La Chronique matières premières agricoles au 22 octobre 2020

 La Chronique matières premières agricoles au 22 octobre 2020
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La faiblesse du dollar fait la joie des marchés de matières premières agricoles, la plupart d’entre elles faisant l’objet de transactions internationales en billet vert. Mercredi, l’euro a atteint un pic de cinq semaines face au dollar, à $ 1,188, mais a baissé hier à $ 1,1825, plombé notamment par l’enquête décevante sur le moral des consommateurs allemands. Car le moral des marchés continue d’être plombé ! Les discussions à Washington sur un plan de relance budgétaire n’aboutissent toujours pas et Donald Trump accuse ses rivaux démocrates de faire preuve de mauvaise volonté. La situation sanitaire s’aggrave un peu partout, sauf en Chine…. En France, 54 départements seront soumis à un confinement nocturne, la région de Rome pourrait décréter un couvre-feu et la Belgique serait en passe de se reconfiner ; aux Etats-Unis, près de deux tiers des Etats dépassent désormais le seuil d’alerte de 100 nouveaux cas pour 100 000 habitants sur une semaine.

Le marché pétrolier a rebondi après le recul marqué mercredi à l’annonce d’une hausse des réserves d’essence aux Etats-Unis, venue souligner la dégradation de la demande. Le Brent termine à $ 42,65 le baril et le brut léger américain (WTI) à $ 40,87. Ils avaient perdu respectivement 3,3% et 4% mercredi.

CACAO CAFE CAOUTCHOUC COTON HUILE DE PALME RIZ SUCRE

CACAO

La fève rebondit ! A New York, la tonne était hier soir à un plus haut en deux semaines, clôturant à $ 2 474 contre $ 2 361 vendredi dernier, tandis que Londres était à £ 1 694 contre £ 1 639 en fin de semaine dernière.

Tous les yeux sont tournés vers la Côte d’Ivoire et la montée de la violence avant l’élection présidentielle du 31 octobre, dans huit jours. Cette semaine, six personnes ont été tuées à Dabou, dans le sud du pays. Depuis le mois d’août, ce sont 20 personnes qui ont trouvé la mort. Chacun se remémore ce qui s’est passé il y a dix ans et ses 3 000 morts. Et le climat se tend encore, les deux rivaux du président candidat Alassane Ouattara, Henri Konan Bédié et Pascal Affi N’Guessan appellannt au boycott du scrutin.

Côté filière, en Côte d’Ivoire, la nouvelle campagne démarre très fort. Les arrivages aux ports d’Abidjan et de San Pedro ont fait un bond de 38%, à 55 000 t, entre les 12 et 18 octobre et par rapport à la même période la campagne dernière, estiment les exportateurs interrogés par Reuters. Depuis le début de la campagne, le 1er octobre, et au 18 octobre, la progression a été de 1,4%, totalisant 211 000 tonnes (t).

CAFE

Si l’Arabica a terminé hier soir en hausse sur le marché à terme de New York, cela n’efface pas les sept dernières sessions de baisse consécutive. Ainsi, partie de $ 1,0725 vendredi dernier, la livre (lb) d’Arabica a terminé hier soir à $ 1,067. Mercredi, il était tombé à $ 1,0320, son plus faible prix en trois mois. En revanche, le Robusta grimpe, passant de $ 1 273 vendredi dernier à Londres à $ 1 307 la tonne hier soir.

Un marché du café qui hésite quelque peu entre les conditions climatiques très sèches au Brésil même si des pluies sont annoncées, la fermeture des cafés et restaurants en Europe avec la deuxième vague du coronavirus, et la faiblesse du real, la monnaie brésilienne, ce qui rend très compétitif le café brésilien et incite le géant du café à vendre : depuis le début de l’année, la monnaie brésilienne a perdu 40% de sa valeur. Au 13 octobre, les producteurs brésiliens ont vendu 64% de leur récolte 2020, soit bien au-delà de la moyenne de 53% à pareille époque sur les cinq dernières années. Le rythme de ventes s’est ralenti ces derniers jours car le prix du café a baissé à New York et parce que les traders et exportateurs ont déjà beaucoup vendu de la récolte record brésilienne de cette année. A noter qu’au Brésil, les récentes pluies ont amélioré les perspectives de floraison des caféiers pour la prochaine récolte en 2021.

Côté Vietnam, c’est la tempête avec ses fortes pluies qui doivent encore s’abattre ce week-end sur le Vietnam, notamment sur la ceinture caféière des Central Highlands, qui font grimper les cours bien que les traders estiment que les cerises, qui devraient être récoltées à partir du mois prochain, ne devraient pas être impactées. Mais c’est tout de même la huitième tempête qui touche le Vietnam depuis le début de l’année et la troisième ce mois-ci.

Côté marché, les planteurs dans les Central Highlands au Vietnam ont vendu leur café à 31 100-33 000 dongs le kilo ($ 1,34-1,41) contre 31 300-32 800 dongs la semaine dernière, mais les volumes sont très faibles. A l’export, les traders ont proposé le Grade 2, 5% brisures et grains noirs, avec une prime de $ 170 à $ 180 sur la cotation à Londres pour l’échéance janvier ; la semaine dernière, la prime était de $ 150-160.

En Indonésie, les prix ont peu changé par rapport à la semaine dernière. Certains ont offert leur café avec une prime de $ 170 sur janvier à Londres tandis que d’autres ont vendu avec une surcote de $ 250 à $ 270. Les récoltes à Lampung et dans les régions avoisinantes dans le sud de Sumatra sont maintenant terminées et certains intermédiaires font de la rétention.

En Ouganda, les exportations de café -essentiellement du Robusta- ont grimpé de 40% en septembre par rapport à septembre 2019, selon Uganda Coffee Development Authority (UCDA). Elles ont totalisé 506 470 sacs de 60 kg contre 362 219 l’année dernière. Un dynamisme qui serait le fruit de nouveaux arbres qui entrent en production et d’une météo favorable.

Au Pérou, cinquième exportateur mondial d’Arabica, la faiblesse des prix du café et le manque de main d’œuvre migratoire seraient à l’origine de la baisse de 10% de la production caféière depuis le début de l’année. Ceci pourrait soutenir les prix, selon le courtier Marex Spectron, car la production de ce pays sur l’ensemble de la campagne pourrait ainsi baisser de 2,5%, estime-t-il.

En revanche, en Colombie -n°3 mondial toutes variétés confondues, derrière le Brésil et el Vietnam, on se frotte les mains. La dépréciation du peso, la monnaie nationale, et la remontée des cours mondiaux cette année devraient permettre au pays d’engranger 9 trillions de pesos ($ 2,33 milliards) en recettes d’exportation du café, a annoncé mercredi le ministre des Finances. Ceci représente une hausse de 23,3% sur l’année dernière. A fin 2020, le pays s’attend à vendre à l’international  12,7 à 13,4 Ms contre 13,6 Ms l’année dernière. Côté production, la récolte serait de 14 Ms contre 14,8 Ms en 2019.

Côté consommation, aux Etats-Unis, les stocks de café vert en entrepôts ont chuté de 343 271 sacs de 60 kg à fin septembre, totalisant 6,4 Ms, annonce la Green Coffee Association. Il s’agit de la plus forte diminution depuis le mois de février et du deuxième mois consécutif de baisse.  Ceci dit, les volumes demeurent relativement élevés si on considère qu’ils avaient chuté à 4 Ms en 2011.  

CAOUTCHOUC

C’est l’euphorie sur le marché du caoutchouc avec des cours au plus haut depuis plus de trois ans. Sur l’Osaka Exchange (OSE), ils ont clôturé hier à 219,8 yens ($2,10) contre 200,6 yens vendredi dernier tandis qu’à Shanghai, les cours sont passés de 13 825 yuans la tonne à 14 860 yuans ($2 227) hier. Un marché soutenu par l’accélération de la reprise économique au troisième trimestre en Chine, premier consommateur mondial de caoutchouc,  et la reprise de ses achats de caoutchouc. Le marché de Shanghai a enchainé dix séances consécutives de hausse.

Face à la reprise de la demande, les approvisionnements physiques des producteurs d’Asie du Sud-Est se resserrent en raison des fortes pluies. Toujours du côté de l’offre, les yeux sont aussi tournés vers la Thaïlande, premier producteur et exportateur mondial de caoutchouc, où des dizaines de milliers d’étudiants et de jeunes défient chaque jour la junte au pouvoir en manifestant et réclamant la démission du 1er ministre. Une situation qui fait craindre une rupture dans l’approvisionnement dans un contexte d’un possible ralentissement de la production de caoutchouc naturel en Asie sous l’action conjuguée de la pénurie de main d’œuvre suite à la pandémie de la Covid-19 et du phénomène El Nina qui créé des conditions météorologiques instables. L’International Tripartite Rubber Council (ITRC), qui regroupe la Thaïlande, l’Indonésie et la Malaisie, indiquait le mois dernier qu’il s’attendait à une baisse de la production de caoutchouc naturel  sur le dernier trimestre en 2020 – au moins  de 859 000 tonnes par rapport à 2019 -et à une nouvelle baisse au début de 2021.

En Inde, l’industrie pneumatique se prépare à une forte reprise conjuguée à une amélioration des flux de trésorerie avec une reprise de la demande de remplacement et un rebond des ventes de véhicules neufs. “L’industrie pneumatique  était dans un cycle de ralentissement rare (de l’année fiscale 2020 à 2021), après deux décennies de croissance séculaire”, indique  IIFL Securities dans une note aujourd’hui. “La demande de remplacement connaît une forte reprise, tandis que les ventes d’équipement d’origine se sont également redressées“, ajouté le courtier.

Selon l’Association des fabricants de pneus automobiles, l’industrie pneumatique  représente environ 640 milliards de roupies ($8,5 milliards) avec 41 entreprises et 66 usines de fabrication. L’Inde a exporté des pneus d’une valeur d’environ 128,40 milliards de roupies au cours de l’exercice 2020.

Après une phase de dépenses en capital élevées au cours des cinq dernières années, les dépenses devraient s’abaisser ce qui se traduira par une augmentation des flux de trésorerie à l’avenir, précise IIFL Securities. Et conclut :  « une réduction des dépenses en capital, combinée à une hausse des volumes, et à l’amélioration des marges et à la réduction de la dette qui en résultent sont de bon augure pour les bénéfices du secteur ».

Côté entreprise, le premier fabricant mondial de pneu, le japonais Bridgstone, a lancé « A Layere Journey », une campagne mondiale mettant en avant ses efforts pour intégrer la durabilité sur toute sa chaîne de valeur en mettant l’accent sur l’approvisionnement durable en caoutchouc naturel. L’entreprise a pour objectif d’avoir 100% de matériaux durables en 2050.

COTON

Toujours plus haut ! Le marché du coton a encore grimpé cette semaine et franchit la barre des 70 cents la livre avec une clôture hier à 71,94 cents sur l’ICE contre 69,92 cents vendredi dernier. Depuis le creux atteint le 1er avril  en pleine pandémie de la Covid-19 à environ 50 cents la livre, les cours ont gagné 40%.

Source : ICE

Si les spéculateurs sont toujours bien présents, la reprise de la demande est palpable et bien meilleure que prévue. La relance des ventes au détail de vêtements dans le monde – les ventes de septembre aux États-Unis sont rapportées à 88% des niveaux de 2019-  se conjugue avec une augmentation substantielle de la demande des usines indique Rabobank qui anticipe que « la pire destruction de la demande de coton engendrée par la Covid-19 sera derrière nous ». La Chine, l’Inde, le Pakistan et le Brésil ont connu une forte demande pour leur coton, souligne Plexus Cotton tandis que les ventes à l’exportation des Etats-Unis sont toujours soutenues.

Face à ce regain de demande, l’offre, bien qu’encore très abondante, devrait s’effriter avec une production américaine plus basse qu’anticipée dans dernier rapport WASDE donnée à 17,06 millions de balles tandis que celle d’Inde est aussi revue à la baisse. En outre, la qualité ne pourrait être au rendez-vous. L’évolution du dollar, en baisse, a plutôt influencé positivement le marché cette semaine. De même, les marchés de céréales et oléagineux ont été solides.

Si le marché est haussier, les analystes mettent en garde contre un retour du bâton. Si la banque néerlandaise a revu à la hausse ses prévisions de prix – $65 cents la livre au 1er trimestre 2021 et 70 cents au 4ème trimestre 2021 – elle met en garde : « Le bilan mondial reste lourd – les stocks mondiaux hors Chine devraient atteindre des niveaux records en 2020/21, en hausse de 4% en glissement annuel, à 63,3 millions de balles – bien au-dessus de la moyenne décennale de 41,4 millions de balles ».

La Chine prévoit d’acheter environ 500 000 tonnes de coton de sa région du Xinjiang pour les réserves de l’État sur la période du 1er décembre au 31 mars 2021. Ces achats, qui serait d’environ 7 000 tonnes par jour ouvrable, viennent après un rapport le mois dernier selon lequel les États-Unis envisageaient une interdiction du coton en provenance du Xinjiang  (Lire : L’interdiction américaine du coton du Xinjiang en Chine infléchira-t-elle le marché du coton ? et La Chronique matières premières agricoles au 18 septembre 2020) et que la Chine a ordonné aux usines de cesser d’acheter du coton australien (Lire : La Chronique matières premières agricoles au 16 octobre 2020).

La Better Cotton Initiative (BCI) a annoncé mercredi qu’elle cessera toutes ses activités sur le terrain dans la région autonome du Xinjiang en Chine, y compris le renforcement des capacités, le suivi des données et l’établissement de rapports. Face aux allégations soutenues de travail forcé et autres violations des droits de l’homme, la BCI avait déjà suspendu en mars 2020, la certification du coton dans cette région.

HUILE DE PALME

Le marché de l’huile de palme est quasi inchangé cette semaine mais à la forte chute lundi (-3%) a succédé trois jours de reprise. De  2969 ringgits la tonne vendredi dernier, les prix ont atteint hier  2 942 ringgits ($709,94) la tonne.

Tandis que le marché s’attend à une production d’huile de palme réduite en octobre, les  exportations de Malaisie du 1er au 20 octobre ont progressé de 4% par rapport à septembre.

L‘Inde a importé 392 891 tonnes d’huile de palme de Malaisie en septembre en hausse de 14% par rapport au mois d’août,  selon la Solvent Extractors ‘Association (SEA). Les importations en provenance de Malaisie comprenaient 381 079 tonnes d’huile de palme brute (CPO) et 11 812 tonnes d’huile de palmiste brute (CPKO).

La Malaisie a déclaré jeudi qu’elle considérait les allégations américaines de travail forcé dans les plantations d’huile de palme comme un “vieux problème” mais qu’elle était disposée à prendre les mesures appropriées si nécessaire.

RIZ

Les inondations ont ralenti la récolte de riz dans la plupart des pays asiatiques cette semaine, faisant grimper les prix à l’exportation du Vietnam et les prix intérieurs au Bangladesh. En revanche, tant en Inde qu’en Thaïlande, la faible demande a pesé sur les prix.

Au Vietnam, les prix du Viet 5% ont progressé à $485-$495 la tonne contre  $485-$490 la semaine dernière avec les pluies qui ont entravé la récolte en cours dans le Delta du Mékong, limitant les approvisionnements nationaux.  Des pluies qui ont aussi affecté la qualité de la récolte automne-hiver. Du côte de la demande, les commerçants signalent qu’elle se reprend mais toutefois les acheteurs des Philippines sont toujours absents.

En Thaïlande, les prix du Thaï 5% sont tombés à $435 -$440 la tonne contre $445-$480 la semaine dernière en raison d’une faible demande. Cependant,  les inondations dans certaines provinces rizicoles pourraient frapper l’offre fraîche attendue dans les semaines à venir.

En Inde, les prix du riz étuvé 5% ont fléchi à $372-$377 la tonne contre $376-$382 la semaine dernière en raison de la faible demande et de la dépréciation de la roupie.

Au Bangladesh,  de fortes pluies ont également endommagé les cultures en cours de maturation. Des inondations généralisées provoquant également une flambée des prix intérieurs, malgré la décision du gouvernement de fixer les tarifs de gros.

SUCRE

Autant utiliser ses calories à courir…. Et c’est ce que fait le sucre ! Le roux frôle les 15 cents la livre (lb) sur le marché à terme de New York : parti de 14,43 cents vendredi dernier, il a grimpé hier en cours de séance à 14,94 cents avant de redescendre à 14,78 à la clôture après des prises de bénéfices et des opérations de consolidation technique mardi et mercredi. Le sucre blanc, quant à lui, a gagné $ 3 sur la période, passant de $ 396 en fin de semaine dernière à Londres, à $ 399 hier soir.

Une hausse des prix, notamment du sucre roux, liée au manque d’information qui filtre du côté indien quant à sa politique de subvention à l’export de sucre. Les rumeurs de marché laissent entendre que les subventions à l’export ne seront pas renouvelées avant la tenue des élections le mois prochain.

Quant au Brésil, les récentes pluies ont ralenti les activités sucrières actuellement en cours mais devraient améliorer les perspectives de récolte en 2021.

L’Egypte se félicite de ses bons résultats sucriers. Elle détient plus d’un million de tonnes dans ses entrepôts, ce qui correspond à quatre mois de consommation. Le pays est aujourd’hui auto-suffisant à plus de 80% après avoir produit cette année 900 000 t de canne à sucre et 1,5 Mt de betteraves la campagne dernière, selon le patron du Sugar Crops Council au ministère, Mostafa Abdel Gawad.

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