La Chronique Matières du Jeudi (26 novembre 2015)

Une semaine chahutée avec l'indice CRB qui a touché lundi un plus bas en 13 ans avant de se ressaisir, avec pour toile de fond un dollar plus ferme. A noter que les marchés aux Etats-Unis sont fermés aujourd'hui pour célébrer Thanksgiving.

CACAO

A l'instar de la plupart des autres matières premières, le cacao a démarré la semaine à la baisse, pour ensuite se ressaisir mais clôturer mercredi soir en perdant £ 26, à £ 2 262 la tonne, en dessous du pic de 4 ans et demi atteint la semaine dernière à £ 2 317. New York a clôturé à $ 3 304 la tonne.

En Côte d'Ivoire, les pluies actuelles sont abondantes et propices au développement du cacao mais la culture a souffert du manque d'humidité entre juin et septembre, ce qui laisse penser qu'on ne parviendra sans doute pas à retrouver les 1,257 millions de tonnes (Mt) obtenues la dernière campagne principale. Au 22 novembre, les arrivages aux ports ivoiriens avaient totalisé 441 000 t depuis le démarrage de la campagne le 1er octobre, selon les  estimations des exportateurs, en hausse par rapport aux 408 000 t sur la même période en 2014/15.

En Indonésie, la taxe à l'exportation de fèves demeurera inchangée en décembre, à 10%.

CAFÉ

Le Robusta a clôturé hier soir sur le marché à terme de Londres à $ 1 524 la tonne, à deux doigts du plus faible prix en deux ans, à $ 1 494. Le Vietnam est en pleine récolte ce qui pèse sur les prix. Mais les volumes exportés demeurent limités car les planteurs et exportateurs vendent au compte goutte ou presque, espérant que l'impact d'El Niño fasse remonter les prix en 2016.

Cette semaine, le Vietnam Grade 2 5% grains noirs et brisures s'est vendu à prime de $ 20-40 la tonne par rapport à l'échéance mars à Londres. Le Grade 1, très similaire à la qualité Sumatra, s'est vendu à $ 70-90 la tonne au dessus. Des grains qui seraient plus petits que l'année dernière. En Indonésie, le Grade 4 80 défauts se vend à prime de $ 120-160 la tonne par rapport au contrat sur janvier à Londres, la prime était entre $ 130 et 150 la semaine dernière.

Selon le Département américain de l'Agriculture (USDA), la production vietnamienne pourrait grimper de 7% en 2015/16 par rapport aux 29,3 millions de sacs de 60 kg (Ms) en 2014/15 et l'Indonésie ferait un bond de 20% à 10,6 Ms. Rappelons qu'on estime le déficit caféier en 2015/16 entre 2,7 et 4,8 Ms. 

Nombre d'analystes estiment que le café aurait plus ou moins touché son plancher et que les prix ne pourraient que repartir à la hausse dans un avenir plus ou moins proche. Pour étayer leur analyse, ils soulignent l'importance des positions longues sur le marché ce qui témoigne de leur préoccupation face à des stocks mondiaux plutôt faibles et les incertitudes quant aux récoltes au Brésil.  La Société Générale Cross Asset Research estime que le prix moyen de l'Arabica sera de $ 1,2858 la livre  au premier trimestre 2015.

Le Vietnam, qui a investi environ $ 1 milliard dans ses usines de transformation de café depuis 2012, selon le Vietnam Economic Times,  devrait exporter 67 500 t de café soluble cette année, en hausse de 25% par rapport à 2014, selon l'Association vietnamienne du café et du cacao.

Au Nicaragua, les exportations ont plongé de 62% en octobre, premier mois de la campagne 2015/16, à 37 605 sacs.

Quant à l'actualité africaine, le prix moyen a baissé à $ 122,41 aux ventes aux enchères mercredi en Tanzanie pour un Arabica Grade AA contre $ 133,04 la semaine précédente. Mais au Kenya, le prix le plus élevé pour un Grade AA a oscillé dans une fourchette allant de $ 180 à 379 contre $ 195-278 la semaine précédente. Pour le Grade AB, les prix ont, respectivement, été de $ 116-299 à $ 144-274.

CAOUTCHOUC

Après avoir chuté de plus de  3,1% mardi, les cours du caoutchouc ont rebondi mercredi pour clôturer à 158,1 yens ($1,29) le kilo pour le contrat de mai, en hausse de 1,7 yen.

La production mondiale de caoutchouc pourrait chuter en 2015  pour la deuxième année consécutive, les prix très bas ayant conduit les agriculteurs asiatiques à limiter la saignée des hévéas. L’Inde, l'Indonésie, la Malaisie et la Thaïlande ont suspendu la saignée des arbres.  Une baisse de la production permettrait de réduire les stocks et un rebond des prix, qui ont depuis le début de l’année perdu plus de 25%.

L’Association des pays producteurs de caoutchouc naturel (ANRPC) qui prévoyait une hausse de 5% de la production mondiale en 2015 a revu à la baisse ses prévisions sans préciser dans quel volume. En 2014, la production avait baissé de 1,9% à 10,9952 millions de tonnes (Mt).  Sur la période de janvier à octobre, les membres de l’ANPRC – Cambodge,  Chine, Inde, Indonésie, Malaisie, Papouasie-Nouvelle-Guinée, Philippines, Singapour, Sri Lanka, Thaïlande et le Vietnam- ont produit 9 Mt, en recul de 0,9% par rapport à la même période en 2014.

En Thaïlande, où les prix ont chuté de 29% depuis le début de l’année, la réaction  des agriculteurs à la faiblesse des prix sera déterminante pour déterminer la baisse de la production mondiale d’autant plus que le gouvernement a récemment pris des mesures  d’aide pour un montant de 13 milliards de baths ($365 millions) et cela pourrait limiter la chute de la production estime Sheela Thomas, secrétaire général de l’ANRPC.

En Indonésie,  l’exploitation a été perturbée et la production du deuxième producteur mondial pourrait être impactée à hauteur de 10%. « La baisse de la production est le résultat de plusieurs facteurs. Le premier est El Nino et la brume qui a perturbé la photosynthèse. Deuxièmement, le prix est trop faible n’incitant pas les agriculteurs et les plantations privées à poursuivre la production » indique Moenardji Soedargo, président de l'Association indonésienne du caoutchouc. Certains agriculteurs ont même abattu des arbres productifs pour pratiquer d’autres cultures comme le manioc.

En Inde, la production devrait chuter de 13,4% à 610 000 tonnes, estime l’ANRPC.

Pourtant, malgré un ralentissement de son économie, les importations de caoutchouc de la Chine sont en hausse, ce qui devrait soutenir les prix, remarque Sheela  Thomas. La Chine a importé 3,64 Mt de caoutchouc sur les dix premiers mois de 2015, en hausse de 8,6 % par rapport à la même période en 2015. Sur le mois d’octobre, les importations de caoutchouc  naturel progressent de 18,8%  par rapport à octobre 2014 à 212 190 t. tandis que celles de caoutchouc synthétique grimpent de 63,3% à 193 999 t. selon les statistiques douanières.

COTON

Les cours du coton ont évolué en dents de scie sur la semaine chutant lundi, comme la plupart des autres matières premières avec le renforcement du dollar, pour grimper à un plus haut d’un  mois mercredi  avec en toile de fond des prévisions de pluies, qui pourraient perturber la récolte au Texas.  Le contrat de mars a clôturé à 63,28 cents la livre mercredi.

Les importations de coton de la Chine pour le mois d’octobre sont en recul de 48,6% à 42 109 tonnes. Sur les dix premiers mois de l’année, elles se sont  élevées à 1 202 370 tonnes, en baisse de 42,27%.

Importations de coton en Chine – Principaux pays fournisseurs et Africains

Sources : statistiques douanières

HUILE DE PALME

Les cours de l’huile de palme ont été erratiques sans véritable direction alors que la conférence  annuelle sur l’huile de palme se tient cette semaine à Bali. Après quatre séances successives de baisse, les cours ont rebondi mercredi  les acheteurs profitant de prix attractifs. La confirmation du déclin de la production a aussi été un élément de soutien.. La demande demeure toutefois faible.

Les exportations de Malaisie du 1^er au 25 novembre sont inchangées par rapport à la même période en octobre (1,2 Mt).

En Indonésie, la taxe sur l’exportation de l’huile de palme brute demeure inchangée pour le mois de décembre à 0%.

Côté  entreprise, le malaisien Sime Darby   a enregistré un bénéfice net en recul de 34%  à 328 400 000 ringgits ($78 millions) pour le 1^er trimestre s’achevant en septembre. Le chiffre d’affaires progresse légèrement à 10,17 milliards de ringgits. «Les résultats financiers du Groupe pour la période sous revue reflète un environnement difficile du marché dans toutes les divisions», a déclaré le directeur général Mohd Salleh Bakke dans un communiqué. "La demande plus faible des entreprises de consommation et la faiblesse persistante CPO (huile de palme brute) et des prix du charbon ont affecté la rentabilité."

RIZ

Une semaine encore calme sur le marché asiatique du riz avec une demande toujours faible. Et ils pourraient le rester jusqu’au début de l’année 2016, les approvisionnements étant déjà réalisés avant les fêtes de fin d’année.

Au Vietnam, l’offre serrée a maintenu les prix à un niveau élevé. La prochaine récolte démarrera en février prochain dans le sud du delta du Mékong. L’Indonésie aurait acheté un million de tonne de riz Viet 15% de brisures. Quant à la Chine, premier acheteur du riz vietnamien, elle a importé 199 250 tonnes en octobre, en hausse de 81% par rapport à 2014. La totalité des  importations chinoises de riz vietnamien  sur les dix premiers mois de l’année totalisent près de 1,6 million de tonnes, en hausse de 42% par rapport à la même période en 2014. Globalement, les exportations vietnamiennes de janvier à novembre ont progressé de 8,6% à 6,24 Mt, pour une valeur de $2,65 milliards, en recul de 4,9% selon le ministère vietnamien de l’Agriculture.

En Thaïlande, les prix sont demeurés stables, les quelque achats de la Chine et du Moyen-Orient ne sont pas parvenus à faire monter les prix.

Les importations supplémentaires envisagées par les Philippines  pour  2016 seront plus faibles que les 1,3 Mt anticipées a déclaré  le secrétaire à  Planification économique, Arsenio Balisacan, qui dirige également le conseil gouvernemental de la sécurité alimentaire. En effet, les pertes de production consécutive aux récents typhons et à la sécheresse provoquée par le phénomène d’El Nino sont moins importantes que prévues.

Dans son rapport mensuel de marché, le Conseil international des céréales (CIC) a abaissé de 3 millions de tonnes ses projections de production mondiale toutes céréales confondues (blé et céréales secondaires) en 2015/16 par rapport à ses prévisions publiées en octobre. La production mondiale serait donc de 1 996 millions de tonnes, un repli de seulement 2 % sur le record de l'an dernier. En effet, des récoltes exceptionnelles de blé, d'orge et de sorgho ont été compensées par un repli de maïs, bien que la production de cette récolte puisse tout de même atteindre le troisième plus gros volume jamais enregistré, écrit le CIC.

Quant à la baisse des estimations en novembre par rapport au mois dernier, elle est essentiellement le fait du maïs, avec une estimation plus haute aux Etats-Unis absorbée par des réductions liées à la sécheresse en Ethiopie, en Afrique du Sud et en Chine.

La production mondiale de riz en 2015/16 est estimée faire 1 % de moins que le pic de l'an dernier, car des récoltes décevantes chez certains producteurs – y compris l'Inde et la Thaïlande – ne sont qu'en partie compensées par des moissons améliorées ailleurs en Asie. Comme la demande dans l'alimentation humaine devrait être étayée par une consommation record, les inventaires cumulés de fin de campagne devraient se contracter sensiblement – presque entièrement du fait d'un repli d'un tiers chez les principaux exportateurs. Les échanges devraient rester historiquement élevés durant l'année civile 2016 avec des expéditions à un certain nombre de marchés asiatiques, y compris l'Indonésie et les Philippines, en raison des efforts des pouvoirs publics pour garantir des disponibilités intérieures volumineuses. La Thaïlande est jugée retrouver sa place de plus gros exportateur au monde pour la première fois depuis 2011.

SUCRE

Le sucre roux a été l'une des rares matières premières à ne pas avoir démarré la semaine en baisse, ce qui a conduit des producteurs et des spéculateurs à vendre, créant une grande volatilité mardi avant que les prix ne baissent mercredi sur fond de fermeté du dollar et de rumeurs de ventes indiennes de 100 000 tonnes (t) de sucre au Bangladesh et à l'Irak. Ainsi, mardi, le roux a touché un pic à 15,78 cents la livre, niveau qui n'avait plus été enregistré depuis 10 mois, mais a clôturé hier soir à New York à 14,91 cents. Quant au sucre blanc, il a suivi à la baisse, hier, à $ 402,80 la tonne.

Facteur haussier, Unica au Brésil a déclaré que la teneur en sucre était à 128 kg par tonne de canne sur la première quinzaine de novembre, fortement en-deçà des 135,3 kg/t il y a un an sur la même période et 140 kg/t sur la deuxième quinzaine d'octobre.

Mais cette semaine, les yeux étaient plutôt braqués sur l'Inde car, selon des rumeurs, 100 000 à 150 000 t de sucre roux auraient été vendues à des raffineries en Irak et au Bangladesh pour livraison début 2016, alors même que les autorités n'ont pas encore publié la confirmation officielle de leurs incitations à l'export sur 2015/16. Le gouvernement aurait pour objectif d'exporter 3,2 Mt. Ceci dit, l'analyse sera serrée chez les raffineurs, car davantage de volumes à l'export signifie moins de volumes sur le marché national et donc la hausse des prix. L'export pourrait, à terme, ne pas être comparativement si attrayant.

Sur le premier trimestre 2016, la Société Générale Cross Asset Research estime le prix du sucre roux à 14,4 cents la livre en moyenne et le blanc  à $ 409,90 la tonne, le déficit global étant estimé à 2,31 Mt contre un excédent de 2,87 Mt en 2014/15.