Karité, baobab, gomme arabique… des produits vulnérables de plus en plus recherchés

 Karité, baobab, gomme arabique… des produits vulnérables de plus en plus recherchés
Partager vers

Karité, baobab, gomme arabique, Prunus africana, encens Olibanum, Argan… , six des 12 « ingrédients sauvages » examinés par la FAO dans son rapport publié aujourd’hui à l’occasion de la Journée nationale de l’arganier, « Wild Check: Assessing risks and opportunities of trade in wild plant ingredients » (Regard sur la flore: évaluation des risques et des perspectives du commerce des ingrédients de végétaux sauvages)  viennent d’Afrique de l’Ouest. Lorsqu’on estime qu’à l’échelle mondiale, les plantes sauvages sont utilisées par 3,5 à 5,8 milliards de personnes, tous groupes socioéconomiques et régions géographiques confondus, et qu’un milliard de personnes dépendent des aliments sauvages pour leur subsistance et leur sécurité alimentaire, on feuillette le rapport avec un autre regard.

En outre, leur valeur économique monte en flèche car ces plantes font maintenant partie du quotidien de chacun, sous une forme ou une autre, que ce soit des lotions pour la peau, des tisanes, des ingrédients de compléments alimentaires ou pour agrémenter nos plats et salades. Elles sont devenues tellement présentes qu’entre 2000 et 2020, la valeur commerciale des plantes médicinales et aromatiques a enregistré à elle seule une augmentation de plus de 75%.

 

 

Enfin, ces plantes sauvages présentent des avantages considérables pour notre biodiversité, indique encore la FAO mais qui met en garde contre leur surexploitation. « Il convient, comme c’est le cas pour toutes nos ressources naturelles, de ne pas perdre de vue la dimension de la durabilité. Deux espèces végétales sur cinq sont menacées d’extinction à travers le monde en raison de la perte de leur habitat, d’une utilisation non durable et des effets du changement climatique. »

Le rapport examine 12 de ces plantes, « les douze plantes sauvages vedettes », et propose des moyens de les protéger. Ici, nous ne retiendrons que les trois intéressant l’Afrique de l’Ouest. 

Le karité

 

Dans toute l’Afrique, de l’Ouganda au Sénégal, les noix de karité sont récoltées et transformées en beurre de karité, un produit comparable au beurre de cacao. Le beurre de karité est largement utilisé à la fois en cosmétique et dans l’industrie alimentaire, notamment dans la fabrication du chocolat. En Afrique de l’Ouest, les noix sont principalement récoltées et transformées par les femmes, ce qui contribue aux revenus de quelque trois millions de femmes.

Au Burkina Faso, une étude citée dans le rapport (mais qui remonte à 2012 et la FAO indique qu’il n’y a pas de statistiques disponibles après 2017…) indique que les noix de karité contribuent en moyenne à 12% des revenus des foyers les plus modestes dans le pays.

 

Entre 2007 et 2017, le Bénin, le Burkina Faso, la Côte d’Ivoire et le Mali étaient les plus gros exportateurs, le Ghana en tête. Le rapport offre des informations sur les exportateurs, les importateurs, les prix mais ce sont des chiffres qui ne sont pas actualisées.

 

Le karité est classé sur la liste rouge de l’UICN parmi les espèces « vulnérables ». Pour l’équipe de la FAO, il présente un « risque biologique » « moyen » notamment de surexploitation pour la production de bois et de charbon, pour la production agricole et en raison de la démographie locale galopante. Quant au « risque social », il est élevé en raison du travail des enfants, de la discrimination à l’égard des femmes ainsi que de la santé et la sécurité car les process de cueillette et de transformation requièrent beaucoup de main d’œuvre.

Quant aux opportunités, la FAO les identifie en termes de certification, de partenariats et d‘association ainsi qu’en termes de conservation et restauration de vergers.

Le baobab

 

Le fruit du baobab, riche en vitamine C et en fibres, est réduit en poudre et consommé en tant qu’aliment ou comme boisson, tandis que l’huile de ses graines est utilisée dans les produits cosmétiques. En Afrique, certaines parties du baobab, telles que les feuilles et les fleurs, sont consommées localement. Les racines et l’écorce sont utilisées en tant que remèdes.

 

À l’heure actuelle, les changements intervenant dans l’utilisation des terres constituent une menace pour les espèces de baobab qui sont pour l’essentiel des arbres sauvages, indique la FAO qui appelle en conséquence à un approvisionnement responsable. La conservation des baobabs peut également permettre de contribuer à protéger de nombreuses autres espèces, notamment les chauves-souris et d’autres pollinisateurs tels que la mouche bleue et les papillons nocturnes qui pollinisent les fleurs du baobab.

 

En Afrique de l’Ouest où la récolte porte tant sur les feuilles que les fruits contrairement à la pratique en Afrique de l’Est (fruits) ou l’Afrique australe (fruits et écorce), la plus grosse demande provient du marché local bien que d’importants volumes soient exportés vers l’Union européenne. Les principaux producteurs sont le Sénégal, le Ghana, le Bénin et le Burkina Faso et les principaux importateurs le Royaume uni, la France et l’Allemagne. La demande aux Etats-Unis croit rapidement notamment pour la poudre pour fabriquer des antioxydants. La graine du baobab qui recèle de l’huile est utilisée tout d’abord par l’industrie cosmétique française mais aussi au Royaume Uni, Etats-Unis, Allemagne et Corée.

 

Quant aux risques, sur le vecteur biologique il est estimé moyen, le risque le plus important étant la coupe de l’arbre pour créer du terrain agricole. En terme social, le risque est jugé élevé pour les mêmes raisons que le karité avec le travail des enfants, le travail discriminant envers les femmes, les conditions de santé et sécurité, mais aussi l’accès à la terre.

 

Quant aux potentiels, on retrouve aussi la préservation et la certification mais aussi, au Burkina faso notamment, l’utilisation du baobab pour construire la Grande Muraille verte

La gomme arabique

L’acacia est la plupart du temps sauvage, la gomme étant utilisée essentiellement par les industries alimentaire et pharmaceutique.  Les trois principaux pays exportateurs sont le Soudan (66%), le Tchad (13%) et le Nigeria (8,5) sur la base de chiffres datant de 2018 avec une étude de la Cnuced à laquelle CommodAfrica* a contribué.

Depuis le début des années 2000, le Nigeria, le Sénégal et le Soudan ont commencé à développer des unités de transformation locale mais la majorité des volumes est exporté brute : 58% de la gomme récoltée est exportée vers l’Europe et singulièrement la France, 30% vers l’Asie, 11% vers l’Amérique du Nord et 0,5% l’Afrique. Les exportations de gomme arabique non transformée ou semi transformée ont quasiment triplé en 25 ans avec un tonnage annuel moyen de 102 000 t entre 2014 et 2016. Les exportations de gomme transformée ont aussi triplé, atteignant en moyenne 53 0000 t. La France exporte les deux-tiers de la gomme arabique transformée.

En termes de risques, il est considéré comme étant moyen au plan biologique face aux changements climatiques et au surpâturage. En terme social, le risque est élevé au Soudan, au Tchad et au Nigeria pour des raisons, là encore, liées au travail d’enfants, du manque de droits de s’associer et de s’organiser pour permettre des négociations collectives, la faiblesse des rémunérations des cueilleurs -le plus souvent des cueilleuses, qui sont souvent issues de groupes vulnérables de la société.

 

UNCTAD. 2018. Commodities at a Glance: Special Issue on Gum arabic. Geneva, UNCTAD. https://UNCTAD.org/system/files/offi[1]cial–document/suc2017d4_en.pdf

 

Autres Articles

Leave a Reply

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *