La Chronique matières premières agricoles au 20 Juillet 2023

 La Chronique matières premières agricoles au 20 Juillet 2023
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Les places financières européennes ont clôturé en hausse hier soir, rassurées par des chiffres de l’inflation britannique et en zone euro qui confirment que la dynamique des prix dans les pays développés ralentissait, rassurant les investisseurs. En outre, les chiffres publiés ces derniers jours et semaines par les entreprises européennes sont meilleurs que prévu. En revanche, aux Etats-Unis, les données sur l’emploi américain suggèrent que la Fed pourrait remonter ses taux plus haut qu’anticipé par les marchés. En effet, les nouvelles demandes d’allocations chômage aux Etats-Unis pour la semaine dernière ont ainsi diminué à 228 000, selon le département du travail, alors que la Réserve fédérale a insisté à de nombreuses reprises sur l’importance du ralentissement des marchés du travail pour ramener l’inflation à sa cible.

A la clôture des marchés hier soir, l’euro était à $ 1,1133.

Côté pétrole, les investisseurs cherchent toujours une direction claire entre des inventaires américains en recul, des achats chinois importants et des incertitudes sur la demande mondiale au deuxième semestre. Le Brent a terminé à $ 78,93 le baril et le brut léger américain (WTI) à $ 74,8 dollars.

CACAO

Les mauvais chiffres de broyages à travers le monde ont fait l’effet d’une douche froide sur les cours du cacao alors que c’est précisément un excès de douche chaude en Afrique de l’Ouest qui les ont conduits mardi à New York à leur plus haut en 12 ans. A Londres, il y a quelques jours, ils flirtaient avec des sommets qui n’avaient plus été tutoyés depuis 45 ans !

Sur le marché à terme de Londres, la tonne de fèves a clôturé hier soir à £ 2 563 sur l’échéance septembre alors que nous l’avions laissée, à la clôture vendredi, à £ 2 498 après avoir perdu 3,2% sur la semaine dernière. A New York, le cacao s’est hissé de $ 3 352 en fin de semaine dernière à $ 3 388 hier soir.

Notons qu’à Londres, les spéculateurs ont réduit leurs positions longues de 3 425 lots, à 88 109 lots au 11 juillet.

Une flambée des cours alimentée par de très fortes pluies dans les ceintures cacaoyères d’Afrique de l’Ouest, ce qui déclenche la maladie de la pourriture noire si redoutée par les cacaoculteurs, et ce qui est de mauvais augure pour la prochaine campagne 2023/24 qui démarre début octobre. A ceci se greffent les craintes que le phénomène météorologique La Niña impacte les cultures, ceci pouvant entrainer le marché mondial vers une troisième campagne consécutive déficitaire.

Alors, certes, les broyages baissent dans les principaux pays de consommation mais ces broyages ne sont plus le baromètre indéfectible de la consommation dans chacune de ces régions du monde et, a fortiori, ils ne le sont même plus vraiment de la consommation planétaire : on transforme de plus en plus en Côte d’Ivoire, au Ghana, au Cameroun, au Nigeria, sans parler de l’Amérique latine, que ce soit l’Equateur ou le Brésil. Des pays -à l’exception du Brésil, qui ne consomment guère de chocolat.

Cependant, regardons de plus près la situation des broyages au second trimestre avec les chiffres qui sont « tombés » -sans jeu de mot !- entre jeudi dernier pour l’Europe, premier à publier, et hier avec l’Amérique du Nord. Ils ne sont pas bons ! Lire aussi

La National Confectionners Association (NCA) en Amérique du Nord a annoncé hier une chute de 11,6% par rapport au second trimestre 2022, à 102 493 t. C’est un résultat beaucoup plus mauvais que ce à quoi s’attendaient les marchés et analystes dont les pronostics variaient entre la stabilité et -6% (lire aussi). Quinze usines ont déclaré au NCA leurs données sur la transformation du cacao pour la période, soit le même nombre qu’en 2022.

En Asie, les broyages ont baissé de 6,5 % en glissement annuel à 213 977 tonnes métriques selon les données publiées plus tôt jeudi, et de 5,7 % en Europe à 343 283 t, selon l’Association
européenne du cacao. En Allemagne, le recul est de 2,3%, à 94 302 t, selon l’association de l’industrie de la confiserie BDSI.

Quant à l’actualité dans les pays producteurs, la Côte d’Ivoire a publié cette semaine ses chiffres provisoires d’exportation dont les volumes ont chuté de près de 12% entre les mois
d’octobre et de juin et par rapport à la même période la campagne dernière, pour totaliser 1 231 594t. Toujours à l’export, les produits semi-transformés du cacao, notamment la poudre et le beurre, ont glissé, quant à eux, d’à peu près 1% sur cette même période, totalisant 389 004 t. Lire aussi

Les arrivages de fèves aux deux ports ivoiriens d’Abidjan et de San Pedro ont atteint 2,259 Mt entre le 1er octobre et le 16 juillet, estiment les exportateurs.

Au Cameroun, une vaste opération de démantèlement de réseau de trafic illégal de cacao avec le Nigeria a été démantelé, a-t-il été annoncé mercredi.

CAFÉ

Un café morose, tiède… De $ 1,608 sur septembre coté en fin de semaine dernière à la clôture du marché à terme de New York, on retrouvait la livre (lb) d’Arabica hier soir à $ 1,5805. Lundi, elle est tombée à son plus bas prix en six mois. Le Robusta ne fanfaronne pas, avec un glissement enregistré de $ 2 540 la tonne vendredi dernier à $ 2 536 hier soir, également sur l’échéance septembre : ceci demeure à des niveaux de prix historiquement élevés !

Côté production, la plus grande coopérative caféière au monde, le brésilien Cooxupe -premier exportateur brésilien de grains- a annoncé qu’au 14 juillet 50,5% de ses superficies caféières avaient déjà été récoltées ; le plus élevé depuis 2020 lorsque les producteurs avaient récolté 52,2% à la même date. A pareille époque l’année dernière, ce taux était de 42,8%.

Au Vietnam, leader mondial du Robusta, les activités de négoce sont très très limitées car il n’y a plus de café et ce, depuis plusieurs mois maintenant, ont déclaré jeudi des négociants. Dans les Central Highlands, les producteurs ont vendu quelques volumes encore entre 64 800 et 65 600 dongs ($2,74-2,78) le kilo, un peu plus que la fourchette de 64 800 dong à 65 000 dong de la semaine dernière. « La fourchette de prix actuelle de 64 000 à 66 000 dongs par kg a pleinement reflété la pénurie de grains de café cette saison. Les prix intérieurs dans un proche avenir évolueront principalement autour de cette fourchette », a déclaré un négociant basé dans la ceinture du café. « Les torréfacteurs nationaux se plaignent que les prix sont trop élevés pour eux. Presque aucune transaction n’a été conclue ces derniers mois. » A l’export, le Grade 2, 5% grains noirs et cassés, a été offert avec une prime de $ 140 à 172 par tonne sur le contrat de septembre.

En Indonésie, le café de Sumatra a été proposé avec une prime allant de $ 530 à $ 560sur le contrat septembre contre $ 550 la semaine dernière, car le prix sur le terme est élevé, a déclaré à Reuters un commerçant.

CAOUTCHOUC

Le marché du caoutchouc demeure en petite forme. Hier les cours sur l’Osaka Exchange ont clôturé à 203,3 yens ($1,46) contre 205,2 yens vendredi dernier. Même tendance sur le marché de Shanghai, les cours passant de 12 480 yuans la tonne vendredi à 12 260 yuans ($1 706,55) hier.

Un marché toujours inquiet sur la croissance chinoise avec toutefois cette semaine l’annonce de mesures politiques pour stimuler la consommation. “Le marché reste méfiant et recherche des signes plus concrets de croissance de la demande, d’où la hausse marginale des prix” indique un négociant basé à Singapour.

En Malaisie, la production de caoutchouc naturel a augmenté de 6,8 % pour atteindre 25 062 tonnes en mai 2023 contre 23 460 tonnes en avril 2023, a indiqué le Département malaisien des statistiques (DoSM). En glissement annuel, elle a progressé de 20,2%.  Les stocks totaux ont chuté de 11,4 % à 172 263 tonnes en mai, les usines de transformation du caoutchouc contribuant à 92,4 % des stocks, suivies des usines consommatrices de caoutchouc (7,5 %) et des plantations de caoutchouc (0,1 %). Quant aux exportations, elles se sont élevées à 37 062 tonnes en mai, en baisse de 1,8% par rapport à avril.

En Inde, en dépit de la chute des prix, la production de caoutchouc a grimpé de 8,3% sur l’année fiscale 2022/23 pour atteindre 839 000 tonnes. La consommation est aussi en hausse avec une augmentation de 9% à 1,350 million de tonnes (Mt). Le segment des pneus automobiles représente plus de 70% de la consommation nationale de caoutchouc.

La Côte d’Ivoire a exporté 649 119 tonnes de caoutchouc naturel de janvier à juin, en hausse de 0,3 % par rapport à la même période l’an dernier, selon des données portuaires provisoire.

Côté entreprise, le groupe italien de pneumatiques Pirelli a acquis 100% Hevea-Tec – le plus grand transformateur indépendant de caoutchouc naturel du Brésil – pour une valeur d’environ €21 millions d’euros. L’acquisition permettra à Pirelli d’augmenter considérablement son approvisionnement en caoutchouc naturel en Amérique.

COTON

Net rebond du marché du coton cette semaine avec des cours qui ont atteint hier sur l’ICE un sommet de six semaines à 84,310 cents la livre contre 81,22 cents vendredi dernier. Des cours soutenus par un temps sec et chaud dans les principales régions de croissance, le phénomène El Nino impactant les récoltes.  Le coton est conscient “du fait que la récolte de l’hémisphère nord recule et qu’il fait chaud et sec“, indique Keith Brown, directeur du courtier en coton Keith Brown and Co, en Géorgie.

La Chine a revu à la baisses ses prévisions d’importations de coton pour la campagne 2023/24 en raison d’une demande plus faible que prévu des entreprises textiles. Elles devraient atteindre 1,45 million de tonnes (Mt), a indiqué le ministère chinois de l’Agriculture dans ses estimations mensuelles de l’offre et de la demande agricoles en Chine (CASDE), soit une réduction de 400 000 tonnes par rapport aux prévisions du mois dernier. La consommation chutera de 100 000 tonnes à 7,4 Mt, a-t-il indiqué, en raison de la faiblesse des exportations de textile et de la baisse de la demande de matières premières des fabricants de textile, selon le rapport.

Par ailleurs, China Cotton Reserves Management Company a indiqué mardi que la Chine libèrera du coton de ses réserves d’État à la fin du mois de juillet.

Au Pakistan, l’objectif de production de coton fixé à 12,7 millions de balles ne sera pas atteint mais la récolte devrait dépasser les 10 millions de balles, soit un niveau atteint il y a plus de dix ans. L’année dernière, suite aux graves inondations, la récolte de coton du Pakistan a touché un plus bas avec seulement 4,9 millions de balles produites.

En Inde, l’USDA estime que la production de coton de la campagne 2022/23 pour l’Inde à 26,0 millions de balles (480 livres), en hausse de 7 % par rapport à 2021/22 avec une superficie récoltée estimée à 13,0 millions d’hectares, en hausse de 5 % par rapport à la campagne de commercialisation 2021/22.

En Australie, l’USDA a revu à la baisse la production de coton en 2023/24 à 5,4 millions de balles, en baisse de 7% par rapport à 2022/23.

La Côte d’Ivoire a exporté 125 853 tonnes de coton de janvier à juin, en baisse de 45,2 % par rapport à la même période l’an dernier, selon les données portuaires provisoires.

HUILE DE PALME

L’huile de palme est dopée par le retrait de la Russie de l’accord sur les céréales de la mer Noire et a bondi sur la Bursa Malaysia Derivatives Exchange pour atteindre hier 4 047 ringgits ($891,41), un plus haut depuis le 15 mars, contre 3 877 ringgits vendredi dernier. Dans un contexte d’escalade des tensions entre la Russie et l’Ukraine, des inquiétudes pèsent sur l’approvisionnement en huile végétale de la région. La région de la mer Noire représente 60 % de la production mondiale d’huile de tournesol et 76 % des exportations.

Les cours sont aussi soutenus par la demande. Les exportations d’huile de palme de la Malaisie entre le 1er et le 20 juillet ont augmenté entre 10 et 19% par rapport au mois précédent selon les inspecteurs.

En Inde, les importations d’huile de palme ont bondi de 56% pour atteindre un sommet en trois mois en juin, les acheteurs ayant profité d’une baisse des prix pour augmenter leurs achats, indique dans un communiqué la Solvent Extractors’ Association of India (SEA). Les importations se sont élevées à 683 133 tonnes en juin, contre 439 173 tonnes en mai, les prix étant tombés à leur plus bas niveau en 28 mois.

RIZ

Avant la décision de l’Inde, le premier exportateur mondial de riz, d’interdire les exportations de riz blanc non basmati (Lire : L’Inde interdit les exportations de riz blanc non basmati, le marché grimpe), les prix à l’exportation du riz en Asie étaient déjà à des niveaux très hauts, le phénomène El Nino étant susceptible de freiner l’approvisionnement. Les prix devraient considérablement augmenter dans les prochains jours avec l’absence d’importants volumes de l’Inde sur le marché.

Au Vietnam, les prix du Viet 5% a bondi à un plus haut depuis 2011 à $515-$525 la tonne contre $510-$513 a semaine dernière (Lire : Le riz vietnamien 10% plus cher, au plus haut en 10 ans). “La demande est forte car de nombreux pays continuent d’augmenter leurs stocks en prévision des effets néfastes d’El Nino sur la production“, a déclaré un négociant basé à Ho Chi Minh-Ville.

En Inde, les prix du riz étuvé 5%, avant l’interdiction, étaient stables mais près d’un sommet de cinq ans à $421-$428 la tonne. “La demande est faible car les prix indiens ne sont pas compétitifs”, indique Himanshu Agarwal, directeur exécutif de l’exportateur Satyam Balajee. En outre, les rumeurs sur les restrictions à l’exportation semaient la panique sur le marché, décourageant les vendeurs de signer de nouveaux contrats, estime B.V. Krishna Rao, président de l’Association des exportateurs de riz.

En Thaïlande, les prix du Thaï 5% ont bondi à $545 la tonne métrique – leur plus haut depuis février 2021 – contre $515 la semaine dernière dans un contexte de demande ferme d’acheteurs anxieux. “Les acheteurs s’inquiètent de l’offre limitée et de la situation d’El Niño“, déclare un commerçant basé à Bangkok.

 

SUCRE

Petit sursaut du sucre qui, rappelons-le, surfe sur des sommets : en avril, le sucre roux a atteint 27 cents, son prix le plus élevé en 11 ans ! Hier, il était à 24,67 cents la livre (lb) sur octobre, certes moins que les 27 cents, mais un niveau très honorable lorsqu’on se souvient de la déshérence de ce produit durant des années. Vendredi dernier, nous avions laissé le sucre roux à 24,32 cents, son prix le plus élevé en deux semaines. Le sucre blanc à Londres s’est affaibli sur la semaine mais s’est ressaisi hier : de $ 700,70 sur l’échéance août vendredi dernier, la tonne a clôturé hier soir à $ 688,90.

Dans les zones de production, si, pour l’instant, le phénomène météorologique El Niño n’a provoqué que des pluies éparses dans les principaux pays producteurs, que ce soit l’Inde ou la Thaïlande, le Brésil, quant à lui, bénéficie de conditions météorologiques très favorables. On s’attend à une excellente production, voire à des volumes record, chez le géant latino-américain.

Au Brésil où, au 30 juin, les raffineries avaient couvert sur le marché à terme de New York 4,5 Mt de leur production sur 2024/25, soit environ 17% de leurs prévisions d’exportation, a indiqué lundi le spécialiste de la gestion de risques Archer Consulting. C’est moins que l’année dernière à pareille époque lorsque le taux était de 24% mais les raffineries ont obtenu des fixations plus élevées à 20,51 cents la livre contre 17,51 cents l’année dernière.

Archer Consulting estime que 15 Mt de canne resteront dans les champs pour n’être transformées qu’en 2024 car les volumes sont trop importants et l’industrie n’a pas suffisamment de capacités pour transformer tout cette année.

Côté consommation, après des années de mise en garde contre le sucre, c’est au tour des édulcorants artificiels d’être pointés du doigt pour leur impact néfaste sur la santé. Les pays émergents, côté consommation de sucre naturel, se portent à merveille.

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