déforestation ».

COTON

Après la hausse de la semaine dernière, les cours du coton se sont repliés depuis le début de la semaine étendant leur perte mercredi le contrat de juillet clôturant à 62,60 cents la livre et celui de décembre à 63,62 cents la livre.

Le dernier rapport sur l’offre et la demande du département américain de l’Agriculture publié le 10 juin, indique une faible baisse de la consommation américaine de coton (50 000 balles) en 2015/16, les autres données restant inchangées pour les États-Unis. Au niveau mondial, l’USDA a revu à la baisse les stocks de début de campagne et ceux de clôture principalement en raison de la réduction anticipée de la production chinoise. Elle a été réduite de  1,3 million de balles en 2015/16 et 1 million de balles en 2016 /17. La production est aussi revue à la baisse en Egypte (voir ci-dessous) et en Afrique zone franc. Les stocks mondiaux sont estimés à 97,7 millions de balles, soit 1,7 million en dessous du niveau estimé le mois dernier ce qui reflète la baisse de 2 millions  de balles des stocks de clôture en Chine.

En Inde, premier producteur mondial, les superficies ensemencées en coton pourraient tomber à un plus bas niveau de sept ans durant la campagne 2016/17 les agriculteurs lui préférant d’autres cultures, ce qui pourrait potentiellement diminuer la production et les exportations de fibre. En effet, une attaque de ravageurs dans les principales zones de production du coton et de bonnes prévisions sur les pluies de la mousson devraient également inciter les agriculteurs à planter d’autres cultures comme la canne à sucre, l’arachide ou des légumineuses.

De plus faibles embarquements de coton d’Inde pourraient soutenir les prix mondiaux, qui se négocient actuellement à un plus haut niveau depuis août 2015, et accroître les exportations des pays concurrents comme l’Australie, le Brésil et les Etats-Unis.

Le président de l’Association cotonnière indienne, Dhiren Sheth, table sur une baisse d’environ 7% des superficies, qui seraient alors d’environ 11 millions d’hectares en 2016/17, qui démarre en octobre, soit son plus bas niveau depuis 2009/10. En 2015/16, la superficie emblavée en coton s’est élevée à 11,9 millions d’hectares.

Au Bénin, le conseil des ministres réuni le 15 juin a décidé de mettre fin à l’ensemble des subventions – sur le prix et les intrants – à la filière coton pour la campagne 2016/17 (cf. nos informations ).

Les exportations de coton d’Egypte ont chuté de 54,2 % au deuxième trimestre de la campagne agricole 2015/16, selon  la Central Agency for Public Mobilization and Statistics (CAPMAS). Elles se sont élevées à 112,7 quintaux entre décembre et février contre 246 quintaux sur la même période en 2014/15.

Le mois dernier, le gouvernement a accepté de fixer un prix de garantie pour acheter du coton auprès des agriculteurs locaux à  1250 livres égyptiennes (€125)  par quintal de manière accroître les revenus des producteurs. La consommation locale de coton a aussi diminué passant de 175 800 quintaux  en 2014 /15 à 76 400 quintaux en 2015/16.

La production de coton pour la campagne 2016/17 a été fortement revue à la baisse par le département américain de l’Agriculture (USDA) après que les superficies ensemencées ont chuté de 50%. Elle estimée à 160 000 balles soit 53% de moins qu’en 2015/16 (320 000 balles). La consommation demeure estimée 590 000 balles  tandis que les importations progresseraient de 18% à 530 000 balles. Quant aux exportations elles devraient diminuer à 120 000 balles, soit 20% de moins que la campagne précédente.

HUILE DE PALME

La baisse des huiles concurrentes et l’annonce d’une hausse de la taxe sur les exportations d’huile de palme brute ont étendu mercredi  les pertes sur l’huile de palme dans une huitième séance consécutive de baisse. Le contrat d’août a clôturé à 2 450 ringgits (S598) la tonne. L’huile de palme a perdu 5% de sa valeur depuis lundi. La Malaisie a annoncé mercredi qu’elle augmenterait sa taxe sur les exportations d’huile de palme brute à 6% en juillet contre 5,5% en juin.

Les  stocks  d’huile de palme à la fin du mois de mai ont chuté de 8,8% à 1,65 million de tonnes contre  1,80 Mt fin avril, tandis que les exportations ont augmenté de 9,3% suite à la hausse de la demande consécutive au Ramadan,  selon le Malaysian Palm Oil Board.

RIZ

Les prix du riz en Inde et en Thaïlande ont été  stables cette semaine  juste avant une  vente aux enchères en Thaïlande, tandis que les cours à l'exportation se sont légèrement abaissés au Vietnam avec l’absence d’acheteurs.

Le gouvernement thaïlandais devait mettre en vente mercredi 2,24 millions de tonnes de riz. Le Thaï 5% se négociait à $418- $ 439 la tonne. Une possible dépréciation du baht pourrait permettre une baisse des prix en dollar.

Au Vietnam, la demande est faible en dépit du retour sur le marché du premier acheteur de riz vietnamien, la Chine, mais pour de petits volumes. Le Viet 5% récolte d'hiver-printemps s’échangeait à $ 370- $ 375 la tonne et le riz d'été-automne a chuté à $ 360- $ 365 la tonne contre $ 365 $ la semaine dernière.

L’indien 5% étuvé s’échangeait  Ã  $ 382- $ 392 la tonne.

SUCRE

Les cours du sucre roux ont baissé en début de semaine, face à des conditions météorologiques au Brésil qui s'améliorent après les craintes de gelées la semaine dernière. En outre, le sucre roux étant côté sur le marché à terme de New York, la raffermissement de la valeur du dollar face aux autres devises a rendu peu attractifs les achats de contrats sucriers sur le marché à terme, pesant donc sur les cours.

Ceci dit, les cours du sucre demeurent très élevés, à plus de 19 cents la livre, valeur qu'il affichait déjà en fin de semaine dernière. Le sucre blanc termine à plus de $526  la tonne, parti de $ 529 vendredi dernier. Et, estiment les spécialistes, les prix du sucre devraient encore grimper et atteindre 21 à 22 cents la livre de roux d'ici le mois de décembre, selon une note de Citigroup Global Commodities. Les conditions actuelles de récolte au Brésil rendent peu probable une production record. Le déficit mondial serait de 8,4 millions de tonnes (Mt) en 2015/16 et de 4,8 Mt en 2016/17.

En Indonésie, la production de sucre en 2016 baisserait à 2,3-2,4 millions de tonnes (Mt), selon le ministère de l'Agriculture alors qu’elle était encore estimée atteindre 2,5 Mt lors des prévisions d'avril. La baisse est liée à l'impact de la combinaison des phénomènes météorologiques La Niña et El Niño.

Quant à l'Égypte, le ministère des Approvisionnements a annoncé que les stocks de sucre parviendraient à couvrir la demande au cours de la prochaine année.

Enfin, vendredi dernier, l'Iran  a acheté son premier lot de sucre depuis la levée des sanctions internationales ne janvier dernier : il s'agit de 250 000 t de sucre roux acheté au Brésil.

 

 

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