Ghana – $750 millions pour que le Ghana soit auto-suffisant en huile de palme

 Ghana – $750 millions pour que le Ghana soit auto-suffisant en huile de palme

Ghana

Le Ghana fait face à des défis majeurs pour atteindre l’autosuffisance en huile de palme, avec les petits planteurs qui représentent 80% de la production. Mais une filière renforcée signifierait des emplois, moins d’importations et de la création de valeur.

Malgré son importance croissante parmi les cultures commerciales, la filière de l’huile de palme au Ghana a encore besoin de faire des efforts importants pour combler son déficit croissant, selon l’Oil Palm Development Association of Ghana (OPDAG).

La production nationale annuelle est d’environ 244 000 tonnes (t), soit 30 000 t de moins que la consommation. En janvier, dans sa revue annuelle du secteur de l’huile de palme au Ghana, l’OPDAG avait souligné : «Si la production actuelle n’augmente pas, le déficit au Ghana atteindra 127 000 t d’ici 2024.»

«La forte demande en huile de palme découle de la présence d’industries dont Wilmar Africa, producteur des huiles à consommer de la marque Frytol ; Unilever qui fabrique un grand nombre de détergents ; Delta Agro ; Appiah Menkah Complex, producteur de lessives et huiles végétales ; PZ Company qui, jusqu’en 2015, fabriquait des lessives au Ghana ; Avnash Industries qui produit l’huile végétale Golden Drop», a expliqué Samuel Avaala Awonnea, président d’OPDAG dans une interview.

L’importance des producteurs contractuels

Le Ghana est un importateur net d’huile de palme. Les petits producteurs représentent 93% des superficies dédiées aux palmiers à huile et réalisent 80% de la production annuelle, le solde venant des grandes plantations.

Avant l’indépendance, la production d’huile de palme était une des sources majeures de devises. L’exportation de fruits du palmier à huile a démarré en 1820 avec une production qui a rapidement progressé, le produit représentant 75% des exportations totales du pays dans les années 1880 après que les premières plantations aient été créées en 1850.

Cependant, il n’y a pas eu de réelle politique de développement de l’industrie avant les années 1960 avec la mise en place, entre autres, de politiques ainsi que des fermes de démonstration, ce qui a fait grimper à 330 000 hectares (ha) les superficies cultivées en palmiers à huile au Ghana, soit 1,5% de la superficie totale des terres agricoles.

Parmi les plantations les plus importantes, on note Ghana Oil Palm Development Company (GOPDC) avec des plantations à Kwae, Twifo Oil Palm Plantation (TOPP) à Twifo, Ntafrewaso près de Twifo Praso, Benso Oil Palm Plantation (BOPP) à Adu Bamso près de Takoradi, Norpalm Ghana et Ayiem OIl Mills, toutes deux à Takoradi, Juaben

Oil Mills à Kumasi et la société minière Golden Star qui a créé la Golden Star Oil Palm Plantation (GSOPP) qui est sur plusieurs sites dont Wasa et Bogoso, près de Takoradi.

Tous ces acteurs ont leur propre plantation mais achètent également auprès de producteurs contractuels. Ils disposent également de leurs propres usines pour extraire l’huile. Par exemple, la GOPDC, la plus importante société au Ghana, exploite directement 8 000 ha et traite avec des agriculteurs qui, eux, cultivent 14 352 ha ; elle a une usine d’extraction d’huile d’une capacité de 60 t/heure. Pour sa part, BOPP gère directement 4 738 ha avec une usine d’extraction de 30t/heure, et achète la production auprès d’agriculteurs contractuels qui cultivent 1 650 ha.

Des importations de Malaisie et d’Indonésie

Le déficit de production est comblé par des importations de Malaisie et d’Indonésie.

Les importations d’huile de palme de Malaisie ont augmenté de plus de 23% en 2016, passant de 163 000 t en 2015 à 203 000 t l’année suivante. Sur les seuls trois premiers trimestres de 2017, le Ghana a importé 213 000 t pour $ 149,1 millions, soit 70% de ses importations totales d’huile de palme.

La croissance des exportations

Quant aux exportations, le Ghana vend de l’huile non raffinée à l’Union européenne, souligne Samuel Avaala Awonnea, ainsi que des produits finis vers le reste de l’Afrique de l’Ouest, notamment au Mali et Niger, alors que les savons et détergents produits à partir de l’huile de palme sont vendus localement. Selon la Banque centrale, en 2013, l’huile de palme représentait 5,92% des exportations totales du Ghana, générant $ 45,63 millions, alors qu’en 2017, elle comptait pour 19,32% des exportations totales, pour une valeur de $ 173,74 millions ; au premier trimestre 2018, elle constituait 10,63% des exportations totales et $ 36,63 millions.

Parmi les défis auxquels la filière est confrontée, on note le faible rendement des grappes de fruits chez les petits producteurs, les questions de droits fonciers, le manque d’accès de certaines plantations enclavées.

Le pays ne compte qu’un seul producteur de plants, «et quelques producteurs ont eu des plants de sources douteuses qui ont donné de faibles rendements. Le transport des semences est également un problème auquel font face certains producteurs dans certaines régions», indique le responsable de l’OPDAG.

La culture du palmier à huile requiert une main d’œuvre nombreuse car la plupart des plantations utilisant encore la houe, ce qui n’attire guère les jeunes dans ce pays de l’or, du cacao et du pétrole, et renchérit les coûts. La pauvreté du sol dans la ceinture de production et les déficiences dans la gestion des fermes sont aussi, entre autres, des freins.

A ces difficultés agronomiques, l’huile de palme brute du Ghana a eu également mauvaise presse après que le Food and Drugs Authority (FDA) ait identifié en 2015 le colorant Soudan IV dans des produits sur le marché local.

Et maintenant

En 2012, avec le soutien de l’Agence française de développement (AFD), le gouvernement a lancé un schéma directeur pour l’huile de palme afin de booster la compétitivité du pays sur les marchés locaux et étrangers. L’ONG Solidaridad intervient également dans la filière. «Un des récents investissements dans l’industrie est venue de la Plantation Socfinaf Ghana située dans la Western Region. Ils viennent de construire leur propre moulin et dans 10 mois, il sera prêt», a annoncé Samuel Avaala Awonnea.

Le déficit national atteindrait 19 600 t d’ici 2030 et 272 000 t d’ici 2050. Pour le combler, il faudrait consacrer 49 400 ha et 68 000 ha de nouvelles plantations. «Mais le déficit réel atteindrait plutôt 309 600 t en 2030 et 514 400 t en 2050, ce qui nécessiterait de consacrer 77 400 ha et 128 600 ha respectivement pour y faire face», selon le rapport. Ceci permettrait de créer 15 480 emplois directs d’ici 2030 et 25 720 emplois d’ici 2050, ainsi que 77 400 emplois indirects d’ici 2030 et 128 600 d’ici 2050. $ 750 millions en investissements nouveaux seraient alors nécessaires pour assurer l’autosuffisance du pays.

A long terme, mettent en garde les acteurs, l’accroissement de la demande ne devrait pas être satisfait par les seules importations. Les économies locales devront se saisir des questions agricoles et de l’huile de palme pour générer de la croissance. Des opportunités existent clairement pour les entreprises étrangères et locales. 

Justice Lee Adoboe

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