La Chronique Matières du Jeudi (31 mars 2016)

Le dollar a démarré la semaine en hausse, tiré par des déclarations ambigües de la Réserve fédérale, laissant croire que les taux d'intérêt pourraient être relevés à deux reprises d'ici la fin de l'année, dont la première dès le mois d'avril, Mais mardi, la présidente Janet Yellen a coupé court à cette éventualité de hausse des taux, refaisant plonger le dollar. Sur le trimestre, le billet vert aura perdu près de 4%. Une tendance qui, traditionnellement, pousse à la hausse les prix des matières premières qui s'échangent, pour la quasi-totalité, en dollar. Un billet vert moins cher rend plus attrayant les prix des matières premières pour les détenteurs d'autres devises.

Une semaine écourtée sur de nombreux marchés mondiaux, Londres et New York étant fermés vendredi et lundi pour les fêtes de Pâques.

CACAO

Le jeu des devises a joué son plein cette semaine sur les marchés à terme du cacao. La force de la livre sterling face au dollar a fait baisser le prix du cacao sur le marché à terme de Londres en fin de période, à £ 2 173 la tonne, parti de £ 2 197 le 24 mars. En revanche, à New York, le dollar aidant, la tonne est passée de $ 2 962 à $ 2 974 sur la période sous revue.

L'arrivée de la saison des pluies est accueillie avec soulagement dans les régions de production cacaoyère en Côte d'Ivoire après des mois d'harmattan particulièrement violents et une saison sèche éprouvante. Des pluies qui pourraient faire remonter les prévisions pour cette campagne intermédiaire qui s'amorce et qui courra jusqu'à la fin de la campagne 2015/16, fin septembre.

Du 1er octobre 2015 au 27 mars, les arrivages de fèves aux deux ports ivoiriens ont atteint 1 236 000 t, estiment les exportateurs, contre 1 251 000 t sur la même période en 2014/15. Entre le 21 et le 27 mars, 10 000 t auraient été réceptionnées contre 16 000 t sur la même semaine l'année dernière.

Côté Indonésie, le gouverneur de Sulawesi Central a fait le point du projet pilote  développé sur 24 700 ha depuis 2015 avec une productivité accrue. L'objectif est de passer de 1 tonne à l'hectare (t/ha) en 2015 dans cette région d'Indonésie –la moyenne nationale étant plutôt à 500-600 kg/ha– à 1,5-2 t/ha à la fin du projet. Ceci dit, si l'on en croit le Central Sulawesi Plantation Office, le problème n'est pas seulement dans les rendements : actuellement sur les 300 000 ha destinés à la cacaoculture en 2015, seuls 198 000 ha seraient en production.

CAFÉ

Le café, tant Arabica que Robusta, a fait du sur-place cette semaine. L'Arabica sur le marché à terme de New York semble avoir des difficultés à franchir le seuil des $ 1,31-$ 1,315 la livre et a terminé la période sous revue à $ 1,27 parti de $ 1,2755 le 24 mars. A  Londres, le Robusta a pris un peu de couleur, terminant à $ 1 504 la tonne, parti de $ 1 491.

Côté Robusta, les prix au Vietnam ont grimpé en cette fin de semaine car la sécheresse –la pire de ces 30 dernières années dans la ceinture caféière des Central Highlands–  réduit considérablement l'offre ; on s'attend à ce que, globalement, sur la campagne, les exportations soient en baisse. Ceci dit, selon les estimations du gouvernement, le pays devrait avoir exporté 160 000 t sur le mois de mars, en hausse de 18,8% par rapport à mars 2015. Mais sur l'ensemble de la campagne 2015/16, les exportations pourraient n'être que de 1,2 Mt contre 1,3 Mt la campagne dernière. La prime pour les Indonésie augmente aussi car les disponibilités se réduisent

CAOUTCHOUC

Les cours du caoutchouc ont chuté jeudi tirés vers le bas par une baisse des prix du pétrole et le ralentissement du marché boursier de Tokyo, alors que les investisseurs sont dans l’attente  des données sur  l'activité manufacturière de la Chine et sur d'emploi aux Etats-Unis. Le contrat de septembre a clôturé à 176,5 yens ($1,57) le kilo.

« Le marché du caoutchouc a augmenté régulièrement  depuis un bas enregistré en février, mais il y a une résistance à environ 180 yens le kilo », a déclaré un négociant basé à Tokyo.

Les contrats à terme sur Tokyo Commodity Exchange (TOCOM) ont gagné plus de 20 % depuis un bas à 144,5 yens en février, une remontée consécutive à l’hivernage et à la décision des principaux producteurs de caoutchouc d’Asie de réduire leurs exportations.

Les exportations de caoutchouc du Vietnam au cours du premier trimestre ont augmenté de 20,6 % par rapport au 1^er trimestre 2015 à 236 300 tonnes. Les recettes sont en recul de 4,9% à $266 millions. 

Côté entreprise,  le pétrolier chinois Sinochem a proposé de racheter 30,07% du singapourien Halcyon Agri Corp  afin de rassembler leurs opérations caoutchouc et créer la plus importante chaine de valeur de caoutchouc naturel au monde (cf. nos informations).

COTON

Les cours du coton se sont raffermis mercredi pour clôturer à 57,67 cents la livre pour le contrat de mai. Le marché est toutefois plutôt léthargique dans l’attente de la publication jeudi  du rapport sur les intentions de semis par le gouvernement américain.

La superficie  et la production de coton en Turquie sont  attendues en hausse  d’environ 15% en 2016, selon le département américain de l’Agriculture (USDA). Les superficies sont estimées à 425 000 hectares et la production à 650 000 tonnes. Une augmentation consécutive au prix élevé du coton local et aux faibles rendements des cultures alternatives comme le maïs en 2015. La consommation domestique devrait diminuer en 2015 avec le ralentissement des exportations de produits textiles.

Au Mexique, la production devrait diminuer d'environ 4% avec la baisse attendue de 9%  de la superficie ensemencée en 2016/17 pour atteindre environ 870 000 balles selon l’USDA. La consommation totale de coton domestique devrait légèrement augmenter à 2 millions de balles.

Côté négoce, le patron du coton chez Cargill Inc, Doug Christie, a quitté l’entreprise. Il a y est resté 29 ans et était à la tête du département coton depuis 2009.

HUILE DE PALME

Les cours de l’huile de palme ont plongé mercredi après trois jours consécutifs de hausse, le marché s’affaiblissant sur l’appréciation du ringgit. Le contrat de juin a clôturé à 2 749 ringgits ($698) la tonne, perdant 1,1%.

L'huile de palme a gagné plus de 8% depuis le début du mois  atteignant un sommet de 2 793 ringgits mardi suivant la hausse  des huiles végétales concurrentes et sur fonds de préoccupations sur le temps sec du phénomène El Nino qui va réduire la production.

La production d'huile de palme en Malaisie, deuxième producteur mondial, devrait diminuer de 2 millions de tonnes  (Mt) en 2015/16 (septembre) par rapport à 2014/15, selon  une déclaration de  l’analyste Dorab Mistry à la treizième International Oils & Oilseeds Conference à Beijing. Une baisse de la production, la plus forte depuis au moins sept ans, pourrait apporter un soutien aux prix. Sur le premier semestre 2016, la baisse serait de  plus d’1 Mt.  Dorab Mistry a confirmé son estimation de réduction de 1,2 Mt pour la production indonésienne et maintenu que  les prix de l’huile de palme atteindront 3 000 ringgits la tonne cette année.

Les exportations d’huile de palme de Malaisie ont grimpé de 22,2 % à 1 167 775 tonnes en mars, selon la SGS.

RIZ

Les échanges sur le marché du riz tant en Thaïlande et au Vietnam ont été faibles cette semaine, les prix élevés décourageant les acheteurs tandis que la sécheresse limite l’offre. Le Viet 5% est resté inchangé à $380-$385 tandis que le même grade en Thaïlande a légèrement baissé à $367-$381 la tonne contre $371-$383 la semaine dernière en raison de l’évolution du taux de change bath/dollar.

Selon le ministère de l’Agriculture et du développement rural, les exportations de riz du Vietnam devraient progresser de 41,6% en volume et  de 40, 8% en valeur au premier trimestre 2016 par rapport au premier trimestre 2015.  Le rapport du ministère estime que le Vietnam exportera 1,59 million de tonnes de riz pour une valeur de $692 millions. Les principaux clients sont l’Indonésie, puis la Chine tandis que les exportations sont en hausse aux Philippines, en Malaisie et aux Emirats Arabes Unis.

SUCRE

Un coup pour rien sur le marché du sucre ! Le roux comme le blanc ont terminé la période sous revue exactement au même prix qu'ils l'avaient démarrée, le roux à 15,87 cents la livre à New York et le blanc à $ 454,40 la tonne à Londres. Ceci dit, sur le trimestre, le roux aurait gagné près de 4%.

A noter que le lancement d'un nouveau contrat de sucre blanc prévu initialement fin mars à Londres, sur le ICE Futures Europe, a été reporté en attendant le feu vert de la Banque d'Angleterre.

La récolte de canne à sucre a démarré dans le Centre-Sud du Brésil, une récolte attendue en hausse par rapport à l'année dernière. Mais cette belle performance devrait être compensée par des récoltes moins importantes dans plusieurs pays asiatiques producteurs. Notamment, en Inde, où le pays subit sa deuxième année de sécheresse, depuis le début de la campagne le 1er octobre, les raffineries ont produit 1,1 Mt de moins de sucre que sur la période correspondante la campagne dernière. Le gouvernement fédéral, quant à lui, a révisé à la baisse de 1,4% ses prévisions de production sucrière.

Côté investissements, la Banque européenne pour la reconstruction et le développement (Berd) a décidé d'investir $ 100 millions dans le capital dans la United Sugar Company of Egypt (USCE), une filiale du groupe Savola, un des plus importants groupes agro-industriels du Proche Orient et d'Afrique du Nord. En réalité, un prêt de $ 50 millions déjà accordé à la société sera transformé en actions et 50 autres millions seront mis au capital.

A Maurice, le plus important producteur de sucre, Omnicane, a enregistré une hausse de 24% de son bénéfice avant imposition en 2015, à $ 9,44 millions. "L'actuel déficit sucrier mondial devrait permettre d'obtenir un prix plus élevé en 2016", a souligné la société.