La Chronique Matières du Jeudi (21 janvier 2016)

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Les marchés manquent d'énergie ! Le prix du pétrole est passé hier en dessous des $ 27 pour la première fois depuis 2003 entrainant à la baisse les marchés financiers et une bonne partie des marchés de matières premières agricoles. L'indice Thomson Reuters CoreCommodity, qui regroupe 19 produits, a perdu 2,8%, touchant son plus bas depuis mars 2002.

CACAO

Le cacao a baissé sur le marché à terme de Londres durant ces 5 derniers jours de cotation, passant de £ 2 090 vendredi dernier à £ 2 038 la tonne aujourd’hui. Il a même glissé aujourd'hui à £ 2026, son plus bas en 5 mois. A New York aujourd'hui, il est également tombé à $ 2 764 la tonne, son plus faible prix depuis 9 mois, parti de $ 2 881 vendredi dernier.

En cause ? La chute du prix du pétrole qui a créé un mouvement baissier sur les marchés de matières premières, l'amélioration des perspectives de récolte au Ghana, n°2 mondial, et le retrait des spéculateurs du marché. Selon le US Commodity Futures Trading Commission, les spéculateurs auraient réduit leurs positons longues à leur plus faible niveau sur ces 9 derniers mois, ayant vendu des contrats sur les 4 dernières semaines sans discontinuer.

Ceci dit, la tendance baissière n'a pas été continue. Le cacao avait plutôt bien commencé la semaine, enregistrant des hausses de prix lundi comme mardi, stimulé par la faiblesse de la livre sterling, des niveaux de broyages européens meilleurs qu'attendus de l'ordre de 6% sur le dernier trimestre 2015 par rapport à fin 2014, à 342 442 t, et des estimations d'arrivages de fèves en baisse aux ports ivoiriens selon les exportateurs.

Des estimations non partagées par le Conseil café cacao (CCC) qui a annoncé aujourd'hui  que les arrivages de fèves ont totalisé 859 921 tonnes (t) entre le 1er octobre, démarrage de la campagne 2015/16, et le 31 décembre. Ceci représente une hausse par rapport aux 851 301 t enregistrées sur la même période en 2014/15. Ces volumes publiés par le CCC sont plus élevés que les estimations des exportations qui étaient de 799 000 t au 31 décembre. Sur ce mois de décembre, les arrivages ont atteint 311 222 t selon le CCC, en haussé par rapport aux 278 425 t enregistrées en décembre 2014.

CAFÉ

L'Arabica s'est ressaisi aujourd'hui sur le marché à terme de New York, à $ 1,1215 la livre après avoir touché la veille son plus bas en deux ans, à $ 1,1105. Le Robusta a été à la baisse à Londres toute la semaine, tombant à $ 1350 la tonne aujourd'hui , un niveau qu'il n'avait plus enregistré depuis 2010, entrainé par la baisse générale sur les marchés mais aussi par les importants volumes d'exportation du Vietnam. Le pays aurait exporté 2,5 millions de sacs de 60 kg (Ms), soit 152 000 t en décembre, en hausse de 58,6% par rapport aux mois de novembre, selon les statistiques douanières, et ce bien que le marché n'ait cessé de parler de rétention.

Au Brésil, la récolte pourrait faire un bond spectaculaire de 58% cette campagne 2016, selon Conab, et atteindre un niveau record. Ainsi dans sa première estimation pour la campagne, l'agence étatique avance une fourchette allant de 49,1 millions à 51,9 Ms. Si la récolte atteint le niveau haut de la fourchette, elle dépasserait le record de 2012 qui était de 50,8 Ms. De ce volume total, la production d'Arabica est estimée atteindre 37,7 Ms soit un net redressement par rapport aux 32,05 Ms enregistrés l'année dernière, année de sécheresse. Conab souligne les conditions météorologiques particulièrement favorables cette campagne dans les zones de production. Le Robusta devrait aussi être en hausse mais pas autant en raison de la sécheresse persistante dans l'Etat d'Espirito Santo. La production est attendue entre  11,4 et 12,1 Ms, soit une hausse pouvant aller de 1,8 à 8% par rapport à la campagne précédente.

En Ouganda, les exportations ont fait un bond de 52,3% en décembre par rapport à décembre 2014, à 342 429 sacs de 60 kg contre 224 803 sacs. Une performance qui est due à de bonnes conditions météorologiques. A noter que ceci a permis au pays d'engranger des recettes de l'ordre de $ 35,8 millions contre $ 29,8 millions en décembre 2014, selon l'Uganda Coffee Development Authority (UCDA).

Au Cameroun, la production sur la campagne 2014/15 a chuté de 27%, à 23 866 t contre 32 808 t la campagne précédente, selon l'Office national du café et cacao (ONCC). Une production décevante au regard des objectifs fixés par les autorités d'atteindre les 160 000 t d'ici 2020. Ces 23 866 t comprennent 21 486 t de Robusta et 2 109 t d'Arabica. Ceci dit, les exportations ont progressé de 8% à 23 673 t.

Aux ventes aux enchères du Kenya cette semaine, le prix le plus élevé pour le grade AA a évolué dans une fourchette allant de $ 72 à 375 le sac de 50 kilos, en forte baisse par rapport aux $ 126-400 enregistrées aux ventes la semaine dernière.

CAOUTCHOUC

« Le marché devrait rester baissier, reflétant les  turbulences sur les marchés mondiaux des matières premières » a déclaré Hiroyuki Kikukawa, directeur général de Nihon Unicom Inc. La baisse du marché boursier à Tokyo ainsi que celles du dollar vis-à-vis du yen et du pétrole ont rendu frileux les investisseurs. Tant que le pétrole restera bas, le caoutchouc n’a guère d’espoir de remonter.  L’effet positif de l’annonce par le gouvernement thaïlandais du plan de soutien pour les agriculteurs (voir notre chronique de la semaine dernière) aura été de courte durée. Le contrat livraison juin a clôturé jeudi à 156,5 yens ($1,34) le kilo, après avoir cédé 3,4 yens (2,1%) la veille.

COTON

L’environnement extérieur, et en particulier effondrement des prix de l’énergie, a fait chuté mercredi les cours du coton qui ont clôturé à 61,97 cents la livre pour le contrat de mars.

En 2015, les importations de coton en Chine, le premier consommateur mondial,  sont tombées à un plus bas de 9 ans. Un plongeon consécutif à la réduction du différentiel entre le prix national et celui international et à la réduction des quotas d’importation. Sur le mois de décembre, les importations sont en recul de 28,85% à 188 200 tonnes, selon le site Cncotton.com qui cite des données douanières. Ainsi sur l’année 2015 ce sont 1,48 million de tonnes de coton qui ont été importées par l’Empire du milieu selon les calculs de Reuters. C’est en dessous du plus bas enregistré en 2008 à 1,53 Mt. Et une nouvelle baisse est attendue par les industriels en 2016 suite à la nouvelle chute des prix nationaux au début de l’année et à la possibilité  que  Pékin vende une partie de ses stocks avec un rabais. Le contrat de mai 2016 (CCFK6) se négocie actuellement à environ 11 375 yuans ($1 729) la tonne, soit un niveau proche des prix à l’importation.  Le département  américain de l'Agriculture (USDA) estime à 1,2 Mt les importations chinoises en 2015/16 contre 1,8 Mt en 2014/15.

La dévaluation du yuan pourrait apporter un certain soutien aux exportateurs de textile, mais le secteur est également confronté à des coûts salariaux plus élevés. En outre, le coton doit faire face à la pression de la baisse des fibres synthétiques. Depuis décembre 2014, les prix ont chuté d’environ 30% et pourraient s’affaiblir à nouveau cette année estimait le mois dernier Paul Deane, analyste chez ANZ Bank.

L'Ouzbékistan prévoit de réduire de 10% sa production de coton dans les cinq prochaines années selon une déclaration du  président ouzbek Islam Karimov. Le pays ambitionne d’atteindre 3 Mt d’ici 2020 contre 3,35 Mt réalisées en 2015. Islam Karimov a indiqué que cela permettra de libérer des terres irriguées pour la culture de légumes ajoutant « Un autre facteur important est la forte baisse des prix et de la demande pour le coton fibre sur le marché mondial ».

HUILE DE PALME

Avec la faiblesse des prix du pétrole et des autres huiles concurrentes, les prix de l’huile de palme ont accentué leur perte jeudi dans une deuxième séance de baisse. Les prix sont également sous la pression de l’absence d’une reprise attendue des importations en provenance de la Chine avant les célébrations du Nouvel An chinois en février. Le ralentissement de la croissance de la deuxième économie mondiale et l'abondance des disponibilités mondiales d'huile de soja ont freiné la demande chinoise  pour l'huile tropicale. Le contrat d’avril a clôturé jeudi à 2 424 ringgits ($554,31) la tonne.

« L'huile de palme a perdu de son élan, la production a connu une croissance relativement lente l'an dernier et devrait se ralentir encore en 2016 », a déclaré Thomas Mielke de la revue Oil  World.  Ajoutant « Ceci n’est pas seulement dû à des facteurs météorologiques … actuellement le rendement par arbre décline, ce qui est assez alarmant ».

Thomas Mielke s’attend une hausse modérée de 0,6 Mt de la production mondiale d'huile de palme. « Ceci est choquant», dit-il, bien en dessous de l’augmentation annuelle moyenne de 2,7 Mt. Les prix ​​à l'exportation de l’huile de palme de Malaisie et de l'Indonésie, franco à bord, ont le potentiel se s’apprécier d'environ $50 à $100 par rapport aux niveaux actuels de juin si des problèmes supplémentaires de production interviennent estime-t-il. « C’est une estimation provisoire, nous pouvons encore surestimer la production malaisienne et indonésienne. Un scénario possible est que  la production mondiale d'huile de palme stagne ou soit en légère baisse en 2016 » a déclaré Thomas Mielke.

Les exportations d’huile de palme et de palmiste de l'Indonésie ont progressé de 5% en décembre par rapport à novembre totalisant 2,5 millions de tonnes selon  l'Association indonésienne de l'huile de palme (GAPKI). Sur l’année, les exportations à 26,41 Mt ont grimpé de 21% par rapport à 2014. En 2016, le pays devrait exporter moins avec l’accroissement attendu du biodiesel sur  le marché domestique. Une situation qui pourrait apporter un soutien au prix. Toutefois les bas prix du pétrole pourraient rendre peu soutenable le programme gouvernemental pour porter  la part du biodiesel à  20% (B20).

RIZ

Les prix ​​à l'exportation de riz au Vietnam ont chuté cette semaine à des niveaux inférieurs à ceux en Thaïlande pour la première fois en trois mois, heurtés par la faiblesse de la demande et la perspective d'une augmentation de l'offre.

Le Viet 5% a chuté à $350- $360 la tonne contre $360- $365 la semaine dernière.  En Thaïlande, la qualité similaire était stable à $355- $360. Les acheteurs anticipent de nouvelles baisses de prix avec la récolte hiver-printemps qui démarrera fin févier et donc restent attentistes.

Le Vietnam s’est fixé comme objectif d'exporter 6,5 millions de tonnes de riz cette année, hors le riz vendu à la Chine via le commerce frontalier. Ce commerce représente au moins 1,5 Mt. L’année dernière, le pays a exporté 6,59 Mt (+4% par rapport à 2014) pour une valeur de $2,8 milliards (-4,5%).

La Thaïlande envisage de produire 25 Mt de riz paddy en 2016/17, en baisse de près de 8 % par rapport à la campagne précédente et ce afin  d’éviter de faire à nouveau  baisser les prix fortement heurtés par  les importants stocks domestiques, environ 13Mt. « Les prix vont rester à ce niveau pendant les deux à trois prochaines années en raison du ralentissement économique mondial », a déclaré  le secrétaire permanent au Commerce, Chutima Boonyapraphasara.

L'Association des exportateurs de riz thaïlandais et le ministère du Commerce de la Thaïlande estiment que  les exportations de riz blanchi totaliseront 9 Mt en 2016 pour  une valeur d'environ 150 à 170 millions de bahts ($ 4,13 à 4,68 milliards), un volume inférieur aux 10 millions de tonnes exportées en 2015. Le ralentissement économique mondial a affaibli le pouvoir d'achat dans certains grands pays importateurs en Afrique et au Moyen-Orient.

L'Inde pourrait conserver sa position de premier exportateur de riz en 2016, même si les  ventes devraient chuter de 9,6% à 10,6 Mt. Se situeraient ensuite la Thaïlande avec 10,4 Mt et le Vietnam avec 8,7 Mt selon une estimation de la FAO réalisée le mois dernier.  

SUCRE

Le sucre roux s'est ressaisi aujourd'hui sur le marché à terme de New York, à 14,36 cents la livre, après avoir enregistré une forte chute les  sessions précédentes. Le blanc, quant à lui, a connu meilleure fortune cette semaine grâce à une bonne demande de la Chine et, contrairement aux autres marchés de matières premières, à un intérêt marqué des fonds d'investissement. Aujourd'hui, il a coté $ 422,30 la tonne.

En 2015, la Chine a importé un volume record de sucre de l'ordre de 4,85 millions de tonnes (Mt), confirmant ainsi son rang de premier importateur mondial. Des importations qui ont fait un bond de 39% par rapport à 2014, selon les statistiques douanières, et légèrement au dessus des 4,5 Mt en 2013. Ce niveau élevé d'achat sur les marchés mondiaux s'explique par la baisse significative de la production intérieure ce qui a soutenu les cours du sucre local sur le marché à terme de Zhengzhou, qui ont gagné 19% sur l'ensemble de 2015. Selon les observateurs, les importations auraient même pu être plus élevées si ce n'était pour les restrictions sévères à l'octroi des permis d'importer suite à une modification de la réglementation l'année dernière. Des importations de sucre blanc qui devraient demeurer à des niveaux soutenus ces prochains mois, estime-t-on. En décembre, les importations ont encore été en forte progression, de l'ordre de 38,3% par rapport à décembre 2014.

 

 

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